Fêtes de fin d'année en famille : «Noël n’a plus la même signification aujourd’hui»

Comment les fêtes ont-elles évolué à l’heure de la crise et des familles recomposées ? En 2022, Noël, la grande fête des enfants, se réinvente au gré des nouvelles réalités sociologiques.

une famille décore le sapin de Noël
© Adobe Stock

Chaque année, c’est le marathon”, soupire Alexia qui fêtera quatre fois Noël. Ses parents, comme ceux de son compagnon, sont séparés. “Ils veulent chacun que nous fêtions avec eux. Et c’est normal”, dit Alexia qui doit user de diplomatie et alterner chaque année le réveillon du 24 ­décembre et le dîner du 25 entre les quatre parents. “Noël est un miroir de notre société contemporaine et de toutes ses nouvelles réalités, pose Bernard Fuselier, sociologue à l’UCLouvain. Il n’a plus la même signification aujourd’hui, qu’elle soit religieuse ou familiale. Aujourd’hui, Noël, c’est la fête des enfants. Faire famille en 2022, c’est se réunir autour des enfants qui sont généralement submergés de cadeaux.

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La famille nucléaire existe toujours mais elle doit composer avec les familles recomposées et monoparentales. Il faut faire preuve d’inventivité pour se réunir. Certains n’hésitent pas à reformer le couple parental pour l’occasion. Mais la plupart multiplient les réveillons avec les enfants comme trait d’union et motivation première. Les Noëls d’aujourd’hui sont aussi souvent devenus de ­grandes fêtes intergénérationnelles. Avec l’espérance de vie qui a augmenté, il n’est plus rare d’avoir des arrière-petits-enfants. On n’imaginait pas il y a cinquante ans que quatre générations puissent se réunir. “Et puis, notre monde est devenu multiculturel et Noël s’est laïcisé. Beaucoup de musulmans n’hésitent pas à fêter Noël. Certains préfèrent réveillonner entre amis.”

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"Un moment de joie que tout le monde ne partage pas"

Mais si Noël reste encore et toujours la grande fête de l’affection et des cadeaux, il y a des ­périodes de la vie où on en a moins envie. Entre 20 et 30 ans, on n’a plus envie d’être un enfant et souvent on n’est pas encore parent. Et quand on est divorcé ou ­célibataire, on est moins ravi de côtoyer les ­couples qui filent le parfait bonheur. Robert déteste Noël qui lui rappelle chaque année ses mauvaises relations avec ses enfants qu’il ne voit plus. Étienne, célibataire sans enfant, déteste cette période, entre cohue dans les magasins et obligation de faire plaisir. Ce genre de réunion de famille l’angoisse. Les “natalophobes”, les angoissés de Noël, sont plus nombreux qu’on ne le croit. Les psys en savent quelque chose, overbookés chaque année à la veille des fêtes de fin d’année. “Noël est aussi une forme d’épreuve familiale, explique Bernard ­Fuselier. Ceux qui sont invités sont ceux qui ­comptent et il y a des laissés-pour-compte. Une partie des gens, qu’on évalue à 10 %, se retrouvent dans un Noël triste parce qu’ils sont seuls ce jour-là ou qu’ils n’ont pas d’enfant ou qu’ils ont perdu un enfant. C’est un moment de joie que tout le monde ne partage pas. Certains partent aussi skier, faisant de Noël une fête banale.

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La messe de minuit qui a longtemps été le cœur de la fête de Noël ne fait plus recette. Les pratiquants occasionnels, qui ne vont à l’église que pour les grands événements, ont parfois perdu cette habitude sacrée alors que le Covid les a privés de messe de minuit deux années d’affilée. “La messe de minuit peut néanmoins encore être une occasion religieuse comme un mariage, mais de toute façon ce n’est plus ça qui crée l’ambiance de Noël.” Alors? “Noël reste néanmoins un rituel très important dans l’année. C’est la fête la plus plébiscitée dans notre société. C’est une célébration qui participe aux identifications. Nous sommes des êtres sociaux qui avons besoin de partager des rites et des valeurs. En ce sens, Noël est un moment de sens et de communion, mais il est diversement apprécié et pratiqué.

Retrouvez notre dossier spécial Enfin, les fêtes

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