Votre enfant est HPI ou haut potentiel intellectuel? Attention aux arnaques...

Beaucoup d'enfants sont catégorisés HPI un peu trop vite par des spécialistes peu scrupuleux. Un diagnostic souvent erroné, qui arrange bien certains parents.

Mon enfant est-il HPI?
Diagnostic d’un enfant précoce. (@Belga Image)

Il semblerait qu’on connaisse tous un parent d’enfant HPI, voire même une personne HPI tout court. Ce sont les initiales de «haut potentiel intellectuel», un qualificatif qui semble de plus en plus attribué, surtout chez les enfants. Sur Internet, à la télévision (HPI, l’immense succès de TF1) ou dans les librairies, on en parle partout. Le sujet interpelle et fascine.

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Pourtant, comme l’explique Libération, il n’y a pas tant de personnes qui méritent ce qualificatif, à peine 2 personnes sur 100.

Qu’est-ce qu’une personne à haut potentiel intellectuel?

Une personne HPI, qu’on nomme parfois HQI (pour «quotient») ou même zèbre est simplement ce qu’on appelait auparavant une personne surdouée ou précoce, à savoir quelqu’un qui aurait des aptitudes intellectuelles supérieures à la moyenne. S’il y a autant de termes différents pour un même profil, c’est parce qu’il y a également discussion autour d’une définition exacte.

Généralement, il s’agit de personnes avec un score très élevé au test de quotient intellectuel, souvent plus de 130. Un score que n’atteindrait donc que 2% de la population. Il n’est donc pas normal qu’il semble y en avoir autant de nos jours.

Pourquoi y’a-t-il autant de personnes HPI aujourd’hui?

Tout d’abord parce que certains s’autodéclarent HPI ou décrivent leur enfant comme tel, sans analyse scientifique. Grâce à des livres notamment.

Selon Libération, quelques best sellers ont contribué à ce fleurissement des HPI un peu partout. Notamment Trop intelligent pour être heureux de Jeanne Siaud-Facchin (Odile Jacob, 2008), Je pense trop par Christel Petitcollin (Guy Trédaniel, 2010) ou encore L’Adulte Surdoué de Monique de Kermadec (Albin Michel, 2011).

Beaucoup de lecteurs se sont reconnus, ou leurs enfants, dans les descriptions données par ces ouvrages. Assez en tout cas pour permettre à ces psychologues et coachs (la seconde est formatrice en développement personnel) de donner des conférences à guichet fermé.

Ensuite, parce que certaines sociétés et autres spécialistes profitent du phénomène. Les fournisseurs de tests de QI bien sûr, mais aussi des coachs sans formation légitime ou pertinente, parfois des psychologues peu scrupuleux.

Comment expliquer ce phénomène?

Nathalie Clobert, psychologue clinicienne, reçoit souvent enfants et adultes classés HPI. De plus en plus souvent, ils ont été catégorisés de la sorte à la va-vite. «On se rend compte que, parfois, les critères qui ont été retenus pour parler de haut potentiel sont loin d’être ceux du consensus scientifique», explique-t-elle à Libération.

«L’étiquette HPI peut être perçue comme une réponse rassurante. Mais si le fait d’être haut potentiel peut participer à un sentiment de décalage, ce n’est pas l’unique explication de  la souffrance, qui est souvent à chercher ailleurs. Notamment dans l’hypersensibilité ou les difficultés de gestion émotionnelle, qui ne sont pas des caractéristiques propres aux HPI, contrairement à ce que croit le grand public».

En effet, on colle souvent l’étiquette HPI trop vite sur des situations de mal-être émotionnel, sur des problèmes sociaux ou comportementaux. Pourtant, les études n’indiquent pas forcément qu’un haut potentiel et des difficultés socioémotionnelles vont automatiquement de pair.

«Se présenter comme un haut potentiel intellectuel, c’est plus valorisant et protecteur pour l’image de soi qu’un problème émotionnel ou psychologique», commente Nathalie Clobert. «Pour résoudre cette question de souffrance, il vaut mieux entreprendre une démarche thérapeutique - psychothérapie, accompagnement psychologique voire, lorsque c’est nécessaire, une prise en charge psychiatrique avec un traitement médicamenteux.»

Trop de confiance dans les tests de QI

Le docteur Fanny Nusbaum Paganetti, spécialiste en psychologie et neurosciences de l’intelligence, donne une autre explication au phénomène: les tests de QI eux-mêmes, vus comme la sacrosainte preuve du haut potentiel.

«Dire qu’à partir du moment où l’on a 130 de QI on est HPI est faux», affirme-t-elle. «Ce que mes pairs experts sur le sujet ne disent pas, c’est que d’une année à l’autre, le test de QI a un taux de fidélité de 70 %. Autrement dit, une personne peut avoir 130, le repasser plus tard, et être à 110.»

En effet, un test de QI donne un résultat à un instant T. Selon le docteur Nusbaum Paganetti, pour être catégorisé HPI ou «philocognitif», terme qui a sa préférence, une évaluation cognitive et comportementale des capacités intellectuelles est nécessaire.

«Un philocognitif, c’est quelqu’un qui a des capacités de raisonnement supérieures, ce n’est rien d’autre que ça», clame-t-elle. «Et être psy, c’est être formé à comprendre l’humain, c’est notre travail de savoir si quelqu’un est haut potentiel en posant des questions et en l’observant. Encore une fois, ce n’est pas l’humain qu’il faut remettre en question, c’est l’investissement que l’on met dans ce test.»

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