Massacre de Boutcha: génocide ou crime de guerre?

Plusieurs mots ont été utilisés pour qualifier le massacre des civils de Boutcha par l'armée russe. Mais leurs significations diffèrent.

Massacre de Boutcha: génocide ou crime de guerre?
Le président Zelensky à Boutcha. (@Belga Image)

Après la découverte du massacre réalisé par l’armée russe dans les rues de Boutcha, notamment des nombreux corps sans vie de civils jonchant les rues de la ville ukrainienne, tous les dirigeants de pays opposés à la guerre n’ont pas utilisé les mêmes termes pour condamner ce qui s’était passé.

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Pour Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, cet acte de barbarie est un «génocide» et un «crime de guerre», ce qu’ont également affirmé d’autres leaders européens, comme le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki et l’Espagnol Pedro Sanchez. D’autres, comme notre Premier ministre à nous, Alexander De Croo ont préféré ne pas employer le mot  «génocide».

A raison ? On peut le croire.

Qu’est-ce qu’un génocide ?

Le Larousse définit un génocide, comme un «crime contre l'humanité tendant à la destruction totale ou partielle d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux» et Le Robert décrit la «destruction méthodique d'un groupe humain».

Peut-on donc vraiment parler de génocide à Boutcha ? Pour Murielle Paradelle, professeure de droit de l’Université d’Ottawa, ce n’est pas le cas. Malgré l’horreur qui s’est déroulée dans les rues de cette ville, rien n’indique une volonté de Poutine ou de l’armée russe d’éliminer l’entièreté de la population de cette entité ou de toute l’Ukraine.

Peut-on parler de «crime de guerre» ?

Le crime de guerre n’a pas de cadre unique. Il est défini par les conventions de La Haye ainsi que par celles de Genève, qui interdisent certaines armes, comme les gaz asphyxiants, explique Libération, mais aussi que les personnes ne participant pas au conflit doivent être protégées. D’autres détails sont précisés par l’article 8 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale de 2002.

Puisque des civils ont été tués, et, semblerait-il, pas par accident, il est bien possible que ces actes soient qualifiés de crimes de guerre.

Et aussi un «crime contre l’humanité» ?

Probablement aussi, puisqu’il s’agit de situations où une population civile est prise pour cible et attaquée. Damien Vandermeersch, spécialiste du droit pénal international, estime qu’il s’agit qu’un qualificatif plus adapté que «génocide». «Est-ce que c'est toute la population qui a été visée, jusqu'au dernier ? C'est un peu ça malheureusement la logique du génocide. Ici je parlerais plus alors de crime contre l'humanité, c'est-à-dire une attaque généralisée ou systématique contre une population civile», a-t-il déclaré au micro de la RTBF. «Attention aux crimes contre l'humanité, ce n'est pas rien. C'est évidemment quelque chose où on veut justement rendre le caractère massif des crimes qui sont commis».

Qui va juger ?

Il ne s’agit évidemment pas que de vocabulaire, mais bien de termes juridiques de droit international. Il est important de qualifier avec précision ce qui se déroule en Ukraine afin que les responsables soient jugés de façon adaptée. Il faudra donc attendre une enquête de la Cour pénale internationale, qui doit envoyer des enquêteurs sur place.

«Ce sont des enquêtes difficiles parce qu'il faut absolument mener les enquêtes sur le lieu des faits. [...] Mais on voit quand même, et ça, c'est assez inédit, que l'on peut mener l'enquête très rapidement. Habituellement, la justice vient vraiment a posteriori, quand les crimes sont terminés, des fois des mois après», ajoute Damien Vandermeersch.

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