
Les fake news russes pour justifier la guerre en Ukraine

Le récit est bien rodé. Jeudi 24 février, quelques minutes avant que les premiers missiles russes touchent l’Ukraine, Vladimir Poutine annonce “une opération militaire spéciale” destinée au “maintien de la paix” chez son voisin. Il est 6 h du matin, heure locale, et la guerre des mots a commencé en même temps que celle sur le terrain. Dans ses discours, le président russe affirme vouloir libérer le peuple ukrainien des intimidations du régime de Kiev. Lui qui a reconnu unilatéralement l’indépendance des provinces séparatistes pro-russes à l’est de l’Ukraine deux jours avant, estime désormais que c’est tout le pays qui souffre du “génocide” perpétué par le pouvoir en place. Et puisqu’il n’a décidément pas peur des mots, Poutine prétend donc envoyer ses troupes pour “dénazifier” le pays (alors que le président Zelensky est… juif) et le libérer de la clique de “drogués” au pouvoir. L’agresseur devient en ces termes le sauveur d’une nation en perte.
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Évidemment, personne n’est dupe. Dans les faits, le régime ukrainien n’est ni porteur d’une idéologie nazie, ni auteur de génocide. Gare à ceux, cependant, qui s’opposent à la version de l’histoire servie par Poutine. Les médias russes indépendants qui ont remis les mots à leur place se sont fait sévèrement rappeler à l’ordre. Le régulateur national des médias leur a ordonné de supprimer de leurs contenus toute référence à des civils tués par l’armée russe en Ukraine, ainsi que les termes “invasion”, “offensive” ou “déclaration de guerre”, sous peine d’être bloqués. Les autorités ont également limité l’accès à Facebook pour effacer la réalité des bombardements aux yeux des Russes.
Les alliés du Kremlin
Chez nous, il a été décidé à l’inverse de censurer la chaîne de télévision proche du pouvoir Russia Today et l’agence de presse Sputnik. La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé dimanche qu’ils seront bannis de l’Union européenne, ainsi que leurs filiales, pour stopper “la machine médiatique du Kremlin” et “la désinformation toxique”. “Ils ne pourront plus diffuser leurs mensonges pour justifier la guerre de Poutine”, a-t-elle écrit sur Twitter.
Au-delà des médias d’État russes, la propagande du Kremlin est renforcée par des soutiens étrangers. Le président syrien Assad décrit l’invasion de l’Ukraine comme “une correction de l’histoire”, Trump qualifie la stratégie du président russe de “coup de génie”… Et en France, où Vladimir Poutine compte de nombreux appuis, la guerre risque bien d’avoir des conséquences sur certains candidats aux élections présidentielles. S’ils ont tous fermement condamné la déclaration de guerre russe, Le Pen, Zemmour et Mélenchon sont bien embêtés face aux propos qu’ils ont tenus par le passé. Tous trois minimisaient, jusque-là, la menace d’une invasion en Ukraine, tenant plutôt l’Otan pour responsable des tensions.