
Renaud : attachant, poil aux dents

Il est timide, et il ne s’est jamais soigné. C’est peut-être pour ça que Renaud a toujours considéré son œuvre avec tellement d’humilité qu’il n’en reconnaît pas lui-même l’immense portée. Aujourd’hui, on le sait fragile, en guerre interminable avec ses démons et maladivement mélancolique face au temps qui avance. Mais à 67 ans, il est toujours debout, peu importe ce qui le soulage – cela ne regarde que lui – et peu importe si beaucoup oublient de consulter son immense répertoire avant de le juger. Pour effleurer les ambiguïtés qui émanent du personnage, le documentaire Renaud, en plein cœur est un excellent complément à ce répertoire en question. Parce qu’on y voit le chanteur se confier en toute sincérité, oubliant presque la caméra qui le scrute et avec laquelle il n’a jamais été ami.
La lecture de votre article continue ci-dessous
”Il est très peu friand de ce genre d’exercice”, rappelle Didier Varrod, le réalisateur. C’est comme ça depuis 1975, quand le titi parisien au foulard rouge a commencé à s’insurger face à cet Hexagone shooté à “la bagnole, la télé, le tiercé”. Et ça ne changera pas. Mais c’est justement grâce au réalisateur que l’échange est attachant: c’est un ami de l’artiste, et une confiance s’est installée entre eux depuis un premier portrait mis en boîte en 2002 sous le nom de Le rouge et le noir. Renaud y évoquait ses débuts comme comédien, ses blessures, son enfance, ses engagements. Mais il manquait alors un petit quelque chose: la parole de ceux qui connaissent le chanteur par cœur. Treize ans plus tard, Didier Varrod a convaincu son pote de mordre à nouveau sur sa chique, en lui promettant que les mots ne sortiraient pas seulement de sa propre bouche. Ainsi, on y croise trois de ses proches les plus précieux et les plus avares en confidences. Son frère jumeau David, d’abord. Mais aussi son ex-femme Dominique et sa fille Lolita, auxquelles il a consacré tant de chansons d’une tendresse infinie et absolue…