Je verrai toujours vos visages, Air, Super Mario Bros... Les films à ne pas manquer (ou à éviter) au cinéma

La rédaction a sélectionné pour vous les nouveaux films à ne pas manquer... ou à éviter cette semaine au cinéma.

je verrai toujours vos visages
© Prod.

Je verrai toujours vos visages

Après Pupille, la cinéaste Jeanne Herry cherchait un nouveau sujet quand elle est tombée sur un podcast sur la justice restauratrice. Elle a très vite décidé de consacrer un film à cette justice qui tente de donner, par le dialogue, une seconde chance non seulement aux détenus mais aussi aux victimes. “Ces dispositifs aident à la réparation des gens, explique la cinéaste. Ça me touche beaucoup. Je nous trouve tous collectivement assez fracturés, la société est particulièrement déchirée en ce moment. Pas que socialement, sociétalement aussi. En recréant du dialogue, en faisant tomber les peurs, en progressant dans la compréhension de l’autre, ça fait beaucoup de bien à une époque qui ne valorise pas beaucoup ces valeurs.

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Son film met en scène deux dispositifs. L’un confronte, au sein même de la prison, des détenus à des victimes d’agression qui n’arrivent pas à se reconstruire. L’autre permet à Chloé (Adèle Exarchopoulos) de mettre sur pied, grâce à une médiatrice, une rencontre avec son frère qui l’a violée pendant des années et dont la peine vient de se terminer. “La justice pénale a ses limites. Elle met de l’ordre dans la société. C’est nécessaire mais ça ne suffit pas à responsabiliser les auteurs. Les chiffres de la récidive sont vraiment terribles. Pour les victimes, il y a les associations d’aide aux victimes mais elles sont peu nombreuses à frapper à leur porte. Les victimes qui n’arrivent pas à tourner la page, comment font-elles? C’est comme s’il existait deux marginalisations. Il y a ceux qui sont enfermés en prison, marginalisés de la société, et puis les autres qui sont enfermés avec leur souffrance. L’idée, c’est de les remettre dans l’action. Et ça marche! Je n’ai pas enjolivé ce qui se passe dans ces réunions. Des mécanismes se mettent en place, comme la reconnaissance de la souffrance des victimes par les auteurs. Une reconnaissance de l’humanité des uns et des autres.

Grâce à son film, qui ne fait ni dans l’angélisme ni dans la facilité, un coup de projecteur éclaire cette justice dont les médias parlent peu. “Il y a quelque chose qui va à l’encontre de beaucoup d’idées préconçues. On préfère séparer le couple pénal plutôt que de le remettre en lien, on ne se dit pas que des auteurs peuvent aider des victimes et inversement. Il manque une volonté politique pour que cela prenne. Ça ne va pas remplacer la justice, ce sont des outils en plus. Mais on pourrait les utiliser davantage, ça nous ferait du bien.” - E.R.

Retrouvez notre décryptage sur la justice réparatrice, un dispositif méconnu et pourtant essentiel dans notre nouveau numéro

**** Réalisé par Jeanne Herry. Avec Adèle Exarchopoulos, Leila Bekhti, Miou Miou - 120’.

Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan

Des espions et des complots, les guerres de religion qui menacent le royaume de France. Des mousquetaires venus de Gascogne pour protéger Louis XIII des intrigues du cardinal de Richelieu et de l’insaisissable Milady… Le monument littéraire d’Alexandre Dumas forme le cœur de ce diptyque signé Martin Bourboulon - l’homme derrière Eiffel. Avec ses 72 millions de budget, 27 semaines de tournage, deux équipes de montage et deux sorties - D’Artagnan ce 5 avril et Milady le 13 décembre -, la plus grosse production française de 2023 entend rivaliser avec les blockbusters américains. Sous ses airs de “reconquête”(comme le titrait maladroitement la couverture du Film français en oubliant son casting féminin), le premier volet tient ses promesses. Moins arty que La reine Margot, lorgnant vers le panache d’un Cyrano de Bergerac (François Civil et Vincent Cassel bouffent l’écran), le film fait la part belle à l’action avec des scènes de baston immersives. Le romanesque appuie le propos notamment grâce à Eva Green en Milady, Vicky Krieps en Anne d’Autriche et Lyna Khoudri en lingère amoureuse de d’Artagnan. - J.G.

Retrouvez notre rencontre avec le casting : "Ces Trois Mousquetaires n’ont rien à envier aux super-héros américains" dans notre nouveau numéro


*** Réalisé par Martin Bourboulon. Avec François Civil, Vincent Cassel, Eva Green - 121’.

La femme de Tchaïkovski

"Depuis le premier jour je n’ai qu’une envie, vous embrasser et vivre à vos côtés." C’est ce qu’on appelle se jeter dans la gueule du loup. Par le biais tourmenté de la femme du compositeur russe que Serebrennikov choisit d’éclairer la vie de Piotr Tchaïkovski. Interdit en Russie parce qu’il aborde l’homosexualité de l’auteur du Lac des cygnes, le film est un coup de canif dans le panthéon des grands auteurs russes. Reposant beaucoup sur l’extraordinaire cinégénie de son actrice Alyona Mikhailova, il évoque le Vincere de Marco Bellocchio qui racontait Mussolini à travers l’amour fou que lui portrait sa première maîtresse. Serebrennikov dissèque l’obsession amoureuse jusqu’au délire et livre en creux une critique de son propre pays, dressant un parallèle entre la condition des femmes au XIXe et celui des homosexuels dans la Russie actuelle. - J.G.


