
Anatomie d'une chute, une grande Palme d'or

C'est un tour de force construit en quasi-huis clos entre un chalet à la montagne et une cour d’assises, sur un instrumental du rappeur 50 Cent et un prélude de Chopin. Dès les premières secondes, on est époustouflé par la maîtrise du suspense et de la profondeur de champ. On ne révélera rien en disant que le film s’ouvre sur la découverte d’un corps, celui de Samuel écrasé au bas du chalet, et se déploie à travers la recherche du ou de la coupable. La toute désignée est sa femme, Sandra, écrivaine à succès retirée à la montagne avec lui et leur fils. Tandis que la structure de la maison devient danger et que les personnalités de Sandra et Samuel (Sandra Hüller et Samuel Theis) se découvrent comme des pelures d’oignon. Samuel est d’abord introduit par la musique puis par un sidérant flash-back…
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Le récit se déploie en un extraordinaire film de procès où viennent s’affronter différentes théories politiques sur le couple (est-ce Samuel qui écrase Sandra ou elle qui le manipule?), sous le regard doublement innocent d’un enfant et d’un chien. Avec une maestria inouïe, Justine Triet fait siennes trois grandes références de cinéma: Autopsie d’un meurtre d’Otto Preminger, film de procès culte avec James Stewart, Shining de Stanley Kubrick pour le langage visuel et Scènes de la vie conjugale d’Ingmar Bergman, film-somme sur la double bataille du couple (théorique et pratique) qui lui permet de brasser la rivalité conjugale ou masculinité blessée, prétexte ultime pour entrer dans le cerveau d’une femme et y déjouer nos propres pièges. Anatomie d’une chute est une grande palme d’or.
**** Réalisé par Justine Triet. Avec Sandra Hüller, Samuel Theis - 150’.