Pourquoi le monde va scruter la décision de la Banque centrale américaine

La Banque centrale américaine devrait amorcer une hausse de ses taux directeurs pour contrer l'inflation. Une décision qui risque de se faire sentir sur l'économie mondiale.

La décision de la Banque centrale américaine devrait surtout se faire sentir sur les marchés financiers.
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La Banque centrale américaine (ou Fed) va présenter ce mercredi son calendrier pour l’année 2022.  Un programme qui devrait être rythmé par une hausse des taux directeurs. « C’est plus implicite qu’explicite », note l’économiste ING Philippe Ledent. « Tout le monde s’attend à ce que la Banque centrale américaine mène des actions ou freine ses actions entreprises par le passé dans le but de laisser les taux directeurs remonter un peu ». Il faut dire que les Etats-Unis connaissent depuis quelques mois une inflation record: 7% en 2021, au plus haut depuis 1982. « Et les Etats-Unis sont toujours très attentifs à ne pas laisser l'inflation monter trop haut », nous explique l'économiste Bruno Colmant. « Sinon les salaires commencent à augmenter et la compétitivité des entreprises à baisser ». 

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Cette remontée des taux doit donc permettre de « refroidir » la surchauffe économique actuelle et limiter ainsi l’inflation. Quand les taux sont plus élevés, les entreprises font, en effet, moins d’investissements et les ménages consomment moins (à la fois parce que les crédits à la consommation sont plus chers mais aussi parce qu’épargner redevient plus intéressant). Ce qui limite l'argent en circulation.  

Quel impact pour l'économie mondiale? 

L’impact de ce rehaussement des taux se ferait principalement sentir sur les marchés financiers. « Quand les taux d'intérêt sont plus hauts, les marchés boursiers ont un peu plus de mal », rappelle Philippe Ledent. Les investisseurs ont en effet tendance à vendre leurs actions et à se tourner vers des obligations lorsque celles-ci rapportent plus. Dans ce contexte, l'avenir des cryptomonnaies semble incertain. Selon Erik Joly, stratège en chef chez ABN AMRO, interrogé par Het Nieuwsblad, les plus frileux préféreront aussi placer leur argent sur un compte épargne, plus sûr, plutôt que sur le marché boursier spéculatif. L’anticipation du programme de la Fed se fait d’ailleurs déjà sentir.  L'impact exact de cette hausse reste difficile à prévoir. « Mais quand je vois la réaction intense des marchés boursiers cette semaine à l'annonce éventuelle d'une hausse des taux d'intérêt américains, je recommande de rester sur la touche pendant un certain temps », concède Erik Joly à nos confrères flamands.

Concernant l'Europe, l’impact de cette remontée des taux aux Etats-Unis serait principalement indirect. « La Banque centrale européenne n’a, à priori, aucune raison de se calibrer sur la Fed », nous explique Philippe Ledent. En novembre dernier, la présidente de la BCE Christine Lagarde avait jugé « très improbable » un relèvement des taux en 2022. Et ce, afin de ne pas mettre en péril la reprise économique sur le continent européen.  Si les taux d’intérêt ne remontent pas en Europe, cela pourrait cependant se traduire par une fuite de capitaux vers les Etats-Unis. Ce qui déprécierait l’euro par rapport au dollar et ferait chauffer les prix des matières premières importées en Union européenne. « Cela augmenterait l’inflation chez nous. Et cette augmentation de l’inflation pourrait inciter la BCE à agir », poursuit l’économiste d’ING. 

Si le lien formel entre les taux directeurs de la Banque centrale américaine et de la BCE est donc limité, l’Union européenne est, à l'instar des Etats-Unis, confrontée à une vague d’inflation. « Ce que va dire la Fed ce mercredi, préfigure ce qui pourrait arriver à un moment ou à un autre de la part de la BCE », avance Philippe Ledent. Selon l’économiste, la Banque centrale européenne serait plus lente que la Fed pour remonter les taux. « Mais il y a toujours une espèce de contagion entre les deux marchés. Ce qui se passe aux Etats-Unis, ce n’est qu’une question de temps avant que cela arrive chez nous puisqu’on a aussi de l’inflation ». Il est rejoint sur ce point par l’économiste Bruno Colmant. « C’est vraiment le signe qu’on sort d’une période de taux bas, qui a duré très longtemps. C’est un signal majeur ». Selon Tom Simonts, économiste financier chez KBC, interrogé par nos confrères du Nieuwsblad, cette hausse des taux pourrait intervenir en octobre ou novembre prochain.

Quelles conséquences alors si les taux venaient aussi à remonter en Europe? « Cela peut nous impacter positivement si la BCE arrive à juguler l’inflation mais si par contagion, les taux sont effectivement à la hausse, cela impactera négativement les consommateurs pour les crédits à la consommation et pour les crédits hypothécaires », note Philippe Ledent.

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