
Ukraine: de la guerre éclair à l’enlisement, retour sur un mois d’invasion russe

24 février, le début de la guerre
Les bruit des bottes se faisaient entendre depuis de longues semaines. Le 24 février, à 3h53 du matin (heure belge), Vladimir Poutine annonce à la télévision russe le lancement d’une « opération militaire spéciale ». À 4h30, plusieurs explosions sont entendues dans la capitale, Kiev, et dans plusieurs autres villes d’Ukraine. C’est le début de l’invasion. Bombardements massifs et simultanés des défenses anti-aériennes du pays, attaques menées depuis le ciel, la mer et terre… le scénario des premières heures a tout de la guerre éclair.
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Vladimir Poutine, le 24 février @BELGAIMAGE
Les forces armées pénètrent en Ukraine par le Nord via le Bélarus, l’est via la Russie et le sud via la Crimée, annexée en 2014. Elles progressent vite et prennent possession de plusieurs points clés, comme la centrale de Tchernobyl. Le spectre nucléaire fond à nouveau sur l’Europe, d’autant que dans les jours suivants, Vladimir Poutine agitera à plusieurs reprises l’épouvantail de l’arme atomique.
25 février, Kiev bombardée
Dans la nuit, de puissantes explosions sont entendues dans le centre de la capitale. Suite à un appel du bourgmestre de la ville, Vitali Klitsjko, de nombreux habitants trouvent refuge dans les stations de métro restées ouvertes. Des troupes russes font leur entrée dans Kiev, mais leur progression reste limitée au nord-est de la ville. Les jours suivants, les Russes tentent de faire tomber plusieurs grandes villes, comme Kharkiv, au nord, et Marioupol, au sud.
Métros de Kharkiv et Kiev ce soir.
Pour être honnête ca me fend le cœur alors ce sera tout pour ce soir 🙏 pic.twitter.com/QhzU4nJHzC— Benoît Vitkine (@benvtk) February 24, 2022
2 mars : Kherson, première grande ville à tomber
Le 1er mars, des images satellites montrent un convoi de plusieurs dizaines de kilomètres de long en route vers Kiev.
Le 2, l’offensive russe redouble de vigueur. Moscou revendique la prise de Kherson, la première grande ville ukrainienne à tomber. Un mois après le début de la guerre, elle reste la seule.
10 mars : Annonce de « couloirs humanitaires quotidiens »
Passés la première semaine, l’invasion a semblé ralentir. Confrontées à des problèmes logistiques, d’approvisionnement, de coordination et de communication entre ses différentes composantes, les forces russes ne progressent plus aussi rapidement.
Elles doivent également faire face à un adversaire à ne pas sous-estimer : la « raspoutitsa », un phénomène météo qui transforme le sol ukrainien en bourbier pour les chars russes. Après plusieurs rounds de négociations, la Russie annonce l’ouverture de couloirs humanitaires pour permettre l’évacuation des civils.
16 mars : Le théâtre de Marioupol lourdement bombardé
Assiégée depuis trois semaines, Marioupol fait face à un déluge de bombes. Le 16 mars, un théâtre de la ville est visé, « bien qu’il ait servi d’abri bien connu et clairement identifié pour les civils, y compris les enfants ». « L’UE condamne dans les termes les plus fermes les forces armées russes et leurs mandataires, qui continuent de cibler la population civile et les infrastructures civiles ukrainiennes », déclare le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell dans un communiqué.
Pour la première fois, le président américain, Joe Biden, qualifie de « criminel de guerre » son homologue russe, Vladimir Poutine. Sur le terrain, l’armée russe engrange des avancées sur le front sud, mais piétine au nord et au nord-est.
22 mars : 10.000 morts côté russe ?
Certains analystes qualifient d’ « insoutenable » le taux de pertes humaines enregistrées par la Russie. Mardi 22 mars, le journal Komsomolskaïa Pravda a évoqué, avant de rapidement retirer son article, un rapport du ministère de la défense totalisant 9 861 morts et 16 153 blessés, depuis le début du conflit.
L’armée russe pourrait avoir perdu 10 % de sa force de combat totale en quatre semaines, selon le renseignement américain. Si elle a d’abord engrangé des résultats importants, elle s’est ensuite heurtée à la résistance, sans doute sous-estimée, de l’armée ukrainienne. Même Kharkiv, la deuxième ville la plus peuplée d’Ukraine et distante seulement de quelques dizaines de kilomètres de la frontière russe, n’est pas tombée.
Here is the latest control-of-terrain #map for #Russia's invasion of #Ukraine from @TheStudyofWar and @criticalthreats pic.twitter.com/9GVobb2BY1
— ISW (@TheStudyofWar) March 22, 2022
Quels scénarios pour la suite?
Quelle pourrait être la suite, après un mois de guerre ? Enlisement prolongé, percées russes… plusieurs scénarios circulent parmi les analystes. Placée à un carrefour stratégique, la prise de Marioupol si elle venait à avoir lieu, pourrait s’avérer être un tournant dans la guerre. Dès le 9 mars, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, promettait le 9 mars « la défaite stratégique » d’un Vladimir Poutine devenu paria du monde, malgré tous les « gains tactiques de court terme qu’il pourrait faire ». « Nous avons déjà vu que la Russie a échoué sur ses objectifs principaux. Elle n’a pas été capable de prendre l’Ukraine. Elle n’est pas en voie de tenir l’Ukraine sur le long terme », jugeait-il.
Reste qu’un enlisement de l’armée russe pourrait avoir de terribles conséquences sur les civils ukrainiens. Pour Kori Schake, ancienne cadre du Pentagone et du Conseil de sécurité nationale américain interviewée sur PBS (relayée par Le Monde), nous devons en effet « craindre de voir Vladimir Poutine dans la position d’un rat pris au piège, souhaitant infliger un maximum de dégâts sur le chemin de son échec ».