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Frédéric Beigbeder
Frédéric Beigbeder. © BelgaImage

Un barrage contre l'Atlantique

Sorte de saison 2 d’Un roman français (prix Renaudot en 2009), Un barrage contre l’Atlantique poursuit et précise l’autoportrait d’un auteur qui succombe à la mélancolie et, face au monde tel qu’il est, fonce retrouver son adolescence. D’où vient Frédéric Beigbeder, ce fils de bourgeois divorcés, purs produits de la révolution sexuelle des années 60, ce jeune mondain ­autoproclamé génie superficiel, vous le saurez en plongeant dans ce livre où on croise un homme mal dans son époque. “Il est impossible d’être bien  dans cette époque, il y a trop de choses trop contrôlées et interdites, ­commente-t-il. Je ne suis plus compétent pour vivre aujourd’hui, je suis un vieux dinosaure et tous les écrivains que j’aime sont morts à 46 ans - donc je ne sais pas ce que je fais là. Mais si je suis écrivain, c’est parce que je ne suis pas sur les réseaux sociaux.

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À l’écart d’un univers qui fut le sien pendant longtemps (la nuit, Paris, les carrés VIP, la cocaïne), ­Beigbeder, qui vit désormais à Guéthary dans les Pyrénées-Atlantiques, a profité du lockdown pour mettre de l’ordre dans les papiers de sa mémoire. “Durant le premier confinement, je tournais en rond chez moi, j’étais assez insupportable et ma femme m’a dit de dégager. Je me suis retrouvé seul, hébergé par un copain au cap Ferret et à 55 ans, dans un monde à l’arrêt, je me suis demandé ce qui restait de ma vie, qu’est-ce qui surnageait à la surface de la mémoire.” Après un long préambule où il aligne des phrases en imitant la forme du tweet et en traquant la punchline, il se raconte - encore - au risque de passer pour le nombril du monde.  “La confession est un genre très français, mais dangereux - j’ai l’impression d’être baladé tout nu dans la rue avec des gens qui me montrent du doigt en riant. Beaucoup de mes livres sont intimes, mais je n’arrive pas à écrire autrement, et je suis obligé d’accepter cette situation de danger.

Il raconte (entre autres) la période déjantée où il ­fréquente Laura Smet et cette anecdote où, avec Ludivine Sagnier invitée dans une chambre d’hôtel, il se cache nu dans un placard en espérant un plan à trois. “C’était au festival de Cannes en 2005 et je ne sais pas si ce serait bien perçu aujourd’hui. Je pense que c’est passible de cancelisation - aux États-Unis, quelqu’un qui fait ça peut tout perdre”, conclut-il. Classé “roman”, Un barrage contre l’Atlantique (clin d’œil à Duras et à Un ­barrage contre le Pacifique) est un livre vitrine où l’on voit se refléter celui qui l’a écrit. - S.M.

Un barrage contre l'Atlantique

** Un barrage contre l'Atlantique par Frédéric Beigbeder. Grasset, 264 p. 

La tombe des Wisigoths

Dans une sépulture antique, on découvre un cadavre bien trop récent pour ne pas attirer l’attention de la police et de Nadia, la narratrice. Mais le cœur du livre bat ailleurs, Entre Buendia, un village de Castille et Alger (son sous-titre). L’enquête traverse en effet 100 ans d’histoires familiales inscrites dans le grand récit du siècle, d’une Espagne encore féodale en 1908 à la Movida des 80’s, trois ans d’une fête permanente pour sortir des quatre décennies de dictature. En 36, dans le déchirement de la guerre civile, les Montal qui ont rêvé de République et d’Internationale socialiste doivent fuir Alicante encerclée sur un des derniers bateaux pour Alger. Là-bas, la vie reprend, une nouvelle génération naît et devient française. Arrivent les «événements d’Algérie», les attentats, la torture, la guerre. Et pourtant, au début de l’indépendance, une réconciliation semble possible. Valérian n’a pas vingt ans, il dirige La Croix du Sud, une librairie d’une modernité inédite, il rencontre Nadia…

L’originalité du livre est dans ce parcours vrai, lacunaire et fascinant comme ces souvenirs qui se transmettent sans qu’on n’ose poser trop de questions. On pourrait d’ailleurs s’interroger longuement sur Rafa Soler, le père-copain de Valérian, éternel séducteur, soldat antifranquiste qui, probablement, fut ensuite un membre actif de l’OAS française, puis resta aussi paisiblement et longtemps que possible sur «sa» terre désormais algérienne… - J.-L. C.

Rencontre le 17/02 à 18h chez Filigranes, 39 Av des Arts 1040 BXL

La tombe des Wisigoths

** La tombe des Wisigoths par Stéphanie Ter Meeren. Vérone Editions, 208p.

Melvile

En 2013, Romain Renard racontait dans un roman graphique l’histoire d’un écrivain revenant dans le bled de son enfance pour tenter de recoller les morceaux de sa vie. Ces quelque cent trente pages posaient les fondations de ce qui deviendra au fil des années l’œuvre qui le transformerait en auteur, un vrai. Deux tomes, pas loin de mille pages et près de dix ans plus tard, la mue a pris place. Renard vient de sortir une perle narrative. Apposant un point (peut-être pas final) à sa saga. L’histoire de Ruth Jacob, une jeune femme disparue dont le journal intime va révéler bien des choses sur la petite ville et les destins tragiques des personnages des tomes précédents. Ce hameau est l’outil narratif dont Renard avait besoin pour déployer ses intrigues. Ces fils qu’il tisse et entremêle sur les supports qu’il ­affectionne: roman graphique, recueil de chroniques, morceaux de musique, et film en devenir. Le tout réuni dans une arborescence complexe. “Avant, j’étais dans le doute et la peur de ne pas être à ma place. J’invitais mon père dans la BD (Claude Renard est une des figures emblématiques de la BD belge), c’était une façon de lui demander l’autorisation de jouer sur son terrain.” En dix ans, Renard a perdu son père, en est devenu un lui-même, et a accouché d’une œuvre, sur un ­terrain qui semble lui convenir.  “Je suis conscient et heureux d’avoir été au bout du truc!” - J.-M.P.

Melvile

**** Melvile - L’histoire de Ruth Jacob par Romain Renard. Le Lombard, 400 p.

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