
[TELEFILM] 3 X Manon

Attendez-vous à être happé dès les premiers instants. Dès cette séquence d’ouverture choc où l’on découvre Manon, 15 ans, une douleur muette au creux du ventre - depuis longtemps sans doute. La voix étranglée de sanglots, en pleine crise de boulimie, la jeune fille endure les questions sans fin d’une mère à l’amour vampirique. La tension monte, le cœur - celui de Manon comme le nôtre - étouffe sous le poids du chantage affectif. Jusqu’à éclater violemment. A bout, Manon frappe sa mère d’un coup de couteau et se retrouve devant le juge. L’adolescente a un passif mais une dernière chance lui est donnée: plutôt qu’en prison, c’est dans un centre éducatif fermé qu’elle est envoyée. Une grande bâtisse peu aimable où elle rencontre d’autres jeunes filles en rupture et des adultes, professeurs ou éducateurs, qui essaient tant bien que mal d’encourager leur réinsertion. Avec eux, parfois contre eux, Manon devra accepter et apprivoiser sa violence pour, peut-être, la dépasser enfin.
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C’est ce parcours que le réalisateur Jean-Xavier de Lestrade, oscarisé pour Un coupable idéal, s’est attaché à décrire en trois épisodes bluffants de justesse, d’énergie et d’intensité. Comment Manon en est-elle arrivée là, on ne le saura pas vraiment, le réalisateur se gardant d’expliquer plus avant le malaise de l’adolescente. Un parti pris qui éloigne tout pathos, toute psychologie sauvage pour rester au plus près de l’émotion à vif de la jeune héroïne. Et qui révèle d’autant mieux l’interprète de cette petite âme fragile et excessive, tellement émouvante: Alba Gaïa Bellugi, authentique diamant brut constamment sur le fil, étonnante de vérité jusque dans les scènes les plus déchirantes. Elle est la perle d’un casting par ailleurs irréprochable, dont la partition - remarquablement coécrite par le scénariste Antoine Lacomblez - approche le sans-faute.