
Rouge, The Assistant... Les sorties ciné à ne pas manquer

Rouge
Inspiré par le scandale des boues rouges en France (le rejet dans le Parc national des Calanques de résidus toxiques de production d’alumines par le site industriel de Gardanne), le nouveau film du cinéaste franco-algérien Farid Bentoumi (Good Luck Algeria), coproduit par les frères Dardenne, se trouve à la croisée des chemins, entre thriller écologique contemporain engagé et drame familial intense, porté par des acteurs forts.
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Dans le rôle de Nour, une jeune infirmière catapultée à la médecine du travail dans l’usine de son père et qui découvre malgré elle la pollution de l’usine, on retrouve Zita Hanrot (Fatima, La vie scolaire). Elle forme avec Sami Bouajila un formidable duo père-fille, déchirée entre son éthique professionnelle et sa loyauté envers son père dont la vie se confond avec celle de l’usine. Tirant parti des grands espaces et de l’esthétique rouge des toxiques d’alumines, le film rend hommage aussi bien aux lanceurs d’alerte (ici deux femmes, Nour et une jeune journaliste interprétée par Céline Sallette) qu’aux ouvriers qui ont sacrifié leur vie à l’usine, et tente aussi de donner une parole à ceux qui n’y ont pas eu droit.
Rouge*** réalisé par Farid Bentoumi. Avec Zita Hanrot, Sami Bouajila, Céline Sallette - 88’
The Assistant
Jane (troublante Julia Garner) vient d’être embauchée comme assistante de production d’un nabab du cinéma - sorte de Harvey Weinstein jamais nommé, seulement appelé “il”. Remarquée au festival de Sundance, la cinéaste australienne Kitty Green s’est appuyée sur des témoignages du sexisme ordinaire dans l’industrie du cinéma pré-#MeToo pour dessiner le portrait d’une assistante qui découvre les abus du producteur pour lequel elle travaille et la complaisance de ses collègues masculins. La réussite du film tient essentiellement dans le hors-champ (les agissements du producteur ne sont jamais montrés) et dans l’apparente passivité de l’héroïne dont les gestes mécaniques et regard subtil dénoncent en creux l’omerta qui entoure un système prédateur. - J.G.
The Assistant*** réalisé par Kitty Green. Avec Julia Garner, Matthew Macfadyen, Makenzie Leigh - 88’.
China Dream
Doublement auréolé en Belgique (prix du public au Festival de Namur et au Festival Millenium), le film du duo belge Hugo Brilmaker et Thomas Licata déconstruit la propagande “China Dream”, du nom de la politique de grands travaux lancée par la Chine en 2013 pour rétablir “le rayonnement de la belle nation socialiste, moderne et puissante” en la confrontant au ressenti des habitants de la ville de Datong. Dans cette cité antique à l’ouest de Pékin, filmée en grande partie en 2017, les habitants historiques sont peu à peu expropriés et le patrimoine détruit au profit d’une cité qui se transforme en parc d’attractions géant, et qui prend des allures de ville fantôme, reflet d’un monde d’interdictions générées par un grand capitalisme de surveillance. Édifiant. - J.G.
China Dream*** réalisé par Hugo Brilmaker et Thomas Licata - 76’.
My Salinger Years
En 1995, l’écrivaine, poétesse et journaliste Joanna Rakoff décide de quitter sa province et de vivre à New York. Attirée par le monde des lettres, elle va passer un an dans une agence littéraire dont un des clients est J.D. Salinger, l’auteur de L’attrape-cœurs! My Salinger Years est l’adaptation de son roman dans lequel elle raconte entre autres comment elle doit gérer l’énorme courrier que l’énigmatique écrivain reçoit et auquel il ne veut plus répondre depuis 30 ans. Mais au-delà de l’anecdote, il s’agit d’un film sur l’acte d’écrire et la différence qu’il peut y avoir entre l’envie et le besoin de prendre la plume. Malgré quelques clichés, notamment autour du personnage de la directrice de l’agence jouée par Sigourney Weaver, le film du canadien Philippe Falardeau propose le portrait réussi d’une jeune femme à la croisée des chemins. - E.R.
My Salinger Years**, réalisé par Philippe Falardeau. Avec Sigourney Weaver, Margaret Qualley - 101’.