
Aung San Suu Kyi, un rêve birman

Comme on s'y attendait, elle est frêle, parle un anglais frôlant la perfection, soupèse chacune de ses phrases à la façon du plus pointilleux des marchands de thé et dégage un optimisme presque communicatif.
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Ces dernières années, Aung San Suu Kyi, ex-résidente surveillée la plus célèbre de la planète, a pleinement joué son rôle dans les mutations, encore timides, de la Birmanie. Face à la journaliste Manon Loizeau, celle qui a reçu le prix Nobel de la paix en 1991 dresse les pourtours de l'avenir de son pays dans Un rêve birman.
Sans jamais élever un mot plus haut que l'autre, ou laisser échapper une once de dépit. Même pas pour avoir choisi son pays plutôt que sa famille. Son mari, Michael Aris, un spécialiste du Bhoutan, du Tibet et de l'Himalaya, est mort en 1999 sans qu'elle ait pu le revoir. Mais la dame de Rangoon ne nourrit aucun regret, car le bouddhisme indique que ce genre de sentiment "empêche d'aller de l'avant".
Se prenant au mot, elle va de l'avant. Lors des élections législatives partielles birmanes de 2012, Aung San Suu Kyi rafle plus de 80 % des voix dans sa circonscription, et son parti, la Ligue nationale pour la démocratie, glane 43 sièges sur 46.
Pour la population, c'est une évidence: la prochaine présidente, si l'ouverture démocratique s'intensifie, ce sera elle. Aujourd'hui, pourtant, les militaires gardent un contrôle complet sur l'appareil étatique. De passage à Naypyidaw, capitale ubuesque semblable à Pyongyang, Manon Loizeau dévoile la réalité sociale du pays.
Des artères désertes à huit bandes et un parlement aux dimensions mégalomaniaques rappellent que la transition est loin d'être gagnée. Sans compter que le pays stagne, en dépit de ses richesses évidentes (joyaux, pétrole), dans les tréfonds de l'indice de développement humain.