
Le cri d’alarme des boulangers face à la crise de l’énergie : «le pire est sans doute à venir»

Il y a quelques semaines, leur désarroi avait été abondamment relayé : le couple de boulangers de Vencimont, qui avait vu leur facture d’énergie exploser, annonçait devoir fermer boutique. Ce mardi matin, ils étaient dans les rues de Namur, accompagnés d’une soixantaine (selon la RTBF) d’autres artisans en galère (boulangers donc, mais aussi bouchers, coiffeurs, restaurateurs, etc.).
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Devant l’Elysette, le siège du gouvernement wallon, ils ont manifesté et ont dénoncé les mesures régionales, jugées insuffisantes, prises par l’équipe dirigée par Elio Di Rupo (PS) pour contrer les effets de la crise énergétique. Une enveloppe de 175 millions € a en effet été dégagée en Wallonie, à destination des entreprises qui peuvent justifier de pertes d’exploitation dues à l’envolée des prix de l’énergie.
«Ce sont des miettes, dénonçait une boulangère au micro de la RTBF. On nous a donné quelque chose pour qu’on soit contents. Mais on n’est pas contents du tout. On est en sursis. On sait bien que si rien ne change, on sera dans la même situation que la boulangerie Dumont qui a dû fermer ou que d’autres. Pour un boulanger, sa boulangerie c’est sa vie. On vit souvent au-dessus de notre boulangerie, de notre atelier. Donc si on perd notre commerce, on perd notre maison».
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Symboliquement, les manifestants ont décidé de déverser des sacs remplis de miettes de pain sur la place des Célestines, devant un cabinet ministériel. «Les pigeons viendront les manger. Enfin, bon, les pigeons, aujourd’hui c’est nous», commentait un autre artisan auprès de nos confrères de l’Avenir. Une rencontre était prévue mardi après-midi entre le ministre wallon de l’Économie, Willy Borsus, et une délégation de boulangers.
«Si ça continue, on importera du pain d'Espagne»
Du côté de la Fédération francophone de la Boulangerie-Patisserie, on a préféré ne pas se mêler aux manifestants. «Je privilégie les contacts au long-court avec les différents acteurs autour de la table», nous explique Albert Denoncin. Pour autant, le président de la Fédération observe lui aussi avec inquiétude l’évolution de la situation énergétique. «Le pire est sans doute à venir. Pour l’instant, il y a encore de nombreux exploitants qui sont protégés par un contrat fixe. Nous estimons que bon nombre de ces contrats arriveront à échéance d’ici à janvier. Qu’est ce qu’il va bien pouvoir se passer en février et en mars ? », s’interroge celui qui a été boulanger pendant 43 ans.
«En mars 2022, j’avais alerté sur le fait que vu la conjoncture, le prix du pain pourrait atteindre les 5 euros. Ce qui semblait impossible, ne l’est plus totalement. On n’y est pas encore, mais on s’en rapproche». Récemment, le président des boulangers francophones estimait en effet que le prix du pain blanc, autour de 2,48 euros, pourrait dépasser les 3€ dans de nombreuses boulangeries, à qualité égale. Pour Albert Denoncin aussi, les mesures prises par les gouvernements régionaux et fédéraux restent insuffisantes.
L’extension du tarif social aux indépendants et petites entreprises, que la fédération appelait de ses vœux, n’a pas convaincu le Fédéral. Avec trois autres organisations professionnelles, la fédération francophone de la Boulangerie-Pâtisserie réclame désormais du gouvernement fédéral qu'il bloque le prix de l'électricité à 100 euros maximum le mégawatt-heure.
Dans le cas contraire, ils évoquent carrément la disparition de la filière boulangerie-pâtisserie belge. Et tout comme la Belgique importe des fraises d'Espagne, «si ça continue, on importera du pain d'Espagne» prédisent même les représentants du secteur…