
Bouli Lanners: «l’hôpital est sous pression, on ne s’en sortira pas comme ça»

Il y a un an, il critiquait déjà le gouvernement fédéral sur la gestion de la crise sanitaire, un mois après le début du confinement. Aujourd’hui, la colère de Bouli Lanners n’est toujours pas retombée. L’acteur a ainsi été très cash lors de son interview à la RTBF, lorsqu’il a été interrogé sur ce qu’il pensait des conséquences de la pandémie. D’après lui, «la Belgique ne fonctionne pas en cas de crise majeure» et en veut pour preuve les décisions prises depuis un an, que ce soit vis-à-vis des hôpitaux, des mesures sanitaires, etc. Mais ce qu’il appelle surtout de ses vœux, c’est un changement total de modèle de société.
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L’urgence dans les hôpitaux
Bouli Lanners incarne dans la deuxième saison de la série médicale «Hippocrate» un chef du service des urgences. C’est donc logiquement à propos des hôpitaux qu’il a surtout été interrogé. «La réalité a rattrapé la fiction», constate-t-il avant de déplorer la situation difficile des soignants. «Non seulement on ne les applaudit plus mais en plus, on leur fait la gueule sur les réseaux sociaux. Je pense qu’on ne se rend pas compte de la pression qu’ils subissent, et ça, c’est dû au fait que l’on manque de personnel soignant…».
Bien sûr, il se rend compte que tout cela coûte cher et que c’est une problématique compliquée. Mais il rappelle que les hôpitaux arrivent à un point de rupture. Alors qu’ils sont trop peu financés, la prise en charge des patients pèse de plus en plus sur les budgets (technologie et pharmacopée plus chère, plus de personnes âgées à prendre en charge, etc.). «On vit une crise sanitaire, mais aussi une crise hospitalière: il faut revaloriser le secteur. […] Si après cette crise les soins de santé ne redeviennent pas une priorité, je ne sais pas ce qu’il faut!».
«La Belgique ne fonctionne pas en cas de crise majeure»
Mais au fond, ce qui intéresse Bouli Lanners, c’est l’enjeu politique derrière cette problématique. C’est d’ailleurs cela qui lui a donné envie de participer à la série «Hippocrate». Or l’acteur reproche toujours au fédéral belge ses contradictions au début de la crise, sur les masques notamment. Pour lui, il y a une «incompétence au départ et un manque de prévoyance presque criminel».
Il considère que cette épreuve du Covid-19 est la preuve que «la Belgique ne fonctionne pas en cas de crise majeure». «Les décisions ne sont pas les mêmes, entre les régions […]. Les institutions fonctionnent tant qu’on est dans les affaires courantes, mais quand il y a une crise majeure qui arrive, comme celle-ci, ça ne fonctionne plus du tout! Imaginons un incident nucléaire où on a deux heures et demie pour réagir, je ne sais pas ce qui se passera!», s’inquiète l’acteur, favorable à la dénucléarisation.
Bouli Lanners s’insurge en parallèle contre plusieurs décisions prises pour contrer le coronavirus. Il ne comprend pas par exemple pourquoi sur les tournages, les acteurs peuvent retirer leurs masques alors que dans les salles, les spectateurs doivent le garder. «Depuis le début de la crise, on nous a infantilisé. On nous a dit ‘ce secteur-là, ça va être comme ça, point barre’. On aurait dû nous inclure dans les dialogues, ce qui n’a jamais été fait. La Belgique a été un très bon élève mais nous a jamais inclus dans les discussions», dit-il.
L’aspiration à un autre modèle de société
Si Bouli Lanners est si attaché à cette reprise du dialogue, c’est que pour lui, il va falloir établir des «protocoles de vie» pour vivre avec le virus, ce qui est une évidence pour lui. «Et si on ne le fait pas, on n'aura plus de société civile, on n’aura plus de relations humaines», assure-t-il. Il s’avère aussi déçu que la pandémie n’ait pas provoqué de remise en cause profonde de notre modèle de société, du moins pas autant qu’il l’espérait.
«Moi, je pensais que cette crise allait nous faire prendre conscience que l’activité humaine est responsable de beaucoup de choses et qu’on allait faire marche arrière, mais là j’ai l’impression que les gens veulent reprendre absolument ce qui était avant, c’est-à-dire que tout le monde ne pense qu’à repartir en vacances, prendre l’avion, etc. Or, c’est l’activité humaine qui a influencé la propagation des virus, leur existence même et la vitesse de propagation: il serait peut-être temps de remettre en question notre mode de vie», déclare-t-il, tout en ne cachant pas son attrait pour le modèle de la décroissance. «On doit d’abord régler cette crise et après on fera le bilan de ce qu’il s’est passé».