

L'industrie belge est actuellement confrontée à un double handicap compétitif concernant les prix de l'énergie. Tout comme le reste de l'Europe, elle subit en effet en la matière les conséquences de la guerre en Ukraine et des sanctions contre la Russie. Mais les grands consommateurs d'électricité belges doivent en outre faire face à des prix de l'électricité de 19 à 25% plus chers par rapport à la moyenne de l'Europe centrale et occidentale, ressort-il lundi d'une étude du bureau de consultance Deloitte réalisée à la demande de Febeliec, qui représente les consommateurs industriels d'électricité et de gaz naturel.
En 2022, les consommateurs 'baseload' (c'est-à-dire ayant une consommation d'électricité constante toute la journée, un profil majoritaire parmi les membres de Febeliec, NDLR) belges ont ainsi payé entre un cinquième et un quart plus cher leur électricité achetée que le prix moyen payé par les consommateurs en Europe centrale et occidentale, selon la 10e édition de cette étude comparative annuelle. Le phénomène est plus poussé en Wallonie (avec un prix de 20 à 25% plus cher) qu'en Flandre (où le prix est de 19 à 20% plus élevé).
Sur base annuelle, le handicap peut dès lors atteindre 2,94 millions d'euros en Flandre et 3,81 millions en Wallonie pour une entreprise utilisant 100 GWh par an. Et frôler les 26 millions d'euros au nord du pays et les 28 millions d'euros au sud lorsqu'il s'agit de profils atteignant 1.000 GWh de consommation annuelle d'électricité.
Les prix ont, de plus, augmenté de manière exponentielle dans tous les pays européens depuis un an, et encore plus depuis le début de la guerre en Ukraine. Seule la France tire son épingle du jeu grâce à son mécanisme ARENH, qui permet de réserver des volumes d'électricité produits par les centrales nucléaires à un prix compétitif pour les industriels. Les taxes sur l'électricité ont, elles, continué à augmenter légèrement et les tarifs du réseau de transmission sont restés sensiblement plus élevés que dans les pays voisins (France, Allemagne et Pays-Bas), constate Febeliec.
La Belgique est donc confrontée à un «énorme» désavantage compétitif par rapport à ses concurrents dans les pays voisins mais aussi à des prix de l'énergie substantiellement plus bas dans de grandes parties du monde, comme l'Amérique du Nord et du Sud, la Russie, l'Afrique ou encore l'Australie. «Un handicap structurel pareil met sérieusement en péril l'activité industrielle en Europe et en Belgique», met en garde Febeliec. Ce qui pourrait faire passer cette dernière à côté d'investissements importants de la part des grands groupes industriels actifs notamment en Belgique.
La fédération tire la sonnette d'alarme depuis plusieurs années déjà. Et «reste perplexe face au manque d'actions de nos différents gouvernements», selon les mots de son président Luc Sterckx, alors «qu'il est clair que beaucoup de décisions pourraient être prises immédiatement» pour remédier à cette situation et répondre à des demandes «urgentes et explicites».
Febeliec dit accueillir favorablement l'introduction de la norme énergétique au niveau fédéral. Ce concept, dont elle parlait depuis dix ans, prévoit de réaliser une étude comparative, probablement sous l'égide de la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (Creg), et de proposer des mesures si elle devait mettre en évidence un handicap pour l'industrie belge par rapport aux pays voisins. La fédération insiste cependant sur l'urgence de sa mise en pratique. «Mais cette norme ne va pas résoudre tous les problèmes. C'est un début», commente Peter Claes, administrateur de Febeliec.