
Les eurodéputés demandent un embargo total sur le gaz et le pétrole russes

Le Parlement européen a validé jeudi une résolution exigeant une interdiction immédiate des importations de gaz et de pétrole depuis la Russie. Le texte, non contraignant, a été approuvé par une large majorité: 513 voix pour, 22 contre et 19 abstentions.
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Une majorité presque aussi large (413 pour, 93 contre, 46 abstentions) avait précédemment soutenu un amendement pour inclure dans le texte la demande d'un embargo total et immédiat sur tous les combustibles fossiles (charbon, gaz, pétrole) et sur les combustibles nucléaires (uranium) venant de Russie. Le vote final a mené à une ovation debout dans l'hémicycle.
"C'est un moment important et une étape significative. La position du Parlement est claire et envoie le message le plus fort possible de soutien aux personnes sur la ligne de front en Ukraine", a commenté la présidente du Parlement européen, la Maltaise Roberta Metsola. Les eurodéputés tentent ainsi d'augmenter la pression sur la Commission européenne et les États membres. La première a proposé mardi un «5e paquet» de sanctions européennes, qui comprend une interdiction de l'importation de charbon russe mais ne touche pas (encore) aux autres sources d'énergie pour lesquelles l'UE dépend grandement du voisin russe. Les États membres discutent cette semaine de ces sanctions supplémentaires. Une source diplomatique européenne indique jeudi que «l'objectif partagé» des États membres est de trouver un accord sur la nouvelle vague de sanctions «aujourd'hui» (jeudi). Que cela puisse se faire en deux jours après la proposition de la Commission est exceptionnellement rapide, a-t-il affirmé, soulignant qu'il s'agit de «choix économiques» d'ampleur non négligeable. Les représentants des 27 auprès de l'UE se réunissent une nouvelle fois jeudi à partir de 18h00, pour avancer sur l'adoption formelle des sanctions, a-t-on appris en journée.
Le Parlement européen souhaite quant à lui qu'on aille plus loin dans l'isolement du régime de Vladimir Poutine. Il appelle à un embargo sur le gaz, le pétrole et l'uranium russes, mais aussi à l'exclusion de toutes les banques russes du système de messagerie interbancaire Swift. Il propose aussi de revoir à la hausse les sanctions envers le Bélarus, soutien de Moscou, pour qu'elles correspondent aux sanctions visant le Kremlin.
Une question qui divise
La question d'un possible embargo sur toutes les sources d'énergie fossile, en particulier sur le gaz, fait débat entre pays européens. Certains pays de l'est, Pologne en tête, poussent pour s'affranchir très rapidement des approvisionnements russes. L'Allemagne a déjà exprimé ses réserves, estimant peu réaliste de se passer du gaz russe à court terme. Plusieurs pays le rappellent: les sanctions n'ont de sens que si elles touchent davantage la Russie que l'UE. Le ministre belge des Finances Vincent Van Peteghem n'avait pas dit autre chose en début de semaine, en arrivant à une réunion de l'Eurogroupe. Sans évoquer la question du gaz, il avait affirmé que la Belgique ne s'opposerait pas à un embargo sur le pétrole. "Notre priorité doit être de priver le régime de Poutine des ressources dont il a besoin pour financer sa méprisable machine de guerre et cela ne sera possible qu'avec un embargo énergétique total", maintient jeudi Luis Garicano, eurodéputé espagnol du groupe Renew (libéraux, macronistes) qui a travaillé sur l'amendement visant les sources d'énergie. "Au lieu de soutenir le régime de Poutine, nous devons le démolir. Il est inacceptable qu'au lieu de payer un petit prix pour la liberté, nous payions pour les balles utilisées à Boutcha. Si l'Europe n'en fait pas assez, l'histoire ne nous verra pas comme un spectateur; l'histoire saura que nous étions complices". Un message soutenu par Hilde Vautmans (Open Vld), du même groupe politique au Parlement européen. Celle-ci rappelle les paroles de Josep Borrell face aux eurodéputés: les États membres UE auraient, depuis le 24 février dernier, déjà financé la Russie à hauteur de 35 milliards d'euros via des paiements pour des combustibles fossiles.
Selon l'élu CD&V Tom Vandenkendelaere, "de nombreux tabous sont déjà tombés en un temps record ces dernières semaines". "Le prochain, ce sera l'embargo sur le gaz", affirme-t-il. La résolution propose aussi d'accompagner un embargo total d'un plan visant à "garantir la sécurité de l'approvisionnement énergétique de l'UE", ainsi que d'une stratégie pour ''revenir sur ces sanctions au cas où la Russie prendrait des mesures" pour rétablir l'indépendance et l'intégrité territoriale de l'Ukraine. Fustigeant ce qui constitue ''indéniablement des crimes de guerre'' de la part des troupes russes, notamment à Boutcha, le Parlement se prononce en faveur de nouvelles livraisons d'armes à l'Ukraine.
Parmi les élus belges, seul l'éurodéputé PTB Marc Botenga s'est abstenu lors du vote final sur la résolution. Les élus Vlaams Belang et le socialiste Marc Tarabella, en plus de Marc Botenga, se sont quant à eux exprimés contre l'amendement visant l'embargo énergétique complet, tandis que Geert Bourgeois et Assita Kanko (N-VA) s'abstenaient à ce sujet.