

En 1997, les Suédois de The Hives débarquent en force avec “Barely Legal”, exceptionnel premier album sorti tout droit de Fagersta, jolie bourgade paisible perdue à deux cents kilomètres de Stockholm, ”un bel endroit, dans un joli cadre naturel, rempli de maisons très moches”, selon Pelle Almqvist. L’énergie surnaturelle du quintette serait-elle liée à l’ennui ressenti par ses membres durant leur adolescence? “Absolument, confirme Almqvist. À part glander ou aller voir un film, il n’y avait pas grand-chose à faire. Faute de mieux, on a passé des années et des dizaines de milliers d’heures à répéter chez nous.”
”Quand nous étions jeunes, poursuit Almqvist, nous sommes descendus sur Stockholm pour voir l’un de nos groupes punk préférés. Mais les mecs jouaient moins vite sur scène que sur leurs disques, ça nous a traumatisés. Alors, on s’est dit que nous, on allait jouer tout trop vite, en accéléré (rire).” L’effet est à ce point galvanisant qu’on retrouve aujourd’hui The Hives sur la playlist “rock’n’run” de Spotify, conçue pour les amateurs de footing! De quoi provoquer quelques infarctus aux malheureux qui tentent de s’aligner sur le tempo. Dix ans après avoir sorti leur dernier album, le groupe livre “The Death Of Randy Fitzsimmons”. Dès 1997, Randy Fitzsimmons, présenté comme “le sixième membre du groupe” est crédité pour tout: musique, paroles, création. C’est lui qui aurait réuni les cinq garçons en 1993 pour leur proposer un projet “machiavélique”, dont il aurait tiré les ficelles jusqu’ici, sans jamais apparaître en public.
”Nous étions jeunes et naïfs, commente Almqvist, qui ne lâche pas l’affaire. Randy nous a choisis, formés. Il nous a appris tout ce que l’on sait. Vous ne le voyez pas sur scène, mais c’est notre créateur.” Quand un journaliste suédois remonte le fil via les déclarations fiscales de Randy Fitzsimmons et que celles-ci mènent au guitariste du groupe - Niklas -, les Hives n’en démordent pas. “Si vous voulez demeurer dans l’anonymat, ce qui est le cas de Randy, poursuit Pelle Almqvist, vous ne vous faites pas bêtement avoir par votre déclaration fiscale. Vous la mettez au nom de quelqu’un d’autre.” Pas la peine d’essayer de le piéger en lui demandant comment le groupe a travaillé sur ce dernier album. “Je ne sais pas, il faut demander à Randy”, qui vient en théorie de passer de vie à trépas.
Comme toujours, les deux titres les plus explosifs (Bogus Operandi et Trapdoor Solution) sont proposés d’entrée de jeu, mais le reste fait tout autant le travail. “On a attendu dix ans, explique Almqvist. Quand s’est posée la question de savoir si on devait revenir avec quelque chose de plus mature, la réponse était toute trouvée: “non”. Alors on a remis un petit coup de rock’n’roll. Notre réflexe naturel, c’est d’y aller à fond tout le temps. On sait qu’on doit parfois proposer autre chose que des attaques punk de deux minutes, mais ça reste un challenge sur chaque disque. On s’est amusés à placer une plage instrumentale sur “Barely Legal”, la reprise d’une ballade soul sur “Veni Vidi Vicious”. Je vois un peu ça comme les veloutés de tomate bizarres qu’on sert au restaurant entre les plats. C’est étrange, mais ça vous permet de profiter totalement du reste du repas.”
Le 27/9, Ancienne Belgique (complet).