
Le Danemark rejoint l'Europe de la défense, mais qu'est-ce que cela signifie ?

Trente ans après avoir refusé de participer à la politique de défense menée par l'Union européenne, le Danemark fait volte face.
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Ce jeudi, les Danois ont voté à 67% pour que leur pays soit partie prenante aux décisions européennes prises en la matière. "Ce soir, le Danemark a envoyé un signal important. A nos alliés en Europe et l'Otan, et au Président Vladimir Poutine. Nous montrons que, quand Poutine envahit un pays libre et menace la stabilité en Europe, nous autres nous nous rassemblons", a déclaré la Première ministre Mette Frederiksen.
La politique de sécurité et de défense commune (PSDC) est officiellement consacrée en 1992 à travers le traité de Maastricht. Mais depuis lors, l'Europe de la Défense traîne les pieds. Avec une nécessité d'obtenir l'unanimité pour engager une mission menée sous la houlette de l'UE, elle ne s'engage qu'au travers de projets relégués au domaine du symbole.
Si la mission du PSDC est d'œuvrer pour la sauvegarde des valeurs européennes, de ses intérêts, de sa sécurité, de son indépendance, de son intégrité, de préserver la paix, de préserver et améliorer la qualité de l'environnement..., les actions de terrain se concrétisent pour l'essentiel par l'envoi sur le terrain d'experts ayant pour objectif de soutenir ou former les équipes locales.
À l'heure actuelle, 4.000 Européens sont ainsi engagés dans des missions soutenues par l'UE.
Un premier budget commun
Mais aujourd'hui, l'Europe de la Défense veut passer la seconde vitesse. En 2021, un premier budget européen de la défense de 7,9 milliards d'euros a été créé. Ce montant doit être le premier pas vers une coordination plus intégrée des investissements européens en matière de défense.
Le budget des 27 alloué à la défense (232 milliards de dollars) est le troisième mondial, loin derrière les USA (778 milliards de dollars), mais juste derrière la Chine (252 milliards de dollars). En créant un fonds européen, l'objectif est d'optimaliser les ressources. Un récent rapport publié par la Commission européenne constate : "Le manque de coopération entre Etats membres a coûté des dizaines de milliards chaque année. Malgré l'augmentation des dépenses européennes de défense en 2020, un nouveau point bas a été atteint avec seulement 11 % des investissements dépensés en collaboration, ce qui est bien en deçà du seuil de 35 % convenu par les Etats membres. Ce n'est qu'en travaillant ensemble que les Etats membres peuvent maximiser les économies d'échelle et faire face aux coûts importants des équipements haut de gamme tout en évitant de se faire concurrence et de créer des doublons inutiles."
Une feuille de route a été tracée en mars de cette année pour parvenir à créer une cohésion pour répondre de manière efficiente en cas de crise et pour défendre la sécurité du territoire et des citoyens européens.
L'une des mesures les plus concrètes de cette Boussole stratégique est l'engagement des États membres à développer une capacité de déploiement rapide de 5.000 hommes pour répondre à différents types de crises. La force de renseignement va elle aussi être drastiquement renforcée.
Un doublon par rapport à l'OTAN ?
De nombreux opposants à cette Europe de la Défense assurent que cette nouvelle organisation ne sera qu'un doublon de l'OTAN. Les pros Europe de la Défense rétorquent qu'organiser une puissance militaire européennes coordonnées permet de gagner en efficacité et en autonomie. L'intervention militaire de l'OTAN nécessite un vote à la majorité au sein du conseil de sécurité dans lequel cinq États disposent d'un droit de véto (France, Chine, Royaume-Uni, Russie et États-Unis).
Mais pour l'heure, le mode de décision n'est guère plus aisé au sein de l'UE puisque c'est l'unanimité qui est nécessaire entre les chefs d'État constituant le Conseil européen. Ce n'est donc plus cinq pays qui disposent d'un droit de véto, mais bien 27 ! Ce mécanisme instauré pour garantir l'égalité de chaque État, quel que soit sa taille ou son poids économique, est aujourd'hui remis en cause à la fois par Emmanuel Macron Président du Conseil de l'Union européenne et par Ursula Von der Leyen, présidente de la Commission européenne.
La fin de cette unanimité doit permettre de gagner en efficacité. Mais pour mettre fin à cette unanimité, il faut l'unanimité. Et treize États ont déjà déclaré être réticents à cette idée.
Pourtant, le temps presse. Dans son rapport, la Commission européenne constate clairement la vulnérabilité de l'UE due à un désinvestissement massif des États membres dans le secteur de la Défense comparé aux autres grandes puissances. Si les dépenses militaires européennes ont augmenté de 20% en Europe, celles des USA se sont accrues de 65%, celles de la Russie de 300% et celles de la Chine de 600%.