[MAGAZINE] Un jour, une histoire: Dans la collaboration

Lorsqu’il rencontre Hitler le 24 octobre 1940 pour entériner son engagement dans la collaboration avec l’Allemagne nazie, le maréchal Pétain en assure la responsabilité: "Cette politique est la mienne. (…)C’est moi seul que l’Histoire jugera". Elle le fera, certes. Mais elle y mettra le temps. Car Pétain, après-guerre, est désormais une figure bien encombrante. Adulé, le vainqueur de Verdun a mobilisé derrière lui nombre de Français malgré la soumission, malgré la promulgation des lois antisémites, malgré les rafles. A l’heure de la reconstruction, la France veut oublier - la trahison, les divisions et, surtout, les crimes de Vichy. Alors que s’érigent le mythe gaullien et celui d’une résistance unie marchant comme un seul homme, les autorités s’attachent à dissiper les marques de la honte. Pétain, que de Gaulle aurait bien fait juger par contumace pour mieux tourner la page, est condamné à perpétuité et envoyé sur L’Ile-d’Yeu, loin des regards. S’ensuit un long silence politique sur les responsabilités de la France durant ces années noires. D’aucuns tenteront, pour des motifs parfois opposés, de briser le tabou. Mais le sujet continue d’attiser les tensions, obstacles à un sain débat national. Jusqu’à ce qu’en 1995, le président Jacques Chirac reconnaisse enfin la responsabilité de l’Etat français dans la déportation. C’est l’issue d’un long combat, fort bien conté dans ce récit passionnant et enlevé où se mêlent les voix de Serge Klarsfeld, Robert Badinter, Roland Dumas ou Robert Paxton…

De voix, il n’y en a qu’une dans le second documentaire proposé par France 2 ce soir. Mais quelle voix! Celle d’une jeune fille juive, Hélène Berr, dont le journal intime constitue la matière première de ce film tout à fait saisissant. Un témoignage exceptionnel - remarquablement mis en bouche par la comédienne Céline Sallette. Plus qu’une lecture, une incarnation.

Suivi de  Hélène Berr, une jeune fille dans Paris occupé France 2 22h40. 4 étoiles.