
L’Arabie saoudite accusée du massacre de «centaines» de migrants éthiopiens à sa frontière

Tandis qu’il couvre d’or et accueille à bras ouverts les Neymar, Ronaldo et autres Benzema, le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, n’hésiterait pas à laisser ses gardes-frontières exécuter des enfants, des femmes et des hommes. Et ce, par centaines.
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C’est en tout cas l’accusation, lourde, portée par Human Rights Watch contre le royaume des Saoud et son homme fort. Dans un rapport publié lundi 21 août, l’ONG de défense des droits humains a en effet dénoncé le meurtre de «centaines» de migrants éthiopiens, depuis 2022, qui tentaient de pénétrer dans la riche monarchie du golfe Persique via sa frontière avec le Yémen.
Ce pays pauvre et en guerre depuis plus de huit ans voit régulièrement passer des candidats à l’exil en Arabie Saoudite, venus de la Corne de l’Afrique. Des centaines de milliers d’Ethiopiens, notamment, travaillent en Arabie saoudite.
«Les autorités saoudiennes tuent des centaines de migrants et de demandeurs d’asile dans cette zone frontalière reculée, à l’abri du regard du reste du monde», a déclaré dans un communiqué Nadia Hardman, spécialiste des migrations à HRW.
«Dépenser des milliards pour acheter des clubs de golf professionnels, des clubs de football et organiser de grands évènements de divertissement de renommée mondiale pour améliorer l'image de l'Arabie saoudite ne devrait pas détourner l'attention de ces crimes horribles».
Des tirs à bout portant?
Pour étayer ses allégations, HRW s’est appuyé sur des entretiens avec trente-huit migrants éthiopiens ayant tenté le passage par le Yémen. L’organisation a également compilé des images satellites, des vidéos et des photos recueillies auprès de sources ou repérées sur les réseaux sociaux.
Les témoins interrogés ont évoqué des «armes explosives» employées contre les migrants et des tirs à bout portant. «Ils nous tiraient dessus, c’était comme une pluie» de balles, a expliqué une jeune femme de 20 ans à l’ONG. «J’ai vu un homme appeler à l’aide, il avait perdu ses deux jambes. On n’a pas pu l’aider parce qu’on courait pour sauver nos propres vies».
Des actes de tortures auraient également été commis par les gardes-frontières saoudiens, qui auraient demandé aux migrants «sur quelle partie de leur corps ils préféreraient que l’on tire».
(Attentions, certaines images de la vidéo peuvent choquer)
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"Très difficile de confirmer la situation à la frontière"
La BBC est venue renforcer les accusations de HRW, en contactant des migrants séparément. Ceux-ci ont évoqué des traversées nocturnes au cours desquelles de grands groupes d'Éthiopiens, dont de nombreuses femmes et enfants, ont essuyé des tirs alors qu'ils tentaient de traverser la frontière.
«Les tirs n'ont pas cessé», a déclaré Mustafa Soufia Mohammed, 21 ans, au média britannique. «Je n'ai même pas remarqué qu'on m'avait tiré dessus», a-t-il expliqué, «mais lorsque j'ai essayé de me lever et de marcher, une partie de ma jambe m'a échappé».
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Contactés par l’AFP, les autorités saoudiennes n’ont pas répondu aux sollicitations sur cette affaire. Les Etats-Unis ont réclamé l’ouverture d’une enquête. «Nous avons fait part de nos inquiétudes concernant ces allégations au gouvernement saoudien», a précisé un porte-parole du département d’Etat. Nous appelons les autorités saoudiennes à conduire une enquête approfondie et transparente et à respecter leurs obligations en vertu du droit international».
De son côté l’ONU a commenté le rapport, expliquant qu’il portait «des accusations très graves. Je sais que notre bureau des droits de l’Homme est au courant de la situation et a eu des contacts mais il est très difficile pour eux de confirmer la situation à la frontière», a déclaré Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l’ONU, soulignant que d’une manière générale, «empêcher les migrations avec le canon d’un fusil est intolérable».