
Les François

Hormis leur prénom, rien ne semble pouvoir rapprocher François junior, étudiant sans le sou d’origine maghrébine, et François senior, sexagénaire aigri devenu un tantinet raciste, qui n’apprécie plus que sa superbe voiture de collection. Mais Reine, la pétillante femme de ménage du retraité, en est certaine: comme l’affirme le proverbe arabe, "le hasard est une loi qui voyage incognito". Et sans demander l’avis de son râleur de patron, la voici qui décide de confier le jardin délaissé du vieux François aux bons soins du plus jeune. La métaphore ne fait pas de doute: ce carré de verdure en friche que tâche de revigorer Junior, c’est le cœur d’un homme seul, devenu misanthrope faute d’amour. Mais sous la croûte desséchée, la terre reste riche et généreuse.
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Agacé, François senior se montre bientôt curieux de ce gamin attachant, aussi cultivé que paumé. Il s’inquiète même, lui qui n’a jamais eu d’enfant - à moins que, peut-être… Tendre chronique d’une rencontre inopinée, Les François évite les écueils de la comédie facile. Tous ne trouveront pas ce qu’ils espéraient. Les blessures ne s’effaceront pas. La douceur et les instants de bonheur ne fleuriront pas là où ils les attendaient. Mais ils germeront tout de même, en réveillant délicatement l’espoir et la joie oubliés. Et tout comme Reine, qui observe les deux hommes avec bienveillance sans céder aux préjugés, le téléspectateur suivra d’un œil attentif - voire attendri - l’évolution parallèle de ce jeune sans père et de cet homme sans famille.
Ce sympathique téléfilm doit beaucoup à ses acteurs, en particulier Daniel Russo et Issame Chayle. Le premier offre à son personnage de vieil ours mal léché une belle ambivalence. Et le second - qui campe ici, avec beaucoup de justesse, son premier grand rôle pour la télévision - prête à Junior ce lumineux mélange de fougue et de désarroi qui confère à la jeunesse sa touchante beauté.
Anne-Claire Préfol