
Marlene Engelhorn, l’héritière multimillionnaire qui voulait donner toute sa fortune aux impôts

Comme un clin d’œil du destin : quelques jours après la parution du livre de Marlene Engelhorn, Geld (Argent, non traduit en français), sa grand-mère, Traudl Engelhorn-Vechiatto, décédait le 22 septembre, à l’âge de 95 ans. Ce qui faisait de Marlene, 30 ans, une multimillionnaire. Au moment de sa mort, la fortune de Traudl, devenue riche en épousant un des arrière-petits-fils de Friedrich Engelhorn (le fondateur des entreprises chimiques et pharmaceutiques allemandes BASF) était estimée par le magazine Forbes à 4,2 milliards de dollars.
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Tout n’ira pas à Marlene, loin de là. «Je ne sais toujours pas de combien exactement, on n’a pas encore lu le testament, mais probablement des dizaines de millions d’euros», expliquait au Monde cette Austro-Allemande, par ailleurs étudiante en littérature. Un héritage que Marlene juge «injuste», vu qu’elle n’a «jamais travaillé pour cela».
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— Marlene Engelhorn (@MarleneEnglhorn) November 3, 2022
Un prélèvement d'au moins 90%
Du coup, lorsqu’elle découvre début 2021 qu’elle va hériter d’une petite (mais néanmoins substantielle) part de la fortune de sa grand-mère, elle demande publiquement que l’Etat lui en prélève «au moins 90%».
Depuis 2008, l'Autriche ne prélève plus d'impôts sur la succession. L'héritière a un moment songé à la philanthropie, mais a fini par abandonner l’idée, considérant plutôt que ce n’est pas elle de choisir à quoi sera utilisé cet argent. «Je ne comprends pas pourquoi les riches pâlissent lorsqu’ils paient des impôts. C’est la chose la plus démocratique qui soit et on peut en être fier. Cela finance tout ce qui garantit la structure de la société», a-t-elle coutume de dire dans les médias. Plaidant pour une fiscalité beaucoup plus redistributive, Marlene Engelhorn a fondé a fondé le mouvement "Taxmenow" pour une taxation accrue des riches, et a rejoint le réseau "Millionaires for Humanity" regroupant de jeunes héritiers qui veulent un monde avec une répartition équitable de la richesse et du pouvoir.
Dans son livre Geld, elle cite notamment l’économiste français Thomas Piketty, qui dans ses travaux, rappelle souvent qu’entre 1932 et 1980, le taux marginal d'imposition applicable aux plus hauts revenus a été supérieur à 80 % aux Etats-Unis (un pays qu’on pourrait pourtant difficilement taxer de communiste).
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Issue de la grande bourgeoisie, Marlene confie qu'elle a eu une prise de conscience des inégalités sociales à «l'Université publique», au contact de «gens normaux» après avoir grandi dans «la société parallèle des riches». Elle dit rêver que ce soit l’Etat qui décide démocratiquement de la répartition de sa fortune, tout en jugeant hautement improbable que cela se produise rapidement. Quant à son avenir ? «J’irai travailler(…) Si j’avais le choix, le vrai choix, je serais d’ailleurs déjà dans une maison d’édition comme relectrice», concluait-elle dans Le Monde.