La lourde facture écologique du géant chinois Shein

Des t-shirts à 2€, une robe de soirée à moins de 15€ des mules imitation Bottega Venetta à 15€… ici c’est le triomphe du prix le bas, bienvenue dans l’ultra fast-fashion. Et la facture écologique est plus que salée.

Shein
Ouverture de la première boutique pop-up de la griffe chinoise © Belga Image

Le géant chinois Shein en est le leader. La fast-fashion, c'est fini. Maintenant, on va encore plus vite, plus de temps à perdre. C'est le triomphe de l'Ultra-fast-fashion. La plateforme de retail est la griffe préférée des ados et connait l’une des croissances les plus exponentielles sur le marché. Shein a réalisé un chiffre d’affaires de 10 milliards de dollars.

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 Mais ce succès a un prix énorme. Un rapport récent de l’ONG suisse PublicEye a révélé les conditions de travail scandaleuses chez les sous-traitants de Shein à Guangzhou. Les travailleurs et travailleuses sont soumises à des cadences infernales de 11 à 12 heures par jour, avec un seul jour de congé par mois. Ces conditions violent la législation chinoise. Des conditions similaires prévalent dans l’entrepôt géant du groupe, qui tourne vingt-quatre heure sur vingt-quatre avec plus de 10.000 employés.

N'en déplaise cependant à nos ados qui restent les clients principaux de la griffe chinoise qui continue d’inonder le marché.

Une stratégie marketing bien rodée

Aussitôt acheté, aussitôt porté et aussitôt jeté. La mode jetable ne semble plus avoir aucun secret pour la marque Shein qui affiche une stratégie de communication bien rodée. Car la marque a décidé de frapper au cœur des activités de son public-cible, la GenZ. Et elle frappe fort.

Sur les réseaux sociaux, c’est avec une armada d’influenceuse et à grand coup de haul sur TikTok, le #SheinHaul compte d’ailleurs déjà 4 milliards de vues, que la marque se taille une place de choix chez les jeunes. Et à grand renfort de code promos, actions chocs et réductions, il n’a jamais été aussi facile de consommer. La mode devient jetable. Ce qui est commander est presqu’aussitôt jeté. Et on continue d’acheter. Toujours plus.

Un cout écologique dramatique

On le sait depuis maintenant quelques années, l’industrie de la mode est la seconde industrie la plus polluante au monde. Elle produit à elle seule près de 10% des émissions de CO2 et plus de 20% des eaux usées. Et si depuis longtemps les géants de la fast-fashion, Zara et H&M pour ne citer qu’eux sont pointés du doigts, ils paraissent presque comme des bons élèves face à Shein.

Parce que le géant chinois accélère un système lancé déjà à pleine vitesse. Et les anciens mauvais élèves en comparaison, apparaissent presqu’inoffensif. À l’heure du Less is More, Shein se targue d’ajouter chaque jour au moins 1000 nouvelles références sur sa plateforme. Sans surprise, le coût environnemental est désastreux.

C’est ce que révèle une étude publiée par Teenage Lab by Pixpay : le géant chinois de la mode Shein serait responsable de 22 % des émissions de CO2 des adolescentes.

Une génération pleine de paradoxe

La génération qui milite pour la justice climatique semble donc pleine de paradoxe. Elle n’hésite pas, poussée par les innombrables injonctions à la consommation, à dépenser quelques euros dans l’ultra-fast fashion. Jean-Baptiste Bourgeois, à la tête de la stratégie de l’agence de communication We are social, spécialisée dans les réseaux sociaux, souligne le paradoxe : «Cette génération est en principe très engagée, militante. Mais c’est aussi une génération qui dépense dans des marques de fast fashion et qui, de fait, encourage des modèles assez condamnables. Il y a une tension entre les valeurs écologiques et la réalité du portefeuille de ces jeunes, sujets à la tyrannie des réseaux sociaux.»

C’est que l’étude menée par Teenage Lab semble confirmer. Elle affirme que les jeunes ont « bien compris au fond d’eux-mêmes qu’ils participent à un modèle tout sauf responsable et encore moins durable ». Et mis devant leurs contradictions, six sur dix se déclarent ainsi prêts à réfréner leur fièvre acheteuse

De plus, la génération Z ne se contente pas seulement de faire la morale à ses anciens. Plus que jamais consciente de l’urgence climatique, elle s’adonne de plus en plus à la seconde main. Vinted est de plus en plus populaire auprès des jeunes. Environ 13,5% des jeunes auraient déjà fait une transaction sur la plateforme.

Si cette étude, réalisée par une agence bancaire, reste à prendre avec des pincettes, il n’en demeure que l’urgence est là ! Et les dangers de l’ultra-fast fashion sont plus qu’effrayants. Et cela illustre bien une fois encore comment les géants de la fast-fashion réussissent à attirer des jeunes pourtant davantage convaincus de l’urgence écologique que les autres générations.

« Finalement, les ados se font l’écho des contradictions de leurs parents et de leurs grands-parents avant eux.. Comme en 1968, la jeunesse veut sincèrement changer le monde, mais reste vulnérable aux pièges tendus à notre nature de consommateur hédoniste, attiré par la nouveauté et l’achat facile », conclut Caroline Ménager, cofondatrice de Pixpay et responsable du Teenage Lab.

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