Lou Doillon ensorcelle les Nuits

Toutes guitares en avant, la chanteuse a livré une prestation parfaite ce lundi. Éclectique, électrique et magique. Mustii et Ebbène ont été nos autres coups de cœur.

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"I’m sick of my name" chante Lou Doillon sur son troisième album "Soliloquy" paru en janvier dernier. Sous le Chapiteau des Nuits Botanique où elle se produisait ce lundi 29 avril enfin printanier, cette  phrase prend tout son sens. Non, Lou Doillon n’est pas malade de s’appeler Lou Doillon. Elle est malade de l’interprétation qu’on en fait. Sur scène, elle n’est plus la comédienne, le mannequin ou la "fille de". Elle est chanteuse à temps plein. Après un premier album "Places" téléguidé par son pygmalion d’alors Etienne Daho et "Low ", disque réalisé en mode folk avec l’écorché vif Taylor Kirk, alias Timber Timber, Lou s’assume pleinement avec ce troisième tome anachronique traversé de sonorités rock & rauques et de refrains charnels.

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Le fantôme de Patti Smith

En vingt titres et nonante minutes d’un show qui sait rester naturel tout en étant minutieusement millimétré, la jeune femme explose les références et casse les codes. Plus rock que folk, sa prestation est un plaisir pour les yeux et les oreilles. L’ingénieur du son lui a déroulé un tapis de velours sur laquelle cette artiste bohème et nomade évolue en toute liberté. Elle chante, elle ondule, elle joue de la guitare électrique, ne doit pas minauder pour toucher les cœurs et les corps. On pense à la Patti Smith de l’époque "Horses/Easter". On pense à la Joni Mitchell de "Blue". On pense surtout à Lou Doillon qui déclarait dans les pages de Moustique "vouloir avancer à l’instinct et faire les choses parce que j’ai besoin de les faire. Sans calcul mais par nécessité".

Plaisir des grattes

Ses musiciens lookés seventies se la jouent Crazy Horse (le groupe, pas le cabaret). Sur plusieurs morceaux de "Soliloquy" (qui est livré quasi dans son entièreté), ce sont pas moins de trois grattes qui électrisent le Chapiteau. Grands frissons. Ses premiers amours folk ressurgissent de temps à autre (Places qui fait toujours plaisir), les claviers sont présents quand il le faut (le gimmick entêtant de All These Nights), la pop n’est jamais loin (la ballade crépusculaire Nothings), mais c’est l’énergie de ses nouvelles compositions (Burn, The Joke, Last Time) qui fait la différence.

En rappel, Lou Doillon revient d’abord seule. Elle a troqué son pattes d’éph’ néo-hippie pour une robe d’un vert immaculé. Parce qu’"une robe, ça fait du bien et ça fait la fille qui s’est trompée d’heure et d’endroit et qu’on a le droit". Bien dit, bien vu. Cat Power n’est pas là pour assurer les "ouh ouh ouh" de It’s You? Pas grave, elle demande au public de s’en charger alors que toutes les lumières se sont rallumées. Sa manière à elle de dire au revoir. Après son concert inaugural de "Places" à l’Orangerie en 2012, Lou Doillon vient d’écrire une nouvelle page de son histoire d’amour avec son public belge.

Ebbène fait son Début de soirée

En première-partie, on a retrouvé avec plaisir Ben Baillieux-Beynon. Après des mois d’un travail artisanal et déjà de superbes prestations live, le garçon n’était pas peu fier de dévoiler "Début de soirée", son tout frais, tout beau et tout émouvant premier album de son projet solo Ebbène. En français dans le texte et avec le multi-instrumentiste Jérôme Magnée (Dan San) à ses côtés sur scène, l’ami Ben évoque les hauts et les bas d’une vie sentimentale dans lesquels chacun peut se retrouver. Arrangements épurés, accords en arpège, invitation aux voyages (géographique et intérieur) et surtout des mélodies qui font mouche (Barcelone, Nuit Américaine, Lâcher les chiens)… Ebbène avait des raisons d’être heureux lorsqu’on l’a recroisé à l’issue de son concert. Ce mardi, il a touché un nouveau public et c’est aussi le but des Nuits.

Le prince Mustii

Le concert de Mustii à l’Orangerie était archi-blindé et ça n’étonne personne. Depuis la sortie de son premier album "21st Century Boy" l’automne dernier, le prince androgyne de l’électro-pop vole de sold-out en sold-out et surprend. Pour Les Nuits, Thomas Mustin (son nom sur son abonnement Tec) avait reçu carte blanche. L’occasion pour lui de déstructurer, de reconstruire et de réinventer les mélodies intemporelles de "21st Century Boy" dans un décor féérique nappé de draps blancs. Cette relecture émouvante et épurée de son répertoire étant offerte avec un seul musicien, le producteur/claviériste Elvin Galland, alias Jim Henderson. Mettant tous ses talents de comédien et de performer au service de ses chansons, Mustii a le mérite de proposer quelque chose d’unique sur scène et de s’en donner les moyens. Pour une prestation qui était un "one shot", le garçon a bossé d’arrache-pied et s’est investi pleinement. Respect total…

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