
Rammstein au stade roi Baudouin: explosions et loi du silence
Dans la tourmente après les accusations d’abus sexuels portées par plusieurs victimes présumées à l’encontre de son chanteur Till Lindemann, 60 ans, et en attendant les résultats d’une enquête officielle ouverte en juin par le parquet de Berlin, le groupe allemand Rammstein conclut sa tournée mondiale No Zeit To Lose à Bruxelles comme si de rien n’était. Ce jeudi 3 août, la formation aux vingt millions d’ albums vendus donnait le premier de ses trois concerts complets devant 50.000 personnes au stade roi Baudouin. Un show époustouflant, spectaculaire et explosif, où il a malgré tout manqué, ça et là, d'étincelles.
Des fans et des femmes

Concert Rammstein Stade Roi Baudouin Bruxelles 2023 Jean-Luc Flémalle.
Dans plusieurs villes européennes où Rammstein s’est produit ces deux derniers mois, il y a eu des appels au boycott et des manifestations de collectifs de soutien aux victimes présumées. Le 7 juillet, à Groningen, des militants environnementaux ont même essayé d’interdire - sans succès - leur concert au double motif de "pollution sonore et usage excessif de pyrotechnie". Chez nous, rien de tout ça. Nous avons fait le tour du stade du Centenaire ce jeudi sans entendre la moindre récrimination, sans voir le moindre signe de protestation ou la moindre banderole #MeToo. Même la pluie, qu’on annonçait partout à grands coups de communiqués plus menaçants les uns que les autres, ne s’est pas invitée.
Le public de Rammstein? Des hommes et des femmes, des jeunes et des vieux, des vrais fans de metal et des fans du "je dois y être parce que tout le monde en parle et que je dois faire mon malin sur ma page Facebook". Une chose est sûre. Un concert de Rammstein, ce n'est pas un concert. C'est un spectacle. Connu et reconnu pour ses délires pyrotechniques, son sens de la provocation, ses outrances barnumesques et son sens du visuel, le groupe berlinois propose un show total. Et, comme chez Kiss, il a tendance à répéter sans cesse les mêmes gimmicks à chaque tournée. Les fans, du reste, n’attendent pas autre chose. Et pour celles et ceux qui les découvrent pour la première fois sur scène, c’est un truc de ouf.
Chaudron et lance-flammes

Concert Rammstein Stade Roi Baudouin Bruxelles 2023 Jean-Luc Flémalle.
Lancée à 20h30 par un instrumental martial (Music For The Royal Fireworks de Handel), la soirée met du mal à démarrer malgré le missile Links 2-3-4 balancé juste après. La puissance sonore est là. Mais on est comme dans un round d’observation. Il y a des explosions. Les flammes sortent de partout. Les deux guitaristes Paul Landers et Richard Zven. Kruspe envoient du lourd. Du très lourd même. Le bassiste Oliver Riedel fait claquer ses quatre cordes avec une force de frappe inouïe. Christian Flake Lorenz se montre toujours très sportif en jouant des claviers sur son tapis roulant. Quant à Till Lindemann, visage grimé à la suie et habillé en chef d’une guerre apocalyptique, il pousse sa voix de baryton en jouant au maître de cérémonie. Tout ça dans un décor de fin du monde, quelque part entre Mad Max Au-Delà du Dôme du Tonnerre (notre préféré, avec Tina Turner) et Blade Runner (le premier, pas la suite, bien filmée mais mal écrite). Pour ne pas en rajouter une couche, Rammstein a rayé Pussy (chatte), un titre qui était pourtant incontournable de sa setlist. Les plus gros tubes arriveront en seconde moitié du set avec Deutschland, Radio, l’énorme Du Hast et Sonne. Avec Mein Teil, une chanson qui parle de cannibalisme, sonne l’heure du festin. Till Lindemann est maintenant habillé comme un chef étoilé, il met le feu à un chaudron géant et y fait griller son claviériste. Comme ça ne va pas assez vite à son goût, il l’achève au lance-flammes. Du délire.
Grosse artillerie

Concert Rammstein Stade Roi Baudouin Bruxelles 2023. Jean-Luc Flémalle.
Autre grand classique gore à la sauce Rammstein, le berceau avec bambin au visage de monstre, façon Rosemary Baby, qui se fait réduire en cendres sur Puppe. Plus tendre, l’interprétation du joli Engel, avec le duo féminin Abelard qui assure la première partie de toute la tournée. Après cet interlude exécuté sur un petit podium central, les membres du groupe reviennent sur la grande scène dans des canots pneumatiques poussés par les fans. Rammstein porte l’estocade avec l’hymne tout feu tout flamme qui porte son nom (Rammstein) et un Adieu de circonstance. Rammstein ressort l’artillerie ce vendredi 4 et samedi 5 août. A côté de ça, le feu d’artifice du 21 juillet, c’est l’équivalent de trois pétards lancés par des gamins dans un cour de récré.