Quatrième vague de Covid-19: à qui la faute?

Les experts débattent notamment à propos des non-vaccinés mais pas seulement, que ce soit en Belgique ou ailleurs.

patient covid dans un hopital
Un hôpital à Eindhoven, aux Pays-Bas, le 19 octobre 2021. @ BelgaImage

Avec des niveaux de contaminations supérieurs à ceux du printemps 2021, la Belgique subit clairement aujourd’hui une quatrième vague d’infections au coronavirus. Une reprise épidémique qui est également constatée dans d'autres pays européens, comme l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Europe de l'Est en général, etc. Partout, une même question surgit: comment expliquer ce retour de l’épidémie? Et souvent, ce sont les non-vaccinés qui sont pointés du doigt. Souvent mais pas toujours. Car si certains experts ne cachent pas leur frustration vis-à-vis des non-vaccinés, d’autres rappellent que cette explication peut être complétée par d’autres facteurs.

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Les non-vaccinés et les gestes barrières

En Belgique, parmi ceux qui critiquent le plus frontalement les non-vaccinés, on retrouve le virologue Emmanuel André de la KULeuven. Sur Twitter, il écrit: «derrière les prétentions de ‘liberté’ des personnes adultes qui refusent le vaccin se cache de plus en plus souvent un égocentrisme à peine dissimulé, imposant aux autres sa propre incapacité à agir dans une logique collective. Car ce sont les autres qui paient les conséquences».

Même ton du côté de Charlotte Martin, infectiologue au CHU Saint-Pierre. Elle a fait les comptes: sur 25 patients Covid dans son hôpital, seuls deux sont vaccinés. «Si on avait que des vaccinés hospitalisés, on aurait que deux personnes», conclut-elle auprès de RTL Info. La frustration est également grande pour Nathan Clumeck, professeur spécialiste des maladies infectieuses. «Ceux qui ne sont pas vaccinés meurent ou sont hospitalisés», dit-il ce lundi à LN24, tout en rappelant que les patients Covid non-vaccinés auraient pu facilement éviter d’en arriver là et donc laisser libres des places en hôpital pour des personnes atteintes d’autres pathologies. D’après lui, c’est clair, il faut vacciner, même avec une troisième dose pour maximiser l’immunité.

D’autres experts ont un avis moins tranché. C’est le cas du président de l’Absym, Luc Herry. «Cette quatrième vague, c’est la faute aux non-vaccinés, mais aussi à ceux qui ne portent plus ou mal le masque, à ceux qui ne respectent plus les gestes barrières, à ceux qui ne respectent plus les quarantaines», dit-il à Sudpresse. Idem pour l’épidémiologiste Yves Coppieters qui rappelle que les vaccinés baissent aussi la garde et se font contaminer. Enfin, dans un autre tweet, Emmanuel André a lui aussi tenu à ajouter que «prévenir et limiter les infections (aération, masques) sont des complément nécessaires à une couverture vaccinale incomplète, surtout en hiver».

Le sud-est de l'Allemagne au centre de l'attention

Dans d’autres pays aussi, le débat fait rage. C’est notamment le cas en Allemagne. Là-bas, les contaminations atteignent un pic historique, toutes vagues confondues, même si les décès restent bien inférieurs aux niveaux atteints l’hiver dernier (une moyenne de 120 morts quotidiens contre presque 900 en janvier 2021). Mais ce qui attire surtout l’attention des experts allemands, c’est la dichotomie de l’épidémie au sein du territoire national. La nouvelle vague est ici clairement le fait du sud-est du pays, avec en tête les régions de Saxe, Thuringe et de Bavière. 

Interrogé par le quotidien Die Welt sur les raisons de cette reprise épidémique dans le sud-est, l'épidémiologiste de Leipzig Markus Scholz est clair et net: «Cela est clairement corrélé avec le niveau de vaccination». La Saxe est en effet la région la moins vaccinée d’Allemagne (57% de la population entièrement vaccinées), bien loin de la première place tenue par Brême (79%). La Thuringe et la Bavière figurent aussi parmi les zones les moins vaccinées. Une situation qui rappelle le scénario belge où Bruxelles et la Wallonie sont à la fois moins vaccinées que la Flandre et plus touchées par le rebond épidémique.

Inculper les non-vaccinés ne permet toutefois pas d’expliquer tout le phénomène en Allemagne. Dans le Brandebourg et la Saxe-Anhalt, deux régions tout aussi peu vaccinées, l’épidémie reprend moins fortement. Pourquoi? C’est la grande question. Plusieurs hypothèses ont été émises. Il est possible que le contact frontalier avec des pays fortement touchés par le Covid-19 comme l’Autriche et la Tchéquie ait désavantagé la Bavière et la Saxe. Des taux de contaminations élevés dans les écoles de ces régions pourrait aussi être en cause.

Les Pays-Bas et un état d'alerte global

Aux Pays-Bas aussi, la question de la reprise épidémique s’est posée. Là-bas, le taux de vaccination est similaire à celui belge mais contrairement à chez nous et à l’Allemagne, ce taux est assez stable pour toutes les provinces. Les régions de Rotterdam, Amsterdam et la province du Flevoland ont le bonnet d’âne mais comptent quand même 74-77% de vaccinés. 

Quoi qu’il en soit, encore une fois, ce sont les non-vaccinés qui sont désignés comme en partie responsables du retour du coronavirus. C'est-ce qu’explique à RTL Nieuws Marcel Levi, professeur de médecine à l'université d'Amsterdam. Selon lui, plus d’un million de non-vaccinés, cela «suffit pour remplir les lits d'hôpitaux» et il ne faut pas sous-estimer ce nombre. Selon l'Institut néerlandais de la santé publique et de l'environnement (RIVM), quatre patients Covid-19 sur cinq en soins intensifs n'ont pas été vaccinés. Marc Levi rappelle aussi que d’autres facteurs ont joué, dont le fait qu'il n'y avait un temps plus beaucoup de mesures sanitaires aux Pays-Bas, ce qui a facilité les contaminations.

L'Europe plus ou moins coupée en deux

Pour terminer, à l’échelle de l’Europe, il y a grosso modo une fracture entre pays plus et moins vaccinés qui est parallèle avec la survenue d’une nouvelle vague. La région qui fait figure de modèle en la matière, c’est la péninsule ibérique. Le Portugal est l’un des pays les plus vaccinés du monde avec près de 88% de la population ayant reçu au moins une dose (contre 76% en Belgique). Or que ce soit en Espagne ou au Portugal, les taux de contamination sont extrêmement bas. Les Espagnols n’ont jamais aussi peu eu de cas de Covid-19 depuis l’été 2020.

Derrière les pays ibériques, les meilleurs taux de vaccination de l’Union européenne se trouvent en France et en Italie. Et là aussi, les niveaux de contamination sont relativement faibles comparés à d’autres pays. Les deux États apparaissent encore en orange voire en vert sur la carte de l’ECDC (Centre européen de prévention et de contrôle des maladies) qui reflète l’état de l’épidémie sur le continent. Par contre, dans toute l’Europe de l’Est, où les taux de vaccination sont les plus faibles (seulement 20% des Bulgares sont vaccinés par exemple), la même carte est rouge foncé.

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