Voici comment la société française TotalEnergies ravitaille les bombardiers russes

Alors que la guerre fait toujours rage en Ukraine, Le Monde révèle les liens entre les bombardements de l'aviation russe et l'entreprise TotalEnergies.

Avion russe
©Belgaimage

C'est une enquête retentissante que publie Le Monde dans ses pages ce jeudi matin. La société française TotalEnergies, dernier acteur énergétique occidental à être actif sur le territoire russe, tiendrait un rôle majeur dans l'approvisionnement des bombardiers russes.

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TotalEnergies exploite un gisement de Gaz en Sibérie qu'elle détient à 49 % à travers le consortium Terneftegaz. Les 51 autres pour cent sont la propriété de la société Novatek, numéro deux dans le domaine de l'énergie en Russie. Le condensat de gaz extrait est envoyé dans une usine de transformation propriété de Novatek, entreprise dans laquelle TotalEnergies détient 19,4 %.

Des justifications bancales

Jusqu'à présent, l'entreprise française justifiait sa présence en assurant que son activité permettait l'approvisionnement de l'Europe en gaz. Aujourd'hui, cette version s'effiloche. Le Monde a retracé le parcours de la matière extraite depuis le Nord de la Russie. La matière première serait ensuite envoyée à Omsk, à la frontière kazakh, pour être raffinée et transformée en carburant. Le combustible prendrait ensuite la direction des bases aériennes de Malshevo et de Morozovskaïa à la frontière russo-ukrainienne. C'est là que reposent deux escadrons qui ont, selon Amnesty International et Human Rights Watch, participé activement aux bombardements du théâtre de Marioupol. Près de 600 personnes avaient péri sous le feu russe lors de cette attaque.

Les premières livraisons à destination de ces deux bases russes ont débuté quitté dès février 2022. Les dernières datent du 27 juillet alors que les données pour le mois d'août ne sont pas encore disponibles.

TotalEnergies se dédouane. Elle assure qu'elle « n'est pas opérateur des installations de Terneftegaz qui sont opérées par du personnel de Novatek » et qu'elle « ne participe pas aux décisions de valorisation des condensats par Novatek », relève le quotidien français.

Des profits plantureux 

Cette explication offerte par TotalEnergies pose une autre question : pourquoi ne s'est-elle pas retirée de Terneftegaz ?

Des opérateurs tels que Shell, BP, Exxon, Equinor ou ENI ont rapidement abandonné leurs actifs russes dès le déclenchement de la guerre, engendrant des pertes colossales. Dans le même temps, TotalEnergies confirmait ses activités sur les terres de Vladimir Poutine. Entre avril et juin 2022, alors que les bombardements font rages en Ukraine, l'entreprise française a même annoncé un bénéfice record de 5,7 milliards de dollars. Plus de deux fois ce qu'elle avait pu engranger l'année précédente.

« Nous avertissons les entreprises depuis des mois qu'en achetant le pétrole de sang de Poutine, elles financent le meurtre de civils ukrainiens. Mais TotalEnergies a franchi un pas supplémentaire en alimentant des crimes de guerre », commente dans les colonnes du Monde le conseiller de Volodymyr Zelensky, Oleg Utsenko.

Mais selon Marco Sassoli, professeur de droit international à l'Université de Genève et spécialiste du droit de la guerre, la responsabilité de l'entreprise française sera difficile à établir : « Il n'y a ni crime de guerre ni complicité de crime de guerre par négligence. Le complice doit avoir l'intention et la connaissance que des civils seront tués. Savoir que l'aviation tu des civils ne suffit pas, car sinon toutes les livraisons d'armes à tous les belligérants seraient interdites. »

Si l'activité de TotalEnergies ne devait pas être jugée devant les tribunaux, son image devrait quant à elle être écornée.

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