
Deux magnifiques expositions à ne pas manquer cet été à Mons

Sur la Grand-Place de Mons, on ne voit d’abord qu’elles. Carlotta, Carla, Laura Asia: trois statues de 7 mètres de haut en fonte, matériau sombre évoquant l’ancienne industrie métallurgique de la région. Les yeux presque fermés, ces dames créées par l’artiste espagnol Jaume Plensa sont alignées face à l’Hôtel de ville. Quasi totémiques, intemporelles et pourtant bien arrimées à la réalité du sol vu leur poids, elles interpellent le passant dans cet espace urbain où Montois et touristes aiment prendre un verre en terrasse. Si les conversations y vont bon train, entre “j’aime ou j’aime pas”, c’est au final la curiosité qui l’emporte. “En fait, nous dit une Montoise entre deux âges habituée à déguster ici son café, je m’habitue et je trouve même cela de plus en plus beau.” Ces trois impressionnantes œuvres, on les commente en famille, entre amis et on va désormais sans réticence sur la Grand-Place revoir Carlotta, Carla et Laura Asia.
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On y admire aussi cette autre sculpture de Plensa ressemblant à un petit pavillon, le White Nomad (2021) dont la toiture est composée de différents alphabets, le tout en acier inoxydable peint en blanc. On est même invité à y entrer, à s’y asseoir et y observer à travers le maillage métallique la Grand-Place, l’Hôtel de ville actuellement bâché pour travaux et même avec un peu de chance le bleu du ciel. Né en 1955 à Barcelone, Jaume Plensa, le créateur de ce cocon avoue qu’enfant, il aimait, lui, se réfugier à l’intérieur du piano droit de son père.
Une pensée pour le silence
Depuis, ce sculpteur, dessinateur et graveur a fait du chemin et l’on croise ses œuvres à Antibes, à Londres, à Chicago ou dans le New Jersey. Et aussi à Mons, donc, où le BAM étant fermé pour rénovation, son directeur Xavier Roland, commissaire de cette expo, nous invite à (re)découvrir via le regard de Plensa “la part du sacré” des lieux les plus emblématiques de la cité du Doudou.
À la salle Saint-Georges, ancienne chapelle du XVIIe siècle aujourd’hui désacralisée, l’artiste catalan a installé six œuvres. Des yeux clos, des visages allongés, des traits stylisés. Dans l’ancien chœur, une sculpture en bronze, Cristina’s Words (2021), est comme en lévitation. Les doigts sur les lèvres, elle nous demande de garder le silence. Un lieu où souffle l’esprit. Autre espace investi par Plensa, le Jardin du Mayeur. Assis sur une pelouse, non loin du Musée du Doudou, sept personnages sont enchaînés à un arbre. Dans cette œuvre intitulée The Heart Of Trees (“Le cœur des arbres”), ils portent sur le dos les noms gravés de compositeurs. L’arbre finira-t-il par briser leur chaîne? Ou par étouffer au contraire en eux toute velleité de création?
Incontournable dans ce parcours, une étape à la collégiale Sainte-Waudru. Sous l’intitulé Les invisibles, les visages fragiles de Plensa, lovés dans des albâtres translucides, entrent en dialogue avec les sculptures du Montois Jacques Dubroeucq, maître artiste de Charles Quint et un des plus grands sculpteurs de la Renaissance dans les Pays-Bas méridionaux. Mais c’est la double sculpture de Plensa, tout en acier léger et suspendue au centre de la nef qui intrigue le plus le visiteur. L’installation semble flotter dans l’espace. Déconcertante à prime abord, elle ne prend tout son sens que vue depuis les bas- côtés. L’on y devine alors deux profils et un doigt sur les lèvres nous incitant au silence. Plensa aime, paraît-il, citer la phrase du poète anglais William Blake: “Une pensée et l’immensité est emplie”.
JAUME PLENSA. LA PART DU SACRÉ, jusqu’au 8/10. Dans divers lieux de Mons. Info: Visit Mons, Grand-Place 27. 00.32.65.33.55.80. www.visitmons.be

© Thierry Suzan
Thierry Suzan: La beauté sauvera le monde
De Sainte-Waudru au Beffroi de Mons inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, le chemin est court. L’occasion d’aller y découvrir en plein air les clichés grand format du reporter-photographe français Thierry Suzan œuvrant pour le National Geographic, Geo ou le New York Times. L’on reste sans voix devant par exemple ce magnifique geste du Pêcheur à l’épervier au Viêtnam ou encore devant ces Femmes Himbas arpentant fièrement le désert de Namibie. Soit 60 sites reconnus par l’Unesco. Sensible aux enjeux environnementaux et pourtant optimiste, Thierry Suzan nous rappelle que ces joyaux méritent d’être préservés pour les générations futures. Pour cette expo, il a aussi photographié le patrimoine Unesco montois (le Beffroi, les minières de silex de Spiennes, le Doudou...). L’occasion de rafraîchir notre regard sur ce que, à force d’avoir le nez dessus, l’on ne voit plus.
Jusqu’au 29/10. Parc du Beffroi et Maison des patrimoines Unesco, rue des Clercs 32, 7009 Mons. www.beffroi.mons.be