Benoît XVI, l'homme qui alimenta la saga des «deux papes»

Le pape émérite Benoît XVI, décédé samedi à 95 ans, avait promis d'être discret. Il n'est cependant pas toujours parvenu à rester dans l'ombre de son successeur argentin François.

le pape François et pape émérite Benoît XVI au Vatican, en 2016
le pape François et pape émérite Benoît XVI au Vatican, en 2016 @BELGAIMAGE

Le 11 février 2013, au bout de ses forces physiques à 85 ans, l'intellectuel allemand Joseph Ratzinger avait annoncé - en latin - à des cardinaux sidérés qu'il renonçait à être pape, situation inédite depuis le Moyen Âge. L'insolite cohabitation entre le 265ème et le 266ème pape, dans le plus petit État du monde, s'est déroulée sans couacs durant environ cinq ans.

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Sauf que le pape émérite Benoît XVI, théologien érudit, a continué à faire ce qu'il préférait: écrire sur les grandes thématiques de l'Église, publiant des analyses qui ont provoqué plusieurs polémiques. À la mi-janvier 2020, un livre fustigeant les changements audacieux proposés par une assemblée régionale d'évêques (synode) de neuf pays amazoniens et défendant mordicus le célibat des prêtres, co-signé par Benoît XVI et le cardinal guinéen ultra-traditionaliste Robert Sarah, avait donné l'impression d'une tentative de pression sur François, juste avant une décision phare de son pontificat.

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«Un seul pape»

Le pape François avait fermé en effet fermé la porte, en février, aux prêtres mariés et aux femmes diacres en Amazonie, malgré la criante pénurie de prêtres dans cette région. Le secrétaire particulier du pape émérite, l'archevêque allemand Georg Gänswein, avait finalement expliqué que Benoît XVI avait «envoyé un de ses articles» au cardinal africain «en lui permettant de l'utiliser comme bon lui semblait», sans jamais approuver un projet de livre à quatre mains. Mgr Gänswein, visiblement écarté suite à ce couac de l'entourage de François (dont il organisait les audiences), avait été invité à mieux s'occuper du pape retraité.

Autre exemple, en avril 2019, Benoît XVI avait déjà pris le contre-pied de François sur la question des scandales des violences sexuelles du clergé, dans un long texte où il expliquait le phénomène par la révolution sexuelle des années 1960.

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«Membre contemplatif»

«Ça suffit de parler de deux souverains pontifes, parce qu'il n'y a qu'un seul pape: celui qui est investi de l'autorité papale, c'est-à-dire François», avait dû stipuler le cardinal Pietro Parolin, numéro deux du Vatican, las des divisions au sein de l'Église catholique. En 2016, le conservateur Mgr Gänswein avait notamment estimé qu'il n'y avait «pas deux papes, mais de facto un ministère élargi, avec un membre actif et un membre contemplatif».

De tels propos ambigus étaient du pain bénit pour une frange traditionaliste virulente, qui juge François «illégitime» et interprète tous les écrits du théologien allemand comme des critiques contre son successeur. En 2016, François avait pourtant mis les points sur les «i». «C'est un pape émérite et non pas le second pape», avait-il souligné, comparant son aîné de dix ans à «un grand-père à la maison».

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Après huit ans de pontificat, de 2005 à 2013, Benoît XVI avait décidé de renoncer à la charge pour des raisons de santé. Ses fonctions vitales, y compris le coeur, avaient commencé à lâcher depuis quelques jours. Il est décédé samedi à 09h34 au monastère des jardins du Vatican, où il s'était retiré.

 

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