
Cinéma : les Mâles du siècle

Le héros américain a bien changé. Comme on l’entend dans le film des sœurs Clara et Julia Kuperberg, spécialistes du cinéma et du genre, “C’était un mâle dominant et un sauveur. Mais les féministes ont dit: “Nous n’avons pas besoin d’être sauvées”. Aujourd’hui, les hommes au cinéma seraient incapables de sauver un chat dans un arbre”. L’analyse date de 2012-2013, avant #MeToo, avant Weinstein. Avant Marvel aussi. Si elle est passionnante à regarder en soi, elle l’est tout autant à observer à travers le filtre de l’époque actuelle. On a envie d’écrire la suite, d’y réfléchir, de savoir si l’omniprésence des super-héros au box-office apparaît comme une régression ou une évolution. La matière est immense et fascinante. Une jubilation pour les cinéphiles, un caviar pour les sociologues.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Le duo de réalisatrices fait le tour de la question avec pertinence et confronte ciné et air du temps. En ordre chronologique, c’est toute l’identité masculine qu’on voit muter, évoluer, se fracasser. À la base, les icônes, c’étaient Rudolph Valentino, l’élégance muette et exotique, ou la moue narquoise de Clark Gable. Puis il y a eu la virilité d’un John Wayne ou d’un Gary Cooper, flingue au poing, femme au bras, le mâle dominant hypersexualisé incarné par Marlon Brando (photo). Comment ces mâles sévèrement burnés ont-ils accouché d’un Dustin Hoffman, d’un Woody Allen, d’un Steve Carell ou d’un Zach Galifianakis, ces antihéros effarés, potaches, sensibles, déglingués, phobiques de l’engagement? Comment la bromance (amitié forte entre deux hommes) semblait alors remplacer jusqu’à la comédie romantique?
Un tour d’horizon intelligent, éclairant, qui donne envie de plonger dans le travail de ces femmes engagées, qui ont depuis lors multiplié les documentaires sur le sexisme à Hollywood.