
La fête à Fufu

Photos, costumes, archives
Montée par la Cinémathèque française, lieu de recueille ment pour cinéphiles hardcores, l’exposition consacrée à Louis de Funès s’installe à Bruxelles. Le Palace, lieu habituellement dédié au cinéma d’auteur, ouvre ses murs à cette vaste rétrospective qui, suivant la vogue actuelle des expos-attractions, retrace la carrière de ce héros de la comédie française. Passé du stade d’acteur quasi invisible (il ne plaît ni au théâtre ni au cinéma où, pendant des années, il enchaîne les rôles passe-partout) à celui de bâton de dynamite, de Funès pénètre les cercles de l’intelligentsia. Photos, costumes, objets, archives, l’ensemble tente de déconstruire le mythe pour mieux souligner son impact.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Objet culte
Point de mire de l’exposition, la voiture du Corniaud rappelle l’hystérie des gags qu’inspirait Louis de Funès lorsque Gérard Oury se piquait d’écrire pour lui. Capable de tout, et surtout d’improviser sans que personne ne l’ait vu venir et sans personne qui puisse le freiner, son jeu physique n’avait qu’une limite: le ciel. Champion de la simagrée, athlète de l’effet neurasthénique, il fait des merveilles face à Bourvil avec qui il produit un duo dominant-dominé de toute beauté.
Rabbi Jacob, tradition et folie
Relique et souvenir d’une année 1973 tendue, le costume de Rabbi Jacob ne renvoie pas seulement à une comédie de Gérard Oury dont le succès fut colossal, mais aussi à une réception difficile de la part de ceux qui jugeaient le film mal venu en pleine guerre du Kippour qui oppose Israël à l’Égypte et à la Syrie. C’est que Les aventures de Rabbi Jacob, histoire d’un monumental quiproquo, s’amuse de la culture et de la religion juives, multipliant les scènes cocasses autour des traditions jusqu’à la chorégraphie de rue (“Rabbi Jacob, il va danser”) entrée dans les anthologies.
Ruralité contre progrès
Adapté d’un best-seller campagnard de René Fallet, La soupe aux choux met face à face Louis de Funès et Jean Carmet aux prises avec un extraterrestre venu de la planète Oxo, guidé sur Terre par le bruit des pets des deux compères… Bravache, plaidoyer pour la défense de la ruralité opposée au progrès, le film n’est pas un chef-d’œuvre. Il est même éreinté par la critique à sa sortie en 1981, mais suscite toujours l’affection du public malgré le kitsch du costume de la créature venue d’ailleurs (dans lequel se dodeline Jacques Villeret) - degré zéro du stylisme SF.
Le Gendarme, miroir de la société
Symbole des années yéyé et produit des Trente Glorieuses, la série des Gendarmes se décline en six films (tous réalisés par Jean Girault) qui, en filigrane, décryptent l’évolution de la société française. Chapeautée par le personnage iconique de Cruchot, incarnation de l’ordre et de la loi, la collection aborde l’évolution des mœurs et des modes. Sexualité, minijupe, féminisme, consumérisme, drogue, pratiques estivales et même vie extraterrestre - tout y passe dans une ambiance de village gaulois en goguette.
Les films sur grand écran
Si de Funès reste un champion des rediffusions télé (on a parfois l’impression que l’astuce a été inventée pour lui), de plus en plus rares sont ceux qui peuvent se vanter d’avoir tout vu de lui sur grand écran. Accompagnant l’expo, une rétrospective au Palace aligne les classiques, de La grande vadrouille à Rabbi Jacob, en passant par Le gendarme de Saint-Tropez, La folie des grandeurs, Hibernatus, L’aile ou la cuisse… Chaque film est introduit par une personnalité - Dany Boon, Joachim Lafosse, Jaco van Dormael, Bruno Podalydès, Vincent Patar et Stéphane Aubier... Voir agenda sur www.cinema-palace.be
Louis de Funès. Du 2/10 au 16/1/2022.
Le Palace, boulevard Anspach 85, 1000 Bruxelles. www.cinema-palace.be