Inégalité vaccinale : les pays riches responsables de l’apparition du variant Omicron?

L’émergence du nouveau variant ravive le débat sur la levée des obstacles à la production des vaccins. Pour certains, Omicron est la conséquence directe de l’égoïsme des pays développés dans la gestion de la pandémie.

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« On vous l’avait bien dit", résumait auprès du New York Times François Venter, chercheur à l’université Witwatersrand à Johannesburg. Avant de continuer : « on dirait bien que les pays riches n’ont absolument rien appris en termes de soutien [aux autres pays]". Le scénario était en effet redouté : un petit nombre de pays riches accaparant l’essentiel de la production des vaccins anti-covid. Avec le risque de laisser des populations entières sans protection, et de fournir ainsi un terrain de jeu propice à la mutation du virus.

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D’abord repéré en Afrique du Sud, le variant Omicron a depuis une semaine été séquencé en Israël et en Asie, ainsi qu’en Europe. Un deuxième cas a d’ailleurs été détecté ce mercredi en Belgique. L’OMS a jugé "élevée" la "probabilité qu'Omicron se répande au niveau mondial", bien que de nombreuses inconnues demeurent (sur sa contagiosité, sur l’efficacité des vaccins existants et sur la gravité des symptômes).

« Facteur clef »

L’émergence de ce nouveau variant souligne la nécessité d’une couverture vaccinale globale. Au moins celle-ci est importante, au plus le virus va en effet pouvoir se répliquer. Et proposer de nouvelles mutations, qui vont potentiellement conférer au Sars-CoV-2 la capacité de mieux se propager. Pour de nombreux spécialistes, pas de doute : la stratégie vaccinale des pays riches, qui n’ont laissé que des miettes, explique en grande partie l’apparition d’Omicron.

"Il y a de très fortes chances que l’inégalité de répartition des vaccins dans le monde soit un facteur clef pour expliquer l’émergence de cette souche", a confirmé à France 24 Michael Head, épidémiologiste spécialiste des maladies infectieuses à l’université de Southampton. «Si vous êtes inquiets du risque [lié] à Omicron, faites-vous vacciner si vous ne l’êtes pas déjà [..] Les interdictions de voyager ne changeront rien. Les vaccins et l’équité mondiale pour la santé, si", a renchéri sur Twitter dimanche la virologue américaine Angela Rasmussen.

« Notre monde est raciste", a également commenté sur la plateforme Emmanuel André. « Le variant omicron n’est qu’une autre preuve que nous excluons un continent entier d’un accès équitable aux vaccins", a-t-il poursuivi, relayant une infographie qui détaille la répartition des injections à l’échelle mondiale.

 

Neuf doses sur dix captées par le G20

Le contraste est des plus parlant : alors que 66% des habitants des pays du G7 ont reçu au moins deux doses, seulement 6% des Africains sont vaccinés. En Belgique, un peu plus de 75% de la population totale est complètement vaccinée… Les nations les plus riches se sont ruées sur les vaccins ; près de neuf doses sur dix ont été monopolisées par les pays du G20.

Et l’initiative Covax, censée approvisionner les pays les plus pauvres, n’a pu mettre de côté que 537 millions de doses, soit seulement 2/3 de l’objectif annoncé. «Nous avons bien trop peu partagé, et on se retrouve avec des excédents, concédait à l’Echo l’eurodéputée flamande Kathleen Van Brempt (Vooruit). Si ceux qui sont contre la levée de la propriété intellectuelle avaient voulu imposer leur point de vue, ils auraient dû s’assurer que Covax fonctionne".

Alors que ce mécanisme de solidarité patine, les partisans d’une suspension générale des droits de propriété intellectuelle sur les vaccins voulaient justement en profiter pour se faire entendre à nouveaux. Depuis plus d’un an, plusieurs pays, dont l’Afrique du Sud et l’Inde, demandent la levée des brevets, meilleur moyen selon eux pour réduire l’inégalité vaccinale à l’échelle globale. Après avoir rallié à leur cause les Etats-Unis, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, Pretoria et New Delhi espéraient plaider leur cause devant l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).

Face à elles, la Commission européenne, qui ne veut pas entendre parler de levée des brevets. Prévu cette semaine en Afrique du Sud, le sommet de l’OMC a dû être annulé par mesure de précaution, afin d’éviter la propagation… du nouveau variant Omicron.

 

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