
Loyle Carner: le poète du flow

Comme sortis d’un bus rouge à deux étages, les mots de Loyle Carner carburent à l’accent cockney. À 24 ans, le Londonien expose sa vision du hip-hop à l’aune de sa propre vie. Son nom de scène, déjà, est un clin d’œil à son rapport à la dyslexie. Né Benjamin Coyle-Larner, l’artiste s’est inventé un alter ego en mélangeant les lettres de son patronyme. “Aujourd’hui encore, je souffre de troubles de la lecture, confie-t-il. Mais quand j’écris mes textes, c’est différent. Je suis dans ma bulle. Dans cette zone de confort, je suis épargné par la maladie. Sans doute parce que je ne respecte ni les règles grammaticales ni les codes du langage…”
La lecture de votre article continue ci-dessous
Loin des clichés associés au rap, Loyle Carner brille, dès 2017, avec “Yesterday’s Gone”, premier album en forme de journal intime, plébiscité par le public et la critique. De retour avec “Not Waving, But Drowning”, il campe sur ses positions en adressant, d’entrée de jeu, une lettre à sa mère. “Dans Dear Jean, je lui explique que je vais quitter la maison parce que j’ai rencontré l’amour de ma vie.” Premier single du disque, Ottolenghi se joue en compagnie de l’ami Jordan Rakei. “Yotam Ottolenghi est un maître de la gastronomie, explique Loyle Carner. Il a écrit un livre intitulé Jérusalem dans lequel il associe son goût de la cuisine à ses souvenirs d’enfance. Un jour, je lisais ce bouquin dans le train quand un mec a fustigé ma “lecture religieuse”. La chanson revient sur ce malentendu, pas sur les bonnes recettes d’Ottolenghi.” Côté cuisine, pourtant, Loyle Carner en connaît un rayon. Dernièrement, il mélangeait ainsi dinde et mozzarella en vue de commercialiser sa propre pizza. “La vente de cette création m’a permis de financer une école de cuisine destinée aux enfants souffrant d’un déficit de l’attention. Je suis passé par là quand j’étais gamin. Pour me soigner, j’ai trouvé deux remèdes: la cuisine et la musique.”
Le nouvel album s’intitule “Not Waving, But Drowning”. “C’est aussi le titre d’un poème de Stevie Smith. En 1957, elle a écrit l’histoire d’un homme qui se noie suite à la mauvaise interprétation de ses signaux de détresse. Je me suis retrouvé dans cette image. Pendant l’enregistrement, les gens avaient l’impression que tout roulait pour moi. Alors que, dans les faits, j’avais l’impression de me noyer dans un océan d’idées…” Finalement, Loyle Carner a parfaitement surmonté ses doutes. Rien que ses duos avec Sampha (Desoleil) et Jorja Smith (Loose Ends) font la différence.
Le 15/5. Botanique, Bruxelles. Complet.
Le 16/8. Pukkelpop, Kiewit.
Cet article est issu de notre magazine papier. Pour plus d'infos qui piquent, rendez-vous en librairie à partir de ce mercredi ou dès maintenant sur notre édition numérique, sur iPad/iPhone et Android.