
Vortex, Crevettes Pailletées... Les sorties cinéma à ne pas manquer

Vortex
Dans le vocabulaire marin, un vortex est un tourbillon qui prend naissance dans l’océan et aspire tout, comme un vertige. Si certains ne soupçonnaient pas le réalisateur d’Irréversible ou Love de tendresse, qu’ils soient détrompés avec Vortex, film dédié “à tous ceux dont le cerveau se décomposera avant le cœur”. Car la tendresse se loge ici dans chaque regard que pose un fils (ex-toxicomane devenu père – magnifique Alex Lutz) sur ses parents rongés par la déliquescence du très grand âge. Dans un petit appartement parisien rempli de livres, Vortex recrée un couple parental fictif qui convoque deux généalogies de cinéma: Françoise Lebrun, actrice iconique de La maman et la putain dans le rôle de la mère, ancienne psychiatre et militante féministe atteinte d’alzheimer, et Dario Argento, réalisateur culte de Giallo et du cinéma de genre italien en père intellectuel de gauche qui écrit sur les rêves et le cinéma.
La lecture de votre article continue ci-dessous
En une série de split screens mélancoliques et cliniques (parce que “la réalité, c’est la superposition de deux perceptions”), Vortex montre la brisure de la maladie et la séparation de parents pourtant inséparables. Chez Noé, pas de champ-contrechamp (“ce truc d’expert-comptable”) mais une intensité de regards et de gestes, et la présence d’Alex Lutz qui apporte une douceur inédite dans son cinéma, jusqu’au dernier souffle.
*** Réalisé par Gaspar Noé. Avec Alex Lutz, Françoise Lebrun, Dario Argento – 144’.
La revanche des Crevettes Pailletées
En route pour les Gay Games au Japon, les Crevettes Pailletées, champions de water-polo, se retrouvent coincés dans une Russie où ils découvrent une homophobie brutale. Plusieurs membres de l’équipe vont en faire les frais et être envoyés dans une prison où on va vouloir les guérir de leur homosexualité et les remettre dans le “droit” chemin. Tourné en partie à Kiev et Lviv, cette Revanche des Crevettes Pailletées évite les pièges classiques dans lesquels tombent la plupart des succès du box-office. Si les personnages restent drôles sans verser dans la vaine caricature, c’est parce qu’ils sont bien écrits et que les auteurs leur ont donné plus d’épaisseur que dans le précédent. Au-delà de la pure comédie, ce film se veut aussi engagé, sans être militant pour autant, et réserve quelques scènes appelées à devenir cultes, comme cette adaptation du succès de Julien Clerc, Femmes, je vous aime, interprétée avec une émotion puissante par Romain Brau.
*** Réalisé par Cédric Le Gallo et Maxime Govare. Avec Nicolas Gob – 113’.
Atlantis
Tourné dans le Donbass entre 2017 et 2019 trois ans après le début de l’invasion russe en Ukraine, figurant un temps post-guerre que le réalisateur estime à 2025, Atlantis vous projette dans la gueule de la guerre actuelle. On y suit les destins croisés de Sergiy, ancien soldat souffrant de syndromes post-traumatiques et Katya, ex-étudiante en archéologie devenue secouriste pendant la guerre et chargée d’exhumer les corps anonymes de soldats disparus. À travers des plans fixes et des scènes hallucinantes (Sergiy qui prend un bain dans la gueule rouillée d’une pelleteuse), le film montre la guerre comme un désastre écologique total, où les ressources sont empoisonnées de manière irréversible, où Sergiy et Katia tentent pourtant de s’aimer parce que rester c’est aussi refuser de disparaître. Les bénéfices d’Atlantis (projeté au cinéma Galeries à Bruxelles) et de Reflection (film suivant de Vasyanovych projeté dans le cadre du Festival Mooov) iront directement aux producteurs ukrainiens.
*** Réalisé par Valentyn Vasyanovych. Avec Andriy Rymaruk, Liudmyla Bileka – 106’.
Le monde d'hier
À quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle française, un sondage donne plus que toutes ses chances au candidat d’extrême droite. Coup dur pour Élisabeth de Raincy (Léa Drucker), présidente républicaine sortante et jetant l’éponge pour des raisons de santé. La première dame ne sait plus vers quelle solution se tourner pour empêcher le loup d’entrer dans la bergerie. Totalement d’actualité, Le monde d’hier de Diastème se veut le portrait de démocrates qui n’arrivent plus à lutter contre les extrêmes avec leurs seules idées. Dommage que son film soit écrit et réalisé comme une pièce de théâtre.
** Réalisé par Diastème. Avec Léa Drucker, Denis Podalydès, Alban Lenoir, Benjamin Biolay – 89’.
À l'ombre des filles
Luc Jardon (Alex Lutz), chanteur lyrique qui fait une pause dans sa carrière pour des raisons personnelles, va animer des ateliers de chant dans une prison. Confronté à une demi-douzaine de détenues, il leur transmet l’idée que le chant est une magnifique manière de communiquer et de se connaître. La rencontre entre ces deux univers est évidemment destinée à faire des étincelles. Partant d’une belle idée, Étienne Comar peine à garder le rythme faute d’un enjeu dramatique fort. Reste que les comédiennes (parmi lesquelles Hafsia Herzi, Veerle Baetens et Agnès Jaoui) insufflent leurs belles âmes au film.
** Réalisé par Étienne Comar. Avec Alex Lutz, Agnès Jaoui, Hafsia Herzi, Veerle Baetens – 106’.