Du changement pour les labels de qualité dans l'alimentation

Jambon d’Ardenne ou fromage de Herve sont protégés par des labels que l’Europe a décidé de renforcer, visibiliser et actualiser.

fromage herve
© BelgaImage

L'unanimité. 46 voix “pour” sur 46. La gauche, la droite et même les extrêmes se sont mis d’accord en Commission européenne de l’agriculture pour mettre à jour les labels qui protègent notre terroir. Ces précieux sésames existent depuis 2012 déjà, mais restent encore assez mal connus. L’Europe veut y remédier en promouvant la publicité et en intégrant deux nouvelles donnes dans le cahier des charges des produits “étoilés”: un critère environnemental et un critère de bien-être animal. Un fromage sera ainsi issu d’un lait récolté auprès d’animaux qui ont été respectés dans leurs conditions de vie, avec un espace suffisant et un abattage digne notamment, ainsi que d’une agriculture respectueuse de l’environnement et de sa durabilité.

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Le député européen Benoît Lutgen (Les Engagés) a bataillé avec un confrère italien Paolo De Castro pour y parvenir. Le vote en séance plénière se fera dans les mois à venir, avec une très forte probabilité de passer comme une lettre à la poste. Pour une fois, et c’est rare, l’Europe défend la slow food, celle du goût avec la préservation de l’artisanat et du savoir-faire, et une agriculture de qualité, locale et familiale. Une agriculture malmenée par la Commission en temps normal, la vision étant relativement dogmatique avec une vision de l’agriculture comme d’une industrie. “Certains ont essayé de détourner les produits locaux protégés comme de vendre du saucisson d’Ardenne alors que rien ne provenait d’Ardenne”, rappelle Benoît Lutgen. Les appellations ont ainsi permis de protéger les productions locales et les recettes ancestrales.

Cela donne à la fois plus de pouvoir aux agriculteurs et une garantie de qualité pour les consommateurs. Celui qui transforme le produit est obligé de s’adresser aux agriculteurs locaux qui doivent être respectés dans leurs prix. Le résultat correspond à une consommation plus durable, plus locale”, plaide le député qui souligne aussi que le domaine du bien-être animal est nouveau à l’échelle européenne mais était déjà respecté en Wallonie parce que les primes que reçoivent les agriculteurs sont conditionnées par le respect des normes sanitaires, environnementales et aussi le bien-être des animaux. En cas de contrôle, si le cahier des charges n’est pas respecté, les primes peuvent être retirées.

Alors? “C’est ça l’Europe aussi, assène Benoît Lutgen. Il y a une diversité de cultures et de terroirs qui sont respectés, y compris en termes d’emplois. Nous protégeons nos recettes pour qu’elles ne puissent pas être copiées. Je suis pour une Europe de la diversité qui ne soit pas américanisée avec le même fast-food pour tout le monde. C’est une urgence à l’heure où un agriculteur de plus de 50 ans sur deux n’a pas de repreneur. Les appellations sont ainsi une garantie pour l’agriculteur d’écouler sa production à un prix décent, en étant bon pour l’emploi, le climat et l’assiette du consommateur. Les appellations sont une clarification de ce que nous achetons et mangeons.

Cinq étoiles

L’AOP (appellation d’origine protégée) est le cinq-étoiles. Elle signifie que la fabrication d’un produit doit avoir lieu dans une aire géographique définie, avec un savoir-faire reconnu et constaté. Le lien entre les spécificités du produit et son terroir est essentiel et exclusif. En Wallonie, cinq produits sont reconnus en tant qu’AOP: le beurre d’Ardenne (qui se vend même au Japon), le vin des Côtes de Sambre et Meuse, le crémant de Wallonie, le mousseux de qualité de Wallonie et bien sûr le fromage de Herve. Le fromage de Herve, par exemple, provient de la prolifération d’une bactérie très spécifique que l’on ne trouve que du côté de Herve, la bacterium linens, appelé aussi ferment du rouge.

Quatre étoiles

L’IGP (indication géographique protégée) est le quatre-étoiles. Elle désigne des produits dont les caractéristiques sont étroitement liées à une zone géographique déterminée, dans laquelle se déroule au moins une étape de leur fabrication. Mais le lien entre le produit et son origine n’est pas exclusif. La réputation du produit peut suffire. En Wallonie, cinq produits sont reconnus IGP: le jambon d’Ardenne, le pâté gaumais, la pomme de terre plate de Florenville, le saucisson d’Ardenne et le vin de pays des jardins de Wallonie. C’est ici la recette qui ne peut être fabriquée que dans une zone. Par exemple, pour le jambon d’Ardenne, le porc peut provenir d’ailleurs.

Le nouveau projet

On aura un système d’IG unique pour le vin, les boissons spiritueuses et les produits agricoles avec les mêmes règles qui s’appliqueront à tous. Le rôle de l’Organisation de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) sera élargi. La nouvelle législation renforcera la protection des indications géographiques sur Internet. Un groupement de producteurs pourra aussi convenir d’exigences de durabilité sociale, environnementale. Il sera interdit d’utiliser, dans la dénomination alimentaire du produit transformé, l’IG désignant un ingrédient du produit, sauf en cas d’accord avec le groupement de producteurs représentant les deux tiers des producteurs.

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