
Cet homme est le meilleur ami des arbres

Il a un look passe-partout – entre randonneur et touriste ordinaire. Et pourtant, cet homme est une star mondiale. Ingénieur de formation, forestier engagé, Peter Wohlleben (58 ans) est un homme qui milite pour le respect des forêts et une meilleure compréhension de leur écosystème. Traduit en trente-deux langues (le livre est paru en 2015 en allemand, en 2017 en français), La vie secrète des arbres a dépassé depuis longtemps la barre du million d’exemplaires vendus et converti autant d’adeptes à sa bonne parole porteuse d’espoir et de bienveillance. Le livre, qui a sensibilisé le public à la question forestière et l’a familiarisé au réseau de communication qui relie les arbres, n’a pas manqué de susciter les commentaires de scientifiques, soucieux de préciser les préceptes avancés et vulgarisés par Wohlleben.
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Mais La vie secrète des arbres a provoqué une telle émotion chez ses lecteurs qu’ils en sont désormais convaincus: pour sauver la planète, il faut sauver les arbres. Du succès international qui lui a offert une tribune immense et une renommée de vedette écolo, Peter Wohlleben est le premier étonné. “Au début, je n’y croyais pas, explique-t-il, l’intérêt pour les arbres était plus grand que je ne l’imaginais. Après, je me suis demandé ce qu’il fallait faire avec ce succès et donc nous avons fondé la Forest Academy qui tente d’informer les propriétaires de forêts, les enfants, les écoles car nous voulons ramener le succès du livre vers les gens.” Il est désormais à la tête d’une petite entreprise qui fait fructifier les droits de ses ouvrages (La vie secrète des arbres a fait l’objet d’un documentaire), même s’il avoue être “pas très bon en négociations”, précisant : “Si cela ne tenait qu’à moi, tout le monde pourrait faire tout ce qu’il veut avec mes livres.”
À quoi les arbres nous sont utiles ?
Dans son nouveau livre – La promesse des arbres, il poursuit son travail pédagogique sur la vie des forêts et la nécessité de les protéger. Des promesses qui – “si on les laisse faire” – mettraient les arbres au centre d’un processus de régulation des températures. “Les arbres nous ont été utiles, jadis, pour construire des charpentes, aujourd’hui, la chose la plus importante concernant les arbres c’est qu’ils peuvent nous aider à réguler le climat local.” Peter Wohlleben insiste également sur les énormes bienfaits psychologiques que les arbres peuvent nous procurer dans cette vie agitée et accidentée qui est la nôtre.
“Les arbres sont utiles à notre santé mentale, ils nous servent à encadrer nos émotions, poursuit-il. Nous vivons dans un monde où les mauvaises nouvelles s’enchaînent, les gens ont besoin d’espaces pour relaxer leur esprit. Pour conserver cette santé mentale, nous devons donc conserver les forêts intactes car beaucoup d’endroits sont abîmés par l’industrie forestière.” Et lorsqu’on lui demande ce qu’il faut faire pour prendre soin de la forêt, sa réponse est claire: “ Rien. Nous n’avons rien à faire si ce n’est lever nos mains…” Et de poursuivre: “C’est difficile à comprendre car beaucoup de gens veulent être actifs, veulent planter des arbres alors que la nature est active par elle-même dans un processus où n’intervient pas l’influence humaine.”
La nature devant notre porte
Dans son livre, Peter Wohlleben décrit le réseau qui relie les arbres comme le ciment qui unit les clans. “Les arbres fonctionnent comme une grande communauté, ils travaillent ensemble, précise-t-il. On sait que les arbres sont des concurrents, ils se battent pour la lumière, pour l’eau, pour l’espace et pourtant ils sont très coopératifs. Ils partagent notamment des méthodes de nutrition à travers leurs racines qui sont connectées, ils s’avertissent face à des attaques d’insectes… “
Des paroles qui font se croiser écologie et poésie, un mix qui n’est sans doute pas innocent dans le succès et l’audience de cet homme dont François Busnel de La grande librairie a dit qu’il est “ un véritable écrivain.” Certains affirment qu’il est surtout le meilleur ami des arbres, militant à l’éveil des consciences. “Qu’autant de gens s’intéressent aux arbres, conclut-il, cela signifie que nous sommes sur le bon chemin, même s’il est peut-être un peu lent, on pourrait y aller un peu plus vite. Mais je suis plutôt optimiste quand je vois la prise de conscience à propos de la protection de la nature. La nature qu’il faut protéger, non seulement dans les pays lointains, mais aussi devant notre porte”
La promesse des arbres, Peter Wohlleben, Les Arènes, 275 p.