
Une visite nue organisée pour l'expo Hyperralism Sculpture

Un corps nu, recroquevillé sur lui-même. Une grand-mère, habillée sobrement, qui tient un nourrisson sur la poitrine. Des hommes, des femmes, un énorme bébé, immobiles à jamais. Les sculptures présentées pour l'exposition Hyperralism font le tour du monde et suscitent toujours la même admiration, teintée parfois d'appréhension. Et pour cause: ces humains de silicone, de résine et de fibre de verre, qui nous sont si semblables, questionnent notre identité et notre rapport à la beauté. Avec ses plis, ses aspérités, ses poils et ses rides, le corps se décline à l'infini, dans toute sa banalité.
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Après Bilbao, le Mexique, l'Australie et Rotterdam, l'exposition Hyperrealism Sculpture a pris ses quartiers au Musée de la Boverie de Liège. Un événement qui a pris une tournure singulière le 3 décembre, puisque une dizaine de spectateurs ont visité les lieux... entièrement nus. L’agence événementielle Movietown, qui a organisé cette « rencontre », a commenté cette initiative «Dans un contexte naturiste, on ne “montre” pas, on ne s’exhibe pas, on est, tout simplement. Un retour à l’essentiel, détaché du paraître, permettant de vivre pleinement l’expérience de visite, de manière respectueuse, pudique et originale».
© Diana Vos - Movietown
Le projet Hyperrealism Sculpture met en avant le travail de plusieurs grands noms de l'art, comme Ron Mueck. Cet ancien maquettiste et marionnettiste pour la télévision et les films pour enfant, s'est lancé à corps perdu dans la sculpture hyperréaliste à la moitié des années 1990. Avec ses humains sur et sous-dimensionnés, l'Australien étonne grâce à des détails extrêmement précis. Il n'hésite pas, par exemple, à représenter les veines et les poils de chacun de ses personnages, et pousse ainsi le spectateur à scruter chaque œuvre dans ses moindres recoins.
Cow-Boy with Hay by Duane Hanson
On y retrouve aussi le travail de Duane Hanson, sculpteur américain dont les figures réalistes en résine de polyester et en fibre de verre, vêtues de vêtements de tous les jours, ont souvent dupé le public en lui faisant croire qu'il s'agissait de vraies personnes. Des créations étranges et familières à la fois, qu'il a commencé à exposer à la fin des années 1960. A cet époque, son travail souligne des revendications politiques : Hanson choisissait ses sujet en fonction du message qu'il voulait faire passer, n'hésitant pas à représenter des victimes de gangs et les sans-abri. Bien qu'il ait ensuite tempéré son intention, il a continué à aborder les rôles ingrats de la classe ouvrière - femmes au foyer, réparateurs, nettoyeurs de bureaux, lave-vaisselle, gardes de musée et concierges, dont la tête inclinée et le regard vide révèlent l'ennui et l'épuisement.
Woman and Child by Sam Jinks
Avec leurs vrais cheveux grisonnants et leurs peaux ridées, les sculptures de l'australien Sam Jinks se retrouvent également dans l'exposition Hyperrealism. L'artiste, qui travaillait sur des plateaux de tournage de films d'horreur, a voulu aborder la mortalité de l'être humain en le représentant de la manière la plus fidèle possible. Pour y parvenir, il travaille ses créations à l'argile pour ensuite les recouvrir de silicone. Une méthode plus artisanale que la numérisation 3D, un temps essayée, qui le privait de la modélisation du « squelette » de ses œuvres. «De nombreuses décisions inconscientes sont prises dans cette phase et elles font partie de qui vous êtes. La peau, la texture des os recouvrant les muscles, elles sont toutes interprétatives, c'est ce qui fait le travail. »
Hyperralism Sculpture. Ceci n'est pas un corps. Jusqu'au 3/5/2020 à La Boverie de Liège. www.expo-corps.be
Visite nue le 29 janvier de 18h à 21h.