Guerre en Ukraine : les images désolantes de l'explosion du barrage de Kakhovka (vidéo)

L'Ukraine dénonce "un crime de guerre" et organise l'évacuation des habitants de Kherson. La Russie nie être responsable et accuse Kiev.

Le barrage de Kakhovka vu du ciel, le 28 mai 2022 ©BelgaImage

Le barrage de la centrale hydroélectrique de Kakhovka, dans le sud de l'Ukraine et actuellement occupé par les forces russes, a été endommagé dans la nuit de lundi à mardi, a indiqué l'agence de presse étatique russe Tass. De son côté, Kiev a rapporté l'effondrement du barrage et le président ukrainien Volodymyr Zelensky va convoquer d'urgence son Conseil de sécurité mardi

L'évacuation des villes en aval, dont Kherson, a commencé

Le barrage de Kakhovka, pris dès le début de l'offensive russe en Ukraine, permet notamment d'alimenter en eau la péninsule de Crimée, annexée en 2014 par Moscou. Aménagé sur le fleuve Dniepr en 1956, pendant la période soviétique, l'ouvrage est construit en partie en béton et en terre et mesure environ 30 mètres de haut et 3,2 kilomètres de long. Il s'agit de l'une des plus grandes infrastructures de ce type en Ukraine.

Si le barrage ne joue plus son rôle, "plus de 80 localités, dont Kherson, se retrouveront dans la zone d'inondation rapide", s'était alarmé en octobre dernier M. Zelensky devant le Conseil de l'Union européenne. "Cela pourrait empêcher l'approvisionnement en eau d'une grande partie du sud de l'Ukraine" et affecter le refroidissement des réacteurs de la centrale nucléaire de Zaporijjia, qui puise son eau dans un lac artificiel de 18 millions de mètres cubes alimenté par le barrage, avait-il mis en garde. De son côté, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a indiqué mardi sur Twitter suivre de près la situation, assurant que la sécurité nucléaire n'était "pas immédiatement menacée".

On ne sait pas ce qui a provoqué l'effondrement du barrage ni qui en est responsable. Kiev et Moscou se rejettent mutuellement la responsabilité. Les autorités locales installées par Moscou ont, de leur côté, mis en cause de "multiples frappes" ukrainiennes. Le maire russe de la ville de Nova Kakhovka, Vladimir Leontiev, avait d'abord démenti la destruction du barrage avant d'affirmer que des frappes avaient détruit les robinet-vannes du barrage et provoqué une "jetée d'eau incontrôlable". Côté ukrainien, cet incident "confirme encore aux yeux du monde qu'ils (les Russes, NDLR) doivent être expulsés de chaque recoin du territoire ukrainien. Pas un mètre ne devrait rester entre leurs mains, car ils utilisent chaque mètre pour faire régner la terreur", a réagi mardi matin sur Twitter le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Selon des données préliminaires, 11 des 28 digues du barrage ont été brisées et un effondrement en cascade est en cours, a déclaré un responsable des secours, cité par l'agence de presse russe Tass. Le gouverneur de la région de Kherson, Oleksandr Prokudin, a précisé mardi que l'eau pourrait atteindre un niveau critique dans les cinq heures. "L'ampleur de la destruction, la vitesse et la quantité d'eau qui s'écoule, ainsi que les zones menacées d'inondations sont analysés", a-t-il souligné. La ville de Kherson, libérée en novembre après huit mois d'occupation russe, pourrait être touchée si les inondations se confirment.

À l'est de l'Ukraine, bisbille entre Wagner et le ministre russe de la Défense

Ces opérations ont lieu à un moment où les autorités ukrainiennes disent préparer depuis des mois une vaste contre-offensive destinée à obliger les troupes russes à se retirer des zones qu'elles occupent. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a remercié ses troupes pour les gains territoriaux qu'elles ont revendiqués du côté de Bakhmout, ironisant sur la réaction "hystérique" de Moscou. "Nous voyons à quel point la Russie réagit de manière hystérique à toutes les avancées que nous faisons dans ce secteur, à toutes les positions que nous prenons. L'ennemi sait que l'Ukraine va gagner", a déclaré M. Zelensky dans un message vidéo.

Le conseiller de la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak avait auparavant ironisé sur Twitter sur le fait que la Russie est "occupée à repousser une offensive globale qui n'existe pas encore". "Pourquoi les Russes publient-ils activement des informations à propos d'une contre-offensive? Parce qu'ils ont besoin de détourner l'attention (au sujet de) la défaite dans la direction de Bakhmout", a lancé la vice-ministre ukrainienne de la Défense, Ganna Maliar, sur Telegram.

Le ministère russe de la Défense a quant à lui affirmé avoir contré depuis la matinée du 4 juin des attaques sur cinq secteurs du front "dans la direction sud de la région de Donetsk", située dans l'est. Le ministère russe de la Défense a dit que ses forces avaient tué "plus de 1.500 militaires ukrainiens" et détruit "28 chars". Une affirmation tournée en dérision par le chef du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, coutumier des critiques virulentes envers l'état-major. "Il ne s'agit que d'élucubrations", a commenté M. Prigojine dans un message sur Telegram. Tuer 1.500 soldats en une journée est "un sacré massacre", a-t-il ironisé en se moquant du porte-parole du ministère russe de la Défense Igor Konachenkov. "En fait, pourquoi ne pas additionner tous les chiffres donnés par Konachenkov. Je pense que nous avons déjà détruit l'ensemble de la planète Terre à cinq reprises", a-t-il raillé.

Dans la nuit de lundi à mardi, une nouvelle attaque aérienne a visé Kiev, "possiblement au moyen de missiles de croisière", a rapporté l'administration civile et militaire de la capitale ukrainienne. "Selon de premières informations, plus de 20 cibles aériennes ennemies ont été détectées et détruites" par la défense aérienne ukrainienne. Aucune victime n'a été recensée mais une chute de débris dans le district de Desnyansky, a endommagé la chaussée, des lignes électriques de trolleybus et des vitrines de magasins, a indiqué l'administration locale.

Bakhmout "épicentre"

Selon Kiev, le secteur de Bakhmout, qui est le théâtre de la bataille la plus longue et la plus meurtrière du conflit et dont Moscou a revendiqué la prise en mai, reste "l'épicentre des hostilités". Mme Maliar affirme que les forces ukrainiennes avancent en périphérie de cette cité "sur un front assez large": "Nous remportons des succès et occupons les hauteurs dominantes". Selon elle, les troupes ukrainiennes ont avancé de plusieurs centaines de mètres sur ce secteur du front. Cette progression ukrainienne a été confirmée par M. Prigojine, selon lequel "une partie de la localité de Berkhivka est déjà perdue", une "honte".

En Russie, depuis deux semaines, les incursions et les bombardements se multiplient dans la région de Belgorod, frontalière de l'Ukraine, revendiqués par des combattants se présentant comme étant des Russes qui luttent aux côtés des Ukrainiens. Les frappes y ont fait plusieurs morts et des dizaines de blessés parmi les civils. Dans la dernière opération en date, dimanche, l'un de ces groupes baptisé "Légion Liberté de la Russie" a fait des prisonniers qui doivent être remis à Kiev. Une douzaine de détenus, dont deux blessés, sont visibles dans une vidéo. C'est la première fois que des Russes sont capturés sur le territoire russe.

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