Sous-variant BA.2 d’Omicron: entre bonnes et mauvaises nouvelles

Les premières données sur BA.2 permettent d’esquisser ses caractéristiques, que ce soit sur sa virulence, sa contagiosité, etc.

Coronavirus en 3D
Représentation 3D du coronavirus responsable du Covid-19 @BelgaImage

C’est la grande question du moment: doit-on redouter ou pas le sous-variant d’Omicron, BA.2. Forme majoritaire du Covid-19 au Danemark, en Inde et aux Philippines, sa prévalence croît dans plusieurs autres pays (Royaume-Uni, Allemagne, etc.). En Belgique et en France, sa diffusion serait encore marginale mais il est probable que sa présence soit sous-évaluée. La faute à des tests PCR mal adaptés à ses spécificités. Justement, à propos des particularités de BA.2, des virologues font déjà connaître leurs premières analyses. Si elles ne sont pas définitives, certaines sont plutôt rassurantes. D’autres sont plus problématiques.

Nos dernières vidéos
La lecture de votre article continue ci-dessous

Pas plus virulent a priori mais plus difficile à détecter

Afin de faire le point sur le sujet, Tom Peacock, virologue à l’Imperial College de Londres, a tâché de réunir la documentation sur BA.2 dans un fil Twitter. Sur le réseau social, il explique notamment que «des observations très précoces en Inde et au Danemark suggèrent qu’il n’y a pas de différence majeure de gravité par rapport à BA.1». Autrement dit, dans l’état actuel des connaissances, BA.2 n’est pas plus létal que la lignée d’Omicron qui est la plus souvent détectée en Belgique. Une bonne nouvelle que le Londonien invite à prendre avec des pincettes, des données plus précises devant arriver dans les semaines qui arrivent.

Tom Peacock explique aussi que BA.2 possède des différences notables sur sa protéine Spike par rapport à BA.1. Un élément de la plus haute importance puisque les tests PCR détectent Omicron très précisément grâce à ces mêmes mutations. La majorité des labos sont pour l'instant incapables de véritablement distinguer BA.2. Il faudrait pour cela soit modifier les cibles de criblage des tests PCR, soit séquencer totalement le génome viral de BA.2, fait savoir Le Monde.

Résultat: pour le moment, la propagation de BA.2 est souvent sous-estimée. Les scientifiques sont donc bien en mal d’évaluer avec exactitude sa contagiosité réelle. Difficile de dire si elle est plus ou moins forte que BA.1.

Une propagation grâce aux recontaminations?

Certains indices semblent cela dit montrer que BA.2 pourrait concurrencer BA.1. «La croissance constante dans plusieurs pays est la preuve que BA.2 peut être dans une certaine mesure plus transmissible que BA.1», fait savoir le virologue britannique. Étienne Simon-Lorière, responsable de l’unité Génomique évolutive des virus à ARN à l’Institut Pasteur, dit la même chose. «Il est plausible, au vu des données danoises, que BA.2 ait un avantage de diffusion sur BA.1», dit-il au Huffington Post.

Selon le ministre français de la Santé, Olivier Véran, cette facilité de propagation pourrait s’expliquer par un facteur. «Nous discutons avec nos homologues Danois. (…) Ce que nous disent les Danois, c’est que c’est exactement le même (Ndlr, qu’Omicron), à une différence près, c’est qu’on pourrait se recontaminer potentiellement au BA.2 même quand on a déjà été contaminé à Omicron. Cela pourrait lui conférer un avantage concurrentiel», développe-t-il.

Autrement dit, attraper BA.1 ne permettrait pas de se protéger contre BA.2. C’est en tout cas ce que vient aussi d’annoncer Anders Fomsgaard, médecin en chef de l’Institut national danois de la santé (SSI). «Il est possible d’être infecté par BA.1 d’abord, puis par BA.2», assure-t-il sur la chaîne danoise 2 PLAY, même si les données doivent encore préciser ce qu’il en est réellement.

Une vague plus longue à cause de BA.2?

