L’accord flamand sur le climat conclu mais sèchement critiqué

Greenpeace qualifie le nouveau plan d’«absolument insuffisant» et l’opposition ne décolère pas.

L’accord flamand sur le climat conclu mais sèchement critiqué
Zuhal Demir, ministre flamande de l’Environnement, le 27 octobre 2021 @BelgaImage

Le gouvernement flamand a fini par trouver jeudi soir un accord sur de nouvelles mesures visant à renforcer sa politique climatique, a annoncé son ministre-président, Jan Jambon, à une semaine de la fin de la COP26, la conférence sur le climat qui se tient à Glasgow (Ecosse). Immédiatement, le nouveau plan climat a été qualifié d’«absolument insuffisant», a dénoncé l'organisation de défense de l'environnement, Greenpeace.

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De 35% à 40% de réduction de CO2

Les mesures approuvées par le gouvernement flamand prévoient une réduction des émissions de CO2 de 40% d'ici 2030, une ambition plus élevée que celle affichée jusqu'ici, a-t-on indiqué de source informée. Le gouvernement flamand s'était jusqu'à présent fixé un objectif de réduction des émissions de CO2 de 35%. Le paquet approuvé jeudi porte cet effort à 40%, selon des sources gouvernementales.

Il prévoit l'interdiction de vente de véhicules personnels à moteur à combustion ou de livraison à partir de 2029, a indiqué le cabinet du ministre-président, Jan Jambon (N-VA). Cet aspect nécessite toutefois une forme de coopération avec le niveau fédéral, compétent pour certains aspects, a-t-on souligné de même source. La Flandre espère ainsi se doter d'ici 2030 de l'équivalent de 100.000 points de recharge électrique pour des véhicules électriques. Elle compte aussi mettre en service davantage de «bus verts» au sein de la société publique de transport en commun De Lijn et de ses entreprises associées.

Selon l'accord trouvé jeudi, le gouvernement flamand imposera, à partir de 2023, une obligation de rénovation pour tout qui achète une maison énergivore. Tout personne qui devient propriétaire d'une maison de label PEB E ou inférieur devra faire les efforts nécessaires dans les cinq ans pour amener le bâtiment au niveau D. Des prêts sans intérêt sont mis à disposition à cette fin, a-t-on ajouté de même source.

À partir de 2023, les logements neufs en Flandre seront obligatoirement chauffés avec des pompes à chaleur hybrides. Ces systèmes fonctionnent en partie au gaz naturel et en partie à l'électricité. A partir de 2026, aucun raccordement au gaz naturel ne sera plus possible pour les bâtiments neufs. Il y aura également un incitatif pour les pompes à chaleur dans les maisons existantes. Pour l'agriculture et l'industrie, la barre d'émissions de CO2 a été est fixée à 10% plus haut que prévu initialement.

Jambon satisfait, Greenpeace déçu

M. Jambon s'est dit jeudi soir convaincu que les nouvelles mesures font preuve d'ambition, tout en restant réalisables et abordables.«Ils'agit de trouver le bon équilibre», a-t-il commenté au regard de l'accord trouvé au sein de sa coalition régionale, rassemblant la N-VA, l'Open Vld et le CD&V. «Comment pouvons-nous, en tant que petit pays, apporter une contribution maximale au problème climatique mondial, de manière à ce que cela soit justifiable pour tout le monde», a-t-il ajouté, alors que les discussions au sein du gouvernement flamand ont jusqu'ici empêché tout accord intrabelge sur l'épineuse question de la répartition de l'effort climatique entre le fédéral et les entités fédérées, appelée aussi «burden sharing».

Mais depuis cet accord, ce plan ne cesse de susciter des critiques. Bien que revus à la hausse, les objectifs climatiques de la Flandre sont encore jugés insuffisants par l'association écologiste Greenpeace. «L'objectif européen est de 55 % et les climatologues nous exhortent à être encore plus ambitieux», souligne Mathieu Soete, directeur de campagne pour Greenpeace.

