
Vacciner plus de monde mais avec une seule dose : une solution à envisager ?

Le monde entier n’a plus qu’un seul mot à la bouche : vaccin. Dimanche, l’Union Européenne lançait sa campagne de vaccination. Et ce lundi, la Belgique, comme bien d’autres voisins, commençait à injecter le fameux sérum de Pfizer et BioNTech à des résidents de plusieurs maisons de repos du pays.
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Pfizer avait initialement promis 600.000 doses pour notre pays d’ici le 31 janvier. Le vaccin nécessitant 2 injections, 300.000 Belges pourront être immunisés face au Covid-19. Mais l’entreprise pharmaceutique est ensuite revenue sur ses propos. Cet objectif ne serait atteint qu’en février.
Ce nombre limité de vaccins pousse en ce moment différents spécialistes dans le monde à faire campagne pour un choix radical : n’administrer qu’une seule dose à chacun et attendre plus longtemps que prévu pour la deuxième. L’objectif étant d’immuniser plus de personnes plus vite.
En Belgique, c’est notamment le cas de Philippe Beutels, professeur d'économie de la santé à l'Université d'Anvers et membre du GEMS, le groupe d’experts de stratégie de crise pour le Covid-19. Il base son opinion sur le fait que le vaccin développé par Moderna, qui n’est pas encore autorisé, a un fonctionnement similaire à celui de Pfizer.
« Il semble que sa protection contre le Covid-19 soit supérieure à 90 % avant même l'administration de la deuxième dose. Avec le vaccin Pfizer, nous pouvons obtenir une protection similaire après une seule dose », a-t-il déclaré au Standaard. « C’est un pourcentage très élevé. Le risque que nous prendrions en repoussant la deuxième dose de quelques mois est, selon moi, faible. »
Gare à la mutation
Cette nouvelle stratégie potentielle ne vient pas de nulle part. Elle est évidemment liée à l’émergence de cette nouvelle mutation du coronavirus, apparemment bien plus contagieuse, repérée pour la première fois au Royaume-Uni. « Maintenant que la variante anglaise du sars-CoV-2 […] menace également de se propager chez nous, la question devient encore plus urgente de protéger le plus grand groupe possible contre le covid-19 dès que possible. »
Herman Goossens, professeur de microbiologie médicale à l’UAntwerp, va dans ce sens également. La nécessité de vacciner au plus vite un plus grand nombre personnes est la solution qu’il avance dans une carte blanche, publiée dans la presse flamande. Dans celle-ci, il demande à la Belgique de ne pas prendre ce nouveau virus muté à la légère, comme c’est le cas actuellement selon lui, et de l’étudier en profondeur.
Des inconnues
Du côté de l’Agence européenne pour le médicament, on répond qu’il vaut mieux suivre le processus à la lettre. « Toutes les études ont montré que le vaccin Pfizer est surtout efficace 7 jours après la deuxième dose, donnée après 21 jours », a précisé Jean-Michel Dogné, expert auprès de des Agences fédérale et européenne pour le médicament, au micro de La Première. « C’est ainsi que le vaccin a reçu son autorisation de mise sur le marché. Il est donc certainement préférable de suivre la façon qui a été étudiée et qui est recommandée. »
Yves Van Laethem, quant à lui, a déclaré que plus d’informations sur l’administration d’une dose unique seraient nécessaires. « On ne connaît pas l’impact sur un nombre significatif de gens d’un schéma en une dose, entre autres chez les personnes âgées », a-t-il expliqué en conférence de presse.
Il a ajouté que ne pas suivre le processus initial pourrait poser des soucis légaux. « Le schéma approuvé l’a été par les autorités de régulation, comme l’Agence européenne du médicament et la Communauté européenne, en tant qu’administration de deux doses de vaccin. Transiger avec ces deux doses en n’en administrant qu’une seule pourrait poser au point de vue légal et juridique d’importantes questions, pour ne pas dire d’importants problèmes. »
Face à ce débat, le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke, a indiqué sur les ondes de la VRT qu’il avait « demandé à notre taskforce en charge de la stratégie de vaccination d’étudier cela d’un point de vue médical », mais aussi à l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) de vérifier si cette stratégie était bien légale et réglementaire, notamment vis-à-vis de l’Union Européenne.