Jubilé d’Elizabeth II: quel avenir pour la monarchie britannique?

Avec le jubilé de platine, le Royaume-Uni célèbre les 70 ans de règne d’Elizabeth II. Malgré les scandales, il semble peu probable que l’institution monarchie ne survive pas à la reine.

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La reine Elizabeth II, entourée notamment du Prince Charles, de Kate et William, au Palais de Buckingham, le 2 juin @BELGAIMAGE

Elle a rencontré treize présidents américains. Du 2 au 5 juin, le Royaume-Uni célèbre l’exceptionnelle longévité de sa reine. Quatre jours de fête en forme de parenthèse, où la grande majorité de ses sujets n’auront pas à cœur d’évoquer l’après Elizabeth II.

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La question de sa succession va pourtant se poser avec de plus en plus d’acuité, à mesure que la santé de la souveraine de 96 ans se dégrade. Le 10 mai 2022, le prince Charles prononçait pour la première fois de sa vie le Queen’s Speech, un texte fixant les priorités du gouvernement pour l’année parlementaire à suivre. Un événement politique important de l’autre côté du Channel, qui symbolise le rôle constitutionnel de la reine en tant que cheffe de de l’État. Celle-ci n’était pas présente pour lire le discours, en raison de «problèmes de mobilités».

En 70 ans de règne, c’est seulement la troisième fois qu'Elizabeth II ne participait à l’événement. De quoi voir dans cette lecture du Queen’s Speech un passage de témoin avec Charles, premier dans l’ordre de succession. Depuis plusieurs années, le Duc de Cornouailles représente  sa mère à l’étranger.

Autre signe de sa santé déclinante : présente ce 2 juin au balcon de Buckingham Palace pour le premier jour de son jubilé de platine, la reine annonçait ne pas être de la fête vendredi. Elle a décidé, «à contrecœur», de ne pas assister au service d’action de grâce célébré vendredi à la cathédrale Saint-Paul, à Londres, après avoir ressenti «un certain inconfort», précisait jeudi soir le palais de Buckingham.

Scandales à la cour d'Angleterre

Comme le soulignait Marc Roche, journaliste belge installé à Londres depuis 1985, la mort d’Elizabeth II marquera inévitablement «la fin d’une époque», la quasi-totalité des Britanniques n'ayant connu qu'elle sur le trône. Pour eux, la monarchie, c'est elle. Pour autant, la disparition de la reine pourrait-elle signer la fin de la monarchie britannique ? Non, si l’on en croit un récent sondage, qui montrait que 58% des Britanniques soutiennent la monarchie ; seulement 25% seraient favorables à une république après Elizabeth II. La question est beaucoup moins tranchée si on zoome sur certains sous-groupes clés, comme les jeunes (où 40 % sont pour le maintien de la monarchie contre 37 % pour une république), les minorités ethniques (37 % – 33 %) et les Écossais (45 % – 36 %).

Un désamour qui pourrait s’expliquer notamment par les différents scandales qui ont égratigné le prestige de la maison Windsor ces dernières années. «L'éloignement du prince Harry et de son épouse Meghan, les accusations de racisme au sein de la monarchie, le prince Andrew accusé d'agressions sexuelles... Tout cela ne rejoint pas les valeurs de la génération MeToo et Black Lives Matter», listait pour Franceinfo Isabelle Baudino, maîtresse de conférences en civilisation britannique à l'Ecole normale supérieure de Lyon.

De leur côté, les Ecossais ont montré leur apparent détachement vis-à-vis de la monarchie, en votant aux élections législatives de 2021 pour les indépendantistes, qui ont promis d’organiser un référendum d’auto-détermination.

Crime de lèse-majesté à la Barbade

La question du soutien envers la Couronne se pose encore plus dans certains pays du Commonwealth (l'organisation intergouvernementale composée de 54 Etats, presque tous anciens territoires de l'Empire britannique). En novembre 2021, la Barbade se proclamait république, et ne reconnaissait plus la reine Elizabeth II comme cheffe d'Etat. Un crime de lèse-majesté que la Jamaïque pourrait imiter, le Premier ministre jamaïcain Andrew Holness ayant déclaré que la transition de son pays vers une république était «inévitable» et n'était qu'une «question de temps».

Reste que le passage d'une monarchie vers une république est loin d’être évident. Pour reprendre l’exemple de la Jamaïque, un tel changement nécessite d'atteindre une majorité favorable des deux tiers à la Chambre des représentants et au Sénat, et l’organisation d’un référendum. Même chose pour la Grande-Bretagne, où aucun parti n’est favorable au référendum et à la modification de la Constitution que cela impliquerait.

De plus, la Couronne britannique reste donc une institution solide. «L’audience des républicains est extrêmement faible», appuyait pour Ouest-France Philippe Chassaigne, professeur d’histoire contemporaine et spécialiste de la Grande-Bretagne. «Une solidité qui remonte au règne de George VI, qui, par son attitude pendant la Seconde guerre mondiale, a su tisser un lien entre la couronne et les Britanniques».

La relève? Kate

Appelé à succéder à Elizabeth II, le prince Charles ne peut se prévaloir du même capital sympathie dont jouit sa mère. Selon les sondages, sa cote de popularité n’est que de 50%, alors que celle de la reine est à 90%. Aujourd’hui âgé de 73 ans, il devra, selon toute vraisemblance, se contenter d’un règne de transition. 42 % des Britanniques préféreraient même que le prince Charles, laisse sa place à son fils aîné, le prince William, deuxième dans l’ordre de succession.

Pour bon nombre de commentateurs, c’est William et Kate, la duchesse de Cambridge, qui incarnent véritablement la relève d’Elizabeth. «Ensemble, ils possèdent ce parfait alliage de convivialité et de détermination de fer qui signifie que la monarchie, en tant qu'institution du XXIe siècle, sera sauve entre leurs mains», assurait dans la Libre le spécialiste britannique Robert Jobson.

 

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