
Les Amérindiens se déchirent: faut-il qu'ils boycottent «Avatar» ou pas ?

Avatar 2 réussira-t-il l'exploit de son prédécesseur, sacré plus gros succès au box-office de l'histoire? Ses débuts sont encourageants mais un obstacle pourrait l'empêcher d'atteindre les sommets. Le film est en effet la cible d'un boycott aux États-Unis, et ce parce qu'il est accusé d'appropriation culturelle. Des déclarations du réalisateur David Cameron font également l'objet d'une controverse outre-Atlantique, ce qui ajoute de l'huile sur le feu.
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Trois critiques adressées à James Cameron
L'une des personnes ayant appelé au boycott s'appelle Yuè Begay, une influenceuse membre du peuple Navajo et coprésidente d'Indigenous Pride LA. Elle se dit choquée par ce qu'elle considère comme un cas d'appropriation de la culture amérindienne par des hommes ne faisant pas partie de la communauté. Il est vrai que parmi les acteurs principaux, seulement une pourrait prétendre avoir (partiellement) de telles origines: Michelle Rodriguez. James Cameron a pourtant par le passé précisé que l'histoire d'Avatar faisait référence «de manière très explicite à la période coloniale dans les Amériques, avec tous ses conflits et ses effusions de sang entre les agresseurs militaires d'Europe et les peuples autochtones». Il a même ajouté que «les Amérindiens sont les Na'vi, ce n'est pas censé être subtil». Le fait de ne pas avoir de casting honorant cette origine représente donc pour Yuè Begay, paradoxalement, une forme de colonisation.
Mais ce n'est par l'unique point qui la contrarie. Il y a aussi ce que le réalisateur a déclaré au Guardian en 2010 lors d'une visite au peuple brésilien Xingu. Il confirmait alors la source d'inspiration qu'ont été les communautés amérindiennes pour son film et ajoute un commentaire plus spécifique sur les Lakotas, présents aujourd'hui dans le Dakota. «Cela a été une force motrice pour moi dans l'écriture d'Avatar. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que s'ils [les Lakota Sioux] avaient eu une fenêtre temporelle pour voir l'avenir, en constatant que leurs enfants auraient le taux de suicide le plus élevé du pays car étant sans espoir et provenant d'une société sans issue, ils se seraient battus beaucoup plus âprement». Ce point de vue pourrait être pris comme une critique de la société moderne individualiste mais pour certains Amérindiens, décrire leur communauté comme «une société sans issue», ça ne passe pas, d'où l'appel au boycott.
Enfin, dernier problème que cite Yuè Begay: le «Blueface» («visage bleu»). Selon elle, le fait de dépeindre la culture amérindienne sous les traits d'extraterrestres bleus, cela revient là aussi à de l'appropriation culturelle, un peu comme le serait le «Blackface» pour les personnes d'origine subsaharienne.
Les Amérindiens entre anti- et pro-Avatar
Après cet appel au boycott, plusieurs médias américains ont relayé le message de Yuè Begay et de nombreux Amérindiens ont tenu à réagir. Certains la rejoignent, comme Autumn Asher BlackDeer, professeur adjoint à la Graduate School of Social Work de l'Université de Denver. «Pourquoi regarder un film ridicule sur les extraterrestres bleus alors que vous pourriez simplement soutenir de vrais peuples autochtones et notre lutte pour l'eau potable ici sur Terre ?», juge-t-elle.
D'autres sont d'un avis contraire. C'est le cas d'un «Native» (un «Amérindien», selon le terme couramment utilisé en anglais) cité par le magazine Newsweek. Selon lui, le principal est est le film soit assez puissant pour que «le grand public avale la pilule des débats autour de la colonisation». Un autre homme, dénommé Marquistador Franco sur Instagram et lui aussi «Native», appelle également à ne pas boycotter, en estimant que cela aide à pointer les «douleurs et souffrances» dont ont été victimes les Amérindiens.
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En attendant, boycott ou pas, Avatar 2 est déjà un succès au cinéma. Après une semaine de diffusion dans les salles, il a déjà dépassé la barre des 600 millions de dollars de revenus. Il s'agit du 11 plus grand démarrage de tous les temps.