Si cette assertion se confirme, c’est assez problématique. Jusqu’ici, si des experts parlaient d’une potentielle fin de l’épidémie permise par Omicron, c’est pour une raison. Les niveaux de contaminations sont tels que l’immunité naturelle, combinée à l’immunité vaccinale, pourrait permettre de lutter efficacement contre le Covid-19. Mais si une contamination à BA.1 ne protège pas de BA.2, cela complique la donne.

L’hypothèse qui voudrait que BA.2 possède un avantage concurrentiel sur BA.1 pourrait en tout cas expliquer certaines bizarreries constatées actuellement. En France par exemple, le pic des contaminations était prévu pour mi-janvier et c’est ce qui semblait se produire. Sauf que depuis, contre toute attente, les chiffres sont repartis à la hausse, comme l’explique l'épidémiologiste Antoine Flahault aux Échos. Le pic «ne s'est pas produit et peut-être est-ce dû à ce sous-variant, qui semble très transmissible», fait-il savoir. Serait-ce donc le fait de BA.2? Impossible d'en être sûr en l’état, tant sa détection est difficile.

En Belgique, scénario similaire, où le pic des infections était prévu pour fin janvier. A priori, cette date semblait être juste, le taux de reproduction du virus ne cessant de décroître et frôlant même la barre du 1 la semaine dernière, c’est-à-dire le point où l’épidémie aurait été sur la pente descendante. Mais depuis, ce même taux est reparti à la hausse. Il est aujourd’hui de 1,28 (+18% sur une semaine). À nouveau, difficile d’incriminer avec certitude BA.2. Trop d’inconnues brouillent les cartes. Reste que cela retarde l’arrivée du sommet de la vague. Pendant ce temps-là, les contaminations au Covid-19 sont si nombreuses qu’elles multiplient les quarantaines, paralysant plusieurs secteurs d’activité et les écoles, entre autres. Le nombre d’hospitalisations continuent aussi de croître (+42%), même si les soins intensifs sont moins encombrés (-6%), probablement grâce à la moins grande virulence d’Omicron.

Éléments rassurants pour les soins intensifs et les vaccins

Au final, faut-il s’inquiéter ou pas à propos de BA.2? Il y a matière à discussion. Tom Peacock se dirait «très surpris» si BA.2 provoquait une nouvelle vague. Pour autant, comme le relaye 7sur7, il précise que «si nous supposons que BA.2 est similaire à BA.1 au niveau des symptômes, mais plus facilement transmissible, ce nouveau sous-variant exacerbera les vagues existantes mais ne créera pas immédiatement de nouvelles vagues. BA.2 peut rendre les pics plus élevés ou plus longs, faire remonter les déclins ou faire en sorte qu’un déclin commence plus tard».

Une étude fraîchement publiée au Danemark remarque par ailleurs qu’il n’y a «aucune différence dans les hospitalisations pour BA.2 par rapport à BA.1». Certes, les hospitalisations continuent d’augmenter dans le royaume danois en parallèle des contaminations, frôlant le record établi là-bas il y a un an. Mais du côté des soins intensifs, surprise: la décrue se poursuit. BA.2 confirmerait donc la caractéristique de BA.1: un bilan mitigé dans les hôpitaux avec moins de cas graves mais quand même des lits occupés.

À propos des vaccins, l’étude danoise se veut rassurante tout en gardant une certaine prudence. «On s'attend à ce que les vaccins aient également un effet contre les maladies graves en cas d'infection par BA.2», écrivent les chercheurs. Un avis partagé par Olivier Véran: «BA.2 ne change rien sur l'impact de la vaccination», assure-t-il à LCI.

Si tel est le cas, encore faut-il croiser les doigts pour qu’un autre variant ne sème pas encore plus le trouble. Les chercheurs ont déjà identifié un troisième sous-variant d’Omicron, BA.3, sans pour autant déjà susciter la moindre inquiétude en l’état.

Débat
Sur le même sujet
Plus d'actualité