«Quelle hypocrisie»: les décideurs du Forum de Davos critiqués pour leur usage massif des jets privés

Un rapport commandé par Greenpeace dénonce un nombre trop élevé de vols en jet privé sur des destinations parfois très courtes, lors du dernier Forum économique mondiale de Davos (WEF).

les décideurs du forum de Davos critiqués pour leur usage massif des jets privés
© Unsplash

Au Forum économique mondial de Davos (FEM), en Suisse, on voit la vie en vert, en mode éco-responsable. Les ustensiles à usage unique y ont été bannis, les poubelles à recyclage y sont omniprésentes, tous les buffets proposent une option végé ; même les moquettes des salles accueillant les rencontres sont fabriquées à partir de filets de pêche usagés… On y semble aussi conscient du défi climatique : vendredi, le forum a dévoilé son dernier rapport, dans lequel l’incapacité à atténuer et à s’adapter (au réchauffement climatique était pointée comme le risque le plus important pour l’humanité pour ces dix prochaines années.

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Oui, mais voilà : à cinq jours de l’édition 2023 du FEM, la parution d’un autre rapport, cette-fois signé Greenpeace, jette un autre regard sur la grand-messe économique des Alpes suisses. En 2022, lors de la dernière édition du Forum, plus d’un millier de jets privé ont atterri et décollé des aéroports les plus proches de Davos. De quoi faire quadrupler les émissions de CO2 (9.700 tonnes) dans la région par rapport à une semaine ordinaire, selon cette étude menée par le groupe de réflexion environnemental néerlandais CE Delft. 9.700 tonnes de CO2, cela équivaut aux émissions d'environ 350. 000 voitures moyennes en une semaine, pointait Greenpeace.

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Sauts de puces

Si cette situation n’a rien de neuve (le balai des jets privés, des hélicoptères et des limousines occasionnés par la venue des décideurs politiques et économiques de ce monde se répète chaque année), le rapport commandé par Greenpeace a le mérite de l’objectiver. Ainsi, selon les chiffres avancés par l’organisation environnementale, le nombre de vols privés au départ et à destination des aéroports autour de Davos était deux fois plus élevé pendant l’édition 2022 du Forum que pendant une semaine moyenne de l’année.

Et ces vols portaient souvent sur de très courtes distances. Selon le rapport, 53 % des vols en jet privé au départ et à destination des aéroports proches de Davos étaient en effet des vols de moins de 750 km ; 38 % d’entre étaient des vols ultra-courts de moins de 500 km, facilement réalisables en train ou en voiture. Le vol le plus court était un véritable saut de puce, puisqu’il ne faisait que… 21 km. À noter qu’entre la Belgique et Davos, il y a eu 15 vols au cours de la période analysée.

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«Il est temps que nos dirigeants politiques commencent à montrer l’exemple»

«Les riches et les puissants s’envolent actuellement pour Davos pour discuter du climat et des inégalités mondiales à huis clos, en utilisant le moyen de transport le plus inégalitaire et le plus polluant qui soit : le jet privé», fustigeait dans un communiqué Joeri Thijs, porte-parole de Greenpeace Belgique. «C’est une honte. Et c’est d’autant plus indécent quand on sait qu’en ce mois de janvier 2023, des records de chaleur sont déjà battus dans toute l’Europe et que les catastrophes climatiques touchent de plus en plus de personnes dans le monde».

Du côté du Forum économique mondial, on s’est déjà défendu dans le passé sur cette utilisation massive de jets privés. «La plupart des avions privés sont en fait affrétés par des dirigeants politiques, parce que c’est plus efficace et plus sûr», avait par exemple justifié Dominique Waughray, un responsable du Forum.

Au sein de Greenpeace, on continue néanmoins de dénoncer une injustice :«étant donné que 80 % de la population mondiale n’a jamais pris l’avion, mais souffre des conséquences des émissions de l’aviation nuisibles au climat, […] cette fête annuelle des jets privés est un cours magistral d’hypocrisie de mauvais goût, jugeait Klara Maria Schenk, chargée de campagne pour l’ONG. Il est grand temps que nos dirigeants politiques commencent à montrer l’exemple au lieu de produire du vent dans des réunions secrètes avec les grandes entreprises», ajoutait-t-elle dans un communiqué.

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