**** Réalisé par Kirill Serebrennikov. Avec Alyona Mikhailova, Odin - 143’.

Super Mario Bros.

En 1993, le célèbre plombier moustachu de Nintendo débarque pour la première fois sur grand écran, avec une adaptation live calamiteuse dans laquelle se sont perdus de grands acteurs comme Bob Hoskins, John Leguizamo et Dennis Hopper (qui incarne un Bowser qu’on qualifierait de nos jours de cringe). L’échec critique et commercial est tellement cuisant que Nintendo se tiendra à l’écart du cinéma jusqu’en 2019, date de sortie du sympathique Détective Pikachu. 30 ans plus tard (à un mois près !), Mario est enfin de retour, toujours accompagné de son frère Luigi, dans une aventure animée signée Illumination. C’est en effet au studio des Minions et de Tous en scène que revient la lourde tâche de transposer une nouvelle fois l’univers des (nombreux) jeux vidéo de la franchise Super Mario, en faisant à la fois oublier la catastrophe de 1993, tout en étant au minimum à la hauteur des récentes adaptations réussies comme SonicUncharted, ou The Last of Us en télévision. Autant dire que le défi est de taille.

Bonne nouvelle, le défi est relevé haut la main ! Si vous avez déjà joué ne serait-ce qu’une seule fois à un jeu Super Mario, il vous sera difficile de résister au charme de ce film très coloré et sans temps morts. Véritable lettre d’amour à la franchise, Super Mario Bros. Le Film déborde de clins d’œil plus ou moins appuyés à l’univers du jeu, son passé, ses personnages, ses lieux mythiques et son manque assumé de cohésion. Car depuis ses débuts en 1981 (dans le jeu Donkey Kong), Mario a été à la fois plombier, docteur, sportif de haut niveau, combattant (dans la série des Super Smash Bros.) ou encore pilote de kart. Autant dire qu’il était impossible de tout résumer et tout expliquer en 90 minutes seulement. Le film, réalisé par Aaron Horvath et Michael Jelenic, se concentre donc sur les bases, mais s’autorise quelques explications rationnelles (mais d’où vient cet accent italien, et puis quel plombier travaille avec des gants blancs ?) qui feront sourire les fans.

Super Mario Bros. Le Film n’est cependant pas parfait. Si, en tant qu’objet de pop culture, Illumination remplit sa mission, on ne peut pas en dire autant du scénario, banal et trop prévisible. Là où un film comme La Grande Aventure Lego cochait toutes les cases (drôle, surprenant, respectueux des fans, malin et visuellement très réussi), ici on est face à une aventure sans trop de saveurs. Ce sont certes les personnages et l’univers qui fait tout le sel du film, mais un peu plus de folie et de créativité n’aurait pas fait de mal. Croisons les doigts pour une (ou plusieurs) suites encore plus folles. - A.M.

*** Réalisé par Aaron Horvath et Michael Jelenic. Avec Chris Pratt, Anya Taylor-Joy, Jack Black - 92'.

Air

Au début des années 80, la firme Nike est à la traîne, loin derrière Converse et Adidas. Sonny Vaccaro (Matt Damon, en pleine forme), directeur du marketing sportif, veut frapper un grand coup en cherchant à conclure un partenariat avec un jeune basketteur prometteur: Michael Jordan. Cette évocation réussie retrace le parcours opiniâtre d’un homme qui va révolutionner son domaine en lançant les Air Jordan, baskets fabriquées sur mesure pour le futur plus grand joueur de la NBA. Le rêve américain n’est décidément pas mort - le fameux I have a dream de Martin Luther King est même cité dans le film! - dans cette reconstitution d’époque plaisante qui prend soin de ne pas écorner le mythe. - O.C.


** Réalisé par Ben Affleck. Avec Matt Damon, Ben Affleck - 112’.

Normale

Il manque parfois un je-ne-sais-quoi pour qu’un film décolle. Normale ne manque ni d’une thématique intéressante (c’est quoi, être normal?), ni de personnages attachants mais le réalisateur de Poissonsexe (2020) peine à trouver l’étincelle. Lucie (Justine Lacroix), ado à qui il manque un petit je-ne-sais-quoi pour que les garçons tombent à ses pieds, vit avec son père William (Poelvoorde en roue libre), un veuf atteint de sclérose en plaques. À l’annonce de la visite d’une assistante sociale, ce drôle de couple tente de se reprendre en main. Normale est traversé par une poésie maladroite qui ne prend jamais son envol tant le récit reste coincé dans une narration trop classique. - E.R.


** Réalisé par Olivier Babinet. Avec Benoît Poelvoorde, Justine Lacroix, Steve Tientcheu - 87’.

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