
Quatre étoiles pour "L'ordre du jour" d'Eric Vuillard

Après le partage vorace de l’Afrique (Congo), l’absurdité de la Première Guerre mondiale (La bataille d’Occident), l’origine de notre société de spectacle trouvée chez Buffalo Bill (Tristesse de la terre), l’auteur, documenté mais pas historien, entend montrer que le IIIe Reich aurait pu être étouffé dans l’œuf. La terrible Allemagne nazie n’est d’abord qu’un caïd de cour de récré qui injurie, menace et bouscule les faibles. Mais personne n’a le courage ou la lucidité de se redresser pour dire “tu ne me fais pas peur”. Il lui suffit de ne pas le demander gentiment pour que le monde cède. Le chef suprême des armées est pourtant incompétent. Ses divisions de panzers tombent en panne et doivent envahir une Autriche consentante, posées sur des trains. L’Autriche se donne, donc. La France et l’Angleterre s’aveuglent. Les industriels allemands, eux, financent. Pendant la guerre, ils exploiteront à mort les prisonniers des camps. Après, ils reprendront les affaires, en famille.
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Des éléments historiques sous la loupe, reliés à leurs causes, leurs conséquences tirées jusqu’aux cynismes d’aujourd’hui, des coïncidences malicieusement pointées, mais aussi un fil logique révélé… Vuillard ne change pas la construction de ses livres qui fonctionnent comme une fine toile d’araignée et se change en piège infernal. Il conserve aussi son écriture souvent clinquante, mais décontractée par endroits. On aime ses drames historiques d’abord parce qu’ils baignent dans une ironie revigorante et salutaire. C’est écrit page 141: “Lorsque l’humour incline à tant de noirceur, il dit la vérité”.

Rencontre le 16/9 à 17h à La Licorne (Bruxelles), www.librairie-lalicorne.be.