
L'improbable voyage d'Harold Fry, Boogeyman, A Good Person... Les films à ne pas manquer (ou à éviter) cette semaine

Sur l'Adamant ***
À bord de l’Adamant qu’il fréquente le jour tout en prenant ses médicaments pour ne pas “se prendre pour Jésus”, François chante La bombe humaine de Téléphone, la main sur le cœur. Dès les premières secondes, on est touché. Sans regard surplombant ni voix off, Nicolas Philibert explore la psychiatrie avec ce documentaire tourné sur une péniche. On y croise patients et soignants, passagers éphémères d’un lieu hors norme. On y entend Pascal qui vient y prendre un café quand ses “voix” le laissent tranquille dans sa tête; Muriel qui aide à l’ordre du jour et fait les comptes avec l’équipe. Olivier, défiguré par les tics nerveux, père de deux filles qu’il a dessinées avec soin à l’atelier peinture; Frédéric, patient érudit qui se prend pour Van Gogh car en se mettant “dans la peau d’un autre, on croit qu’on va s’en sortir”. Avec un infini respect, Philibert ouvre les fictions permanentes que recèle la folie et nous tend un miroir - poignant et empathique. - J.G.
La lecture de votre article continue ci-dessous
Retrouvez notre rencontre avec Nicolas Philibert: "Filmer en psychiatrie, c'est ouvrir des boîtes à histoires"
Réalisé par Nicolas Philibert. Avec la complicité de Linda de Zitter - 109’.
L'improbable voyage d'Harold Fry ***
Il arrive toujours un moment où l’on se demande ce que l’on a fait de sa vie. Pour Harold Fry, retraité dont tous les jours se ressemblent auprès d’une épouse qu’il aime profondément, ce moment survient lorsqu’une vieille connaissance, Queenie, lui fait ses adieux dans une lettre où elle lui annonce qu’elle est atteinte d’un cancer. Qui est-elle et que représente-t-elle pour Harold? Une illumination lui dicte de traverser le pays à pied pour aller la voir, persuadé que cette longue marche de plus de 700 kilomètres la sauvera. Rattrapé par les réseaux sociaux et l’info continue, Harold va devenir un symbole de plus en plus médiatique. Adapté d’un roman de Rachel Joyce paru en 2012, L’improbable voyage d’Harold Fry n’évite pas les pièges que génèrent les discours sur les bilans existentiels, avec leur lot de sentiments parfois un peu mièvres. Le film vaut surtout pour la prestation de Jim Broadbent (Horace Slughorn dans la saga Harry Potter), dont le regard bleu clair ressemble à celui d’un enfant qui découvrirait le sens de la vie. - E.R.
Réalisé par Hettie MacDonald. Avec Jim Broadbent, Penelope Wilton - 108’.
The Boogeyman **
Parue en 1973 dans une revue, puis en 1978 dans le recueil Night Shift, la nouvelle de Stephen King The Boogeyman n’a bizarrement jamais fait l’objet d’un long-métrage. C’est chose faite aujourd’hui et c’est plutôt une bonne surprise. Comme il n’y est question ni de fantôme, ni de maison hantée, mais d’un monstre qui n’attaque que les êtres qui sont dans la faiblesse ou dans la peur, Rob Savage (Host en 2020) met surtout en scène nos frayeurs intérieures. Celle du noir ou de ce qui peut se terrer derrière une porte fermée. Ses effets sont bien dosés. Les personnages sont construits d’une manière telle qu’on pourrait supposer que tout se passe dans leur tête. Comme si les idées noires d’une déprime prenaient soudainement corps. Efficace. - E.R.
Réalisé par Rob Savage. Avec Chris Messina, Sophie Thatcher, David Dastmalchian - 108’.
A Good Person *
Il y a parfois des films où trop d’éléments sonnent faux. Entre le caractère forcé des personnages (Florence Pugh qui en fait des tonnes en addict blessée) et leur âge inadéquat (Morgan Freeman, 85 ans, a plus la stature d’un arrière-grand-père que d’un grand-père qui aurait la garde de sa petite-fille de 15 ans jouée par une actrice de 24), on comprend mal le but de ce film boursouflé signé Zach Braff. À ne pas choisir entre deux drames (l’accident de voiture ou l’addiction), le scénario souffre aussi d’un certain déni face à ses personnages, victimes de leur propre mauvaise foi et auxquels on peine à s’identifier. Dommage. - J.G.
Réalisé par Zach Braff. Avec Florence Pugh, Morgan Freeman, Celeste O’Connor - 125’.