
Foie gras : à quand une interdiction du gavage en Wallonie ?

Déjà interdit à Bruxelles, le gavage le sera fin 2023 en Flandre. Et, moyennant compensations, le dernier producteur de foie gras de Flandre a accepté d’anticiper cette interdiction et de renoncer à recourir au gavage, ont annoncé mardi les autorités du nord du pays. Une décision qui isole un peu plus la Wallonie sur la carte de l’Europe. À l’échelon européen, seuls la France, la Hongrie, la Bulgarie et la Wallonie restent en effet producteurs de foie gras.
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Au grand dam des associations de défense animale, qui tentent depuis des années de faire cesser la pratique au sud du pays. Lundi, une pétition pour l'interdiction du gavage des oies et canards en Wallonie a été déposée auprès du Parlement wallon. Elle comptabilise plus de 6.650 signatures, dont 1.578 électroniques, a communiqué GAIA. «Elle devient la pétition la plus signée depuis la modernisation du droit de pétition et le lancement du nouveau système du Parlement wallon», a indiqué l'association qui milite pour le bien-être animal.
Les Belges, ces friands de foie gras
Jusqu'ici, la ministre wallonne du Bien-être animal, Céline Tellier, a toujours prôné un encadrement des éleveurs et l'amélioration des conditions d'élevage, plutôt qu’une interdiction pure et simple. Une position qui fait dire à GAIA que «la Wallonie ne se positionne pas en faveur du bien-être animal dans le cadre de ce dossier». D'autant qu'à en croire des données récoltées en mars 2022 par l'institut de sondage Ipsos, les Wallons seraient sur ce dossier sur la même ligne que les associations : 69% des sondés aimeraient que la Wallonie suive l'exemple de la Flandre et interdise le gavage.
Reste que dans le même temps, les Belges sont les deuxièmes consommateurs de foie gras au monde, juste derrière les Français. Même si les producteurs locaux (moins d’une dizaine en Belgique) ne fournissent que 5% environ de la consommation belge, les opposants à l’interdiction mettent en avant les pertes économiques que celle-ci représenterait. Leur crainte ? Qu’en cas d’interdiction pure et simple, le consommateur wallon se contente d’acheter encore davantage de foie gras venu de France ou d'Espagne.
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En 2018, le précédent ministre du Bien-être animal, Carlo Di Antonio (CDH à l’époque) avait annoncé sa volonté d’en finir avec le gavage des oies, sans aboutir. La piste évoquée à l’époque par les centristes était de revenir sur les normes européennes encadrant la pratique.
Changer les normes européennes?
Pour obtenir l’appellation de foie gras, l’Europe fixe en effet un seuil de 400 grammes pour une oie et 300 grammes pour un canard. C’est la technique du gavage qui permet au foie de l’animal d’atteindre ce poids. «Si on lève cette contrainte de poids minimum, on peut obtenir du foie gras, de poids inférieur, mais qui n’oblige plus les producteurs à gaver l’animal pour obtenir l’appellation foie gras. Un produit similaire en qualité mais obtenu sans gavage doit pouvoir obtenir l’appellation foie gras», expliquait alors à La Libre le député Julien Matagne (CDH).
Une solution qui n’en serait pas une, selon certains producteurs. «Il faut 450 à 500 g pour obtenir un foie de qualité», estimait dans l’Echo Valérie Van Wynsberghe, exploitante de la Ferme de la Sauvenière à Hemptinne (Florennes). Selon elle, en-dessous de 300 g, on n’obtiendrait que du «pâté crème», pas du foie gras.
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Si les défenseurs du bien-être animal attendent également beaucoup de l’Europe pour parvenir à une interdiction, ils n’ont jusqu’ici pas eu gain de cause. Après avoir été initialement adopté, un amendement présenté dans le cadre d’un rapport sur «la fin des cages» et qui invitait «la Commission à présenter des propositions visant à interdire le gavage cruel et inutile des canards et des oies pour la production de foie gras» avait finalement été rejeté par 336 voix contre 282 devant le Parlement européen.