

Illustré par Clarke, le livre Access All Areas de Rudy Léonet paraît en octobre. Pendant cinq semaines, nous en publions des extraits où - de Bowie à Daho, et de Gainsbourg à Cure - les belles rencontres se succèdent.
En septembre 2000, Vanessa Paradis s’apprête à sortir “Bliss.” Même si on y retrouve des signatures comme Bashung ou Matthieu Chedid, elle publie ses propres compositions pour la première fois. Johnny Depp a coécrit deux titres et joue de la guitare. Une chanson s’intitule “La Ballade de Lily Rose.” Il y a donc un nouvel enjeu très personnel qui la rend plus fébrile que d’habitude. On s’est donné rendez-vous dans un studio de production de la banlieue parisienne où elle termine le clip de la chanson “Pourtant.” Il y a quand même beaucoup de protocoles avant d’y parvenir. L’adresse est donnée en toute dernière minute. Mot de passe à l’entrée.
Finalement j’arrive dans une grande pièce froide qui ressemble à une arrière-boutique et qui tranche avec les palaces et les suites d’hôtels cinq étoiles où elle a l’habitude de recevoir. Mais là, elle est au boulot. Et elle est nerveuse à la veille de la sortie de son disque le plus personnel. Elle fume. Beaucoup. Elle roule ses cigarettes dans des feuilles de papier non blanchi Brown Smoking d’une seule main et sans regarder. Bluffant. On est loin de la Lolycéenne de Gainsbourg et de l’oiseau de Paradis qui se balance en cage de Jean-Paul Goude pour Chanel. Mais elle reste souriante, affable, déterminée, accessible, disponible.
Vanessa Paradis est une personne vraiment très charmante. Pendant l’interview, on frappe à la porte, juste derrière moi. Elle jette un regard par-dessus mon épaule et fait un signe de la tête avec un regard convenu que j’interprète comme une autorisation ou une invitation à entrer. Je coupe l’enregistrement. Johnny Depp arrive et s’excuse pour le dérangement. Il est en train de monter le clip qu’il a réalisé dans le studio juste à côté et il a besoin que Vanessa tranche sur un plan à garder ou à jeter avant de continuer. Elle lui promet de le rejoindre dès que possible mais que là comme il voit… elle est occupée. Il s’excuse encore visiblement gêné par le dérangement et s’en va par où il était entré. L’interview reprend. Je comprends tout à coup beaucoup mieux la lourdeur de tous les protocoles.