«Même après le signal fort envoyé lors de la grande marche pour le climat du mois dernier, les politiques ont un manque total de vision et se contentent de demi-mesures», regrette M. Soete. «Nous devons de toute urgence réduire notre cheptel, rénover nos bâtiments plus rapidement et mener une transition industrielle». L'organisation déplore encore un accord conclu rapidement, sans trajectoire claire, afin de laisser partir la ministre flamande de l'Environnement Zuhal Demir à Glasgow, où se tient la Conférence sur le climat.

Vooruit et le PVDA très critiques 

Outre Greenpeace, l'opposition se montre elle aussi très critique. «L'accord sur le climat transfère les vrais efforts aux Flamands ordinaires. Le gouvernement flamand ne fournit même pas de cadre pour rendre tout cela possible», a réagi Bruno Tobback, député Vooruit et ex-président du sp.a. «C'est la preuve que le gouvernement n'est pas disposé à changer fondamentalement de direction durable. Les ministres flamands ont eu besoin d'une semaine entière à table pour déplacer quelques virgules dans leurs plans existants et inadéquats. Si vous ne pouvez pas décider d'une intervention structurelle après avoir si longtemps assis autour de la table, alors vous pouvez difficilement parler de gouvernance».

Le PVDA a qualifié le nouveau plan climatique du gouvernement flamand de politique d'intimidation. «Beaucoup plus d'ambition est nécessaire dans la politique climatique flamande, mais avec ce plan, le gouvernement va complètement dans la mauvaise direction», a déclaré le chef du PVDA, Jos D'Haese. «Alors que le gouvernement lui-même se soustrait à sa responsabilité, il renvoie entièrement la facture au citoyen. Cette politique climatique élitiste est non seulement antisociale, mais aussi très inefficace».

Selon lui, le gouvernement flamand aurait pu prendre une série de mesures comme investir dans de meilleurs transports publics. «Ou des mesures ambitieuses pour accompagner les familles dans les rénovations, par exemple en prépayant les charges et en les amortissant via une facture énergétique réduite. Travailler sur les énergies renouvelables publiques. Et des normes contraignantes pour les grands pollueurs. Autant de mesures qui ont un impact majeur sur nos émissions et qui aident les gens à aller de l'avant au lieu de leur coûter», conclut D'Haese.

La ministre fédérale du Climat Zakia Khattabi se dit également «déçue» du plan climat flamand. Le ministre Ecolo reconnaît que le gouvernement flamand monte en puissance, «mais compte tenu du contexte politique de la COP26 et de l'urgence climatique, l'inverse aurait été incompréhensible et inacceptable». Cela reste «bien en deçà de ce que demande l'Europe (l'UE demande à la Belgique de réduire ses émissions de 47%, ndlr) et à la veille des vraies négociations sur le partage des charges, le message est: faites le reste!».

Le gouvernement flamand se défend

Suite à ces critiques, la ministre flamande de l'Environnement Zuhal Demir (N-VA) a réfuté, durant l'émission Terzake (Canvas), les attaques de l'opposition selon lesquelles les engagements climatiques du gouvernement flamand devront être principalement assumées par les familles. L'agriculture et l'industrie feront également leur part, a-t-elle assuré. «Il y aura par exemple une taxe sur le gaz naturel pour l'industrie», a déclaré Mme Demir. «Nous utiliserons ce budget pour réduire la facture d'électricité des familles et des personnes isolées. Cela devrait rapporter environ 45 millions d'euros». À partir de 2023, les subventions aux combustibles fossiles dans l'agriculture et l'industrie seront par ailleurs supprimées. La mesure devrait rapporter 170 millions d'euros par an d'ici 2030. «On pourra aussi déduire cette somme des factures des familles», a précisé la ministre.

Zuhal Demir a également défendu les normes énergétiques plus strictes dans le secteur du logement. Selon l'accord trouvé jeudi, le gouvernement flamand imposera, à partir de 2023, une obligation de rénovation pour tout qui achète une maison énergivore. «La rénovation obligatoire sera toutefois rendue possible grâce à des prêts sans intérêt et des primes», a-t-elle encore fait valoir.

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