Comment l’interdiction de l'IVG coûte cher à la société

L’avortement clandestin représente un coût important pour les Etats qui interdisent l’IVG.

L'interdiction de l'avortement coûte cher à la société
« Le fait de limiter l’accès à l’avortement ne réduit pas le nombre d’avortements pratiqués » © Pexels

Aux Etats-Unis, le droit à l’avortement a été révoqué par la très controversée Cour suprême qui a enterré le 24 juin l’arrêt « Roe v. Wade ». En Pologne, l’avortement est devenu pratiquement illégal en 2020 alors qu’à Malte, l’IVG est strictement interdite. En Hongrie, le droit à l’avortement est en danger et l’accès à l’IVG est de plus en plus limité. On est encore bien loin du slogan porté par les féministes des années 1970 : « Un enfant si je veux, quand je veux ».

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Partout dans le monde, les mouvements pro-vie prennent de plus en plus de place dans l’espace public. Pourtant, interdire l’IVG coûterait très cher à nos sociétés sur le plan « humain, social et financier », indique le magazine Slate.

Un danger pour la vie des femmes

Depuis toujours, les femmes ont recours à l’interruption volontaire de grossesse. Et ce, quel que soit le statut juridique de l’IVG. D’après les chiffres que s’est procuré le magazine Slate, le nombre d’avortements est similaire dans les pays qui l’autorisent (34 pour 100) et dans ceux qui l’interdisent (37 pour 100). « Le fait de limiter l’accès à l’avortement ne réduit pas le nombre d’avortements pratiqués », précisait l’OMS dans un communiqué de 2017.

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Chaque année, 25 millions d’avortements seraient réalisés dans des conditions dangereuses pour les femmes, principalement en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud. Et cela se traduit par des chiffres déconcertants. En effet, toutes les neuf minutes, une femme meurt d’un avortement clandestin dans le monde : « Cela nous rappelle que pour les femmes qui avortent, enfanter n'est pas une option. Elles préfèrent prendre le risque de mourir plutôt que de poursuivre leur grossesse, car être mère à ce moment de leur vie ne leur paraît tout simplement pas vivable », explique la gynécologue Ghada Gatem au magazine.

En France, si l’avortement a pu être dépénalisé par la loi Veil, c’est principalement parce que de nombreuses femmes perdaient la vie en ayant recours à ces avortements clandestins.

Un coût pour les femmes

Au Maroc, où l’avortement est illégal et donc puni par la loi, 500 à 800 interruptions de grossesse sont pratiquées illégalement tous les jours, estime l’Association marocaine contre l’avortement clandestin (Amlac). Et la plupart se pratiqueraient dans des cliniques et cabinets de gynécologie à des coûts exorbitants pour les Marocaines, environ 4.000 dirhams (368 euros) : « J’ai été choquée par le prix, hors consultations. Je gagnais 7 000 dirhams par mois [644 euros]. Heureusement, le père m’a aidée », raconte une jeune femme au journal Le Monde.

Un business très lucratif pour les médecins qui acceptent d’interrompre une grossesse malgré l’interdiction : « On peut parler de business lucratif, car tout ce qui est clandestin est forcément lucratif. Les médecins préfèrent l’aspiration [à la voie médicamenteuse : NDLR] qui rapporte plus d’argent et qui leur assure d’avoir retiré l’embryon », explique l’Amlac.

Un coût pour l’Etat et l'économie

En Belgique, une IVG coûte environ 450 euros mais est prise en charge par l’INAMI pour toute personne qui est en ordre de mutuelle. Dans un planning familial, une interruption volontaire de grossesse coûte deux fois 1,80 euros.

Mais le coût pour l'Etat est plus important dans les pays en voie de développement où des millions de femmes (6,9 millions en 2018) doivent être traitées pour des complications liées à un avortement clandestin. « Les complications dues à des avortements non sécurisés coûtent aux systèmes de santé des pays en développement 553 millions de dollars par an pour les traitements après un avortement », indique l’OMS.

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De plus, les femmes qui avortent clandestinement peuvent par la suite subir des handicaps de longue durée qui entraînerait une perte de 922 millions de dollars pour les ménages concernés à travers le monde, estime l’OMS.

Selon une étude de l’Institute for Women’s Policy Research, les lois anti-avortement représentent un coût important pour l’économie des Etats américains qui restreignent le plus l’IVG. Il y aurait plus de 500.000 femmes supplémentaires âgées entre 15 et 44 ans sur le marché du travail dans les Etats où l’accès à l’avortement est facilité, ce qui équivaudrait à une somme des salaires de 3 milliards de dollars. Au total, cela ferait perdre à l’Etat américain une création de richesse équivalente à 105 milliards de dollars chaque année